Victor Ferreira photographe de la Légion étrangère.
Ancien sous-officier de la Légion étrangère pendant 20 ans, Victor Ferreira photographie aujourd’hui ses frères d’armes. Une façon de rendre hommage aux képis blancs et à leur engagement.
Le livre de photographies de Victor Ferreira : "Ils ouvrent la voie, sapeurs légionnaires du 1er régiment "est sorti en librairie depuis le 10 novembre.
Ce livre est une invitation à entrer dans l’intimité des 950 légionnaires du 1er Régiment étranger de génie stationné à Laudun. Il permet de saisir chaque instant de leur vie, au régiment comme sur le terrain.
Les photographies ont été réalisées sur une même période de quelques mois par le photographe Victor Ferreira mais aussi par les légionnaires eux-mêmes sur le terrain. Les différentes missions ou situations dont les photos témoignent se déroulent quasi simultanément, que ce soit au quartier, en exercice ou en opération.
À l’heure où la guerre redevient une réalité en Europe, nos armées se préparent à des engagements plus durs.
Le colonel François Perrier, chef de corps du 1er REG explique : "À travers ces instants de vie capturés par Victor Ferreira, vous emboîtez le pas des hommes du 1er Régiment étranger de génie, dans leur quotidien comme à l’entraînement ou en mission. Vous découvrez tout ce qui fait la richesse d’une unité de Légion étrangère, la fraternité d’armes, le culte de la mission, l’amour du travail bien fait, la fidélité élevée au rang de vertu cardinale. Et, vous allez à la rencontre des sapeurs légionnaires, des soldats d’exception au sens où ils sont peu nombreux à marier les talents du légionnaire et ceux du sapeur.
leur devise, "honneur et fidélité".
La préface de l’ouvrage est signée du général d’armée Thierry Burkhard, chef d’état-major des Armées. "Au lecteur de cet ouvrage, je veux dire qu’il trouvera des images bien vivantes de l’existence d’hommes hors du commun, qui n’ont pas choisi la voie de la facilité en coiffant le képi blanc et en maniant explosifs, mines et engins du génie.
"Ils ouvrent la voie" : "Être devant" est l’école de l’exigence, car de la réussite de la mission dépend le succès des frères d’armes, qu’ils soient fantassins, cavaliers ou logisticiens.
"Ouvrir la voie", c’est se projeter vers l’avant. La guerre qui s’est invitée en Europe, le 24 février 2022, signifie que la préparation à des engagements plus durs est indispensable".
Un ancien de la "maison"
Victor Ferreira connaît bien ceux qu’il a photographiés. Et pour cause. Pendant près de vingt ans, il fut lui même sous-officier au sein de la Légion étrangère. Victor Ferreira a quitté le Portugal en 1983 pour venir en France. Il s’est engagé à la Légion Étrangère en 1984. Il a servi au 4e RE (Castelnaudary), à la 13e DBLE (Djibouti), au 3e REI (Kourou) et au 2e REI (Nîmes), où il a fait la plus grande partie de sa carrière. Il a notamment participé à de nombreuses opérations extérieures. Il a quitté la Légion fin 2007 en tant qu’adjudant-chef.
"Bienvenue à Nîmes", la crèche de la compagnie CCL est présentée sur un plateau tournant.
Chaque Noël, les six compagnies du régiment créent et se mettent en scène dans leur crèche. Une célébration de la nativité étonnante, à découvrir ce 24 décembre à partir de 14 heures, 57 rue Vincent Faïta à Nîmes. Pour s'émerveiller en famille, à quelques heures du réveillon.
L’idée un peu folle est née dans la tête du Lieutenant Romain, légionnaire affecté à la Compagnie de commandement et de logistique (CCL) : retracer sur un plateau tournant animé en trois scènes et en 8 minutes top chrono, l’histoire épique de la CCL, de sa naissance en Algérie jusqu’à son installation définitive à Nîmes (photo).
Comme les 5 autres compagnies dans la course, la CCL présentait officiellement, hier après-midi, sa crèche de Noël au 2e REI, devant un jury particulièrement exigeant.
Le Général Ozanne, le vicaire Rodriguez et le légionnaire Robert notamment, membres du jury.
Vers 14h 30, le Général Ozanne, commandant de la 6e Brigade légère blindée, le vicaire général Jean-Claude Rodriguez et le légionnaire Robert, plus jeune légionnaire du régiment en temps de service (photo) notamment, ont pu admirer les véritables prouesses de Romain, Souleïman, et de tous les autres qui – depuis une semaine non-stop (de 6 à 23 heures !) – se sont affairés à la construction de ce décor animé, éclairé, délicat et tout simplement magnifique.
Tableaux vivants
Émerveillé par l’ingéniosité technique déployée ici, le vicaire Rodriguez savoure. Et en apprend beaucoup sur la Légion et sur les hommes qui la composent.
" Dans chaque crèche, le message de Noël est présenté avec beaucoup de grâce, de finesse ", commente l’homme d’Église, déjà conquis par les tableaux vivants des autres compagnies visitées.
Ombres chinoises, textes puissants, mais aussi scénarios humoristiques ou bien poignants, chacune des compagnies en lice s’est distinguée durant le concours. Un concours dont la compagnie lauréate sera dévoilée ce soir, lors de la veillée puis du dîner des légionnaires, malheureusement non ouverts aux civils.
Le mulet Tapanar, mascotte du régiment.
D’ici-là, le grand public est invité à découvrir les six crèches en lice dans l’enceinte même du 2e REI, 57 rue Vincent Faïta à Nîmes, à partir de 14 heures (entrée gratuite – se munir d’une pièce d’identité).
A noter, le mulet Tapanar, sera lui aussi de la partie. De source proche du dossier, la nouvelle mascotte du régiment ne raterait le concours annuel des crèches pour rien au monde.
Cet évènement fédérateur et respectueux d’une tradition indérogeable pour la Légion étrangère.
L'Amicale des anciens d'Aubagne a convié ses membres au mess de Carpiagne
Deux cents participants ont posé autour des autorités et du drapeau avant de déjeuner et de chanter.
C'est une tradition à l'occasion de la fin d'année, l'Amicale des Anciens de la Légion Étrangère (Aale) d'Aubagne et sa région convie ses membres à un repas de Noël. Le mess des sous-officiers du 1er Régiment Étranger de Cavalerie au camp de Carpiagne, a servi d'écrin à ce moment fraternel et festif. Les anciens de la Légion, les sympathisants et leurs amis ont été accueillis par le capitaine en retraite Gil, président, particulièrement heureux de la présence des chefs de corps des deux régiments de Légion de la région, le colonel Henri Leinekugel le Coq pour le 1er REC de Carpiagne et le colonel Arnaud de Peretti pour le 1er RE d'Aubagne.La présence de Maylis Lardet, épouse du général commandant la Légion étrangère, actuellement en mission.
Légion étrangère, le 30/04/2016 / PHOTO: BONY/SIPA / 00753956_000044
De journaliste à légionnaire, quand l’amour de la France pousse à combattre et à mourir en héros sous le drapeau tricolore.
À l’occasion de ce jour de l’Armistice, et en notre temps où les Français s’estiment trop peu, souvenons-nous de la vie d’un de ces héros venus de loin, les armes à la main, pour défendre la France durant la Grande Guerre. À l’époque, alors que plusieurs Canadiens français ultramontains s’étaient désolidarisés d’une République jugée apostate, et que beaucoup d’autres partirent combattre sous le drapeau de l’Empire britannique, une poignée d’irréductibles Québécois préférèrent consacrer leur vie à la mère patrie. À des milliers de kilomètres, et après des siècles d’isolement, c’était une minorité d’hommes qui se crurent encore et à ce point redevables. Parmi eux se trouvait Paul Caron, dont l’histoire méconnue mériterait d’être rappelée en ce 11 novembre.
Le jour même qu’on annonça la guerre, il quitta son travail de journaliste pour traverser l’océan et s’engager comme simple soldat à la Légion étrangère. Il n’avait pas encore 25 ans. Il est profondément marqué par tous ces soldats – « Français, Anglais, Russes, Belges, Italiens et sujets de vingt autres pays » –, unis au sein de ce célèbre régiment et sous un seul drapeau, le drapeau français. Comme il le décrit dans une lettre le 18 avril 1915, ils sont plusieurs, à l’image des Italiens qui l’émeuvent sans doute parce qu’ils lui ressemblent, qui « paient de leur sang la dette de reconnaissance que leur patrie doit à la France ». Mais dans le cas de Paul Caron, quelles furent les raisons personnelles qui pouvaient bien motiver ce jeune Gaulois, ce qu’il était à la fois dans l’ascendance et dans l’âme ?
C’est que, depuis sa tendre jeunesse, Paul Caron vouait à la France un amour passionnel. Au collège, il ne se gêne pas d’annoncer à ses camarades de classe qu’il « désirerait être soldat de l’Armée française », tel un chevalier au service de sa dame. C’est une vocation qui lui mérita incompréhension et moqueries (une de ses biographes, Béatrice Richard, la traite elle aussi de « folle chimère »), mais, comme ces grands exaltés de la littérature française – nous pensons à Charles Péguy ou bien à Ernest Psichari –, Paul Caron n’en fit rien ou, plutôt, carburait à tout.
La France n’était pas à ses yeux un pays comme les autres. Déjà, sa défense face à l’Allemagne devait, selon lui, importer à tous les Canadiens français, car c’était bien la civilisation française qui était en danger. Si celle-ci devait disparaître sous la mitraille dans la Somme, elle devait peu après s’éteindre en Amérique. Mais, il y a d’autres raisons qui le poussèrent à affronter la bouche des canons, dût-il en mourir, pour une patrie qui n’était pas tout à fait la sienne dans les faits, mais qui l’était entièrement dans le cœur.
« France reviviscente, France inexpliquée, il y a toujours du miracle en toi », cite-t-il dans une de ses lettres envoyées depuis les tranchées, le 25 septembre 1915. C’est précisément cette propension française au merveilleux qui lui inspirait une dévotion mystique envers sa patrie d’adoption et qui lui transmettait aussi une infatigable énergie pour accomplir son devoir au front. S’il ne cachait pas la misère de la vie de soldat dans ses lettres et ses chroniques transmises au journal québécois Le Peuple de Montmagny, il lui était impossible de se complaire et de se plaindre. Chaque difficulté était l’occasion d’un redressement, et chaque malheur, l’occasion de s’obstiner dans une espérance intarissable en la France. Une joie, si justement aveugle, qui ne requerrait pas la vue puisqu’elle avait la foi.
Dans sa correspondance, Paul Caron nous brosse un portrait de la France, mais n’y verra pas, comme Charles de Gaulle, « une princesse des contes de fées » ; plutôt, il vénère la simplicité plus charnelle « des vieilles églises villageoises » dont les clochers sont pris pour cibles, « le tableau réconfortant que présentent les prairies où le foin abonde » et ses paysans qu’il lui coûtait de quitter, « car, à les connaître, on apprend à trouver tout naturel que la France inspire de par le monde de si chaudes sympathies et provoque de si grands et pressants sentiments d’admiration et d’amour ». Dans une lettre datée du 24 juin 1915, il ne tarit pas d’éloges non plus sur les femmes françaises, « dévouées et laborieuses comme toujours, pour affirmer de toute la grandeur de leur esprit de sacrifice, la parfaite communauté d’aspiration, d’idéal qui fait de toute la France le bloc intact et sans fissure », puis qui « ne craignent pas d’assumer des travaux souvent disproportionnés à leurs forces, mais non à leur courage ».
« En avant ! C’est pour la France. Vive la France ! »
Après avoir été versé dans un régiment français et au terme d’une formation d’officier au Centre d’instruction d’élèves aspirants de Saint-Cyr au mois de février 1917, Paul Caron fut chargé avec ses hommes de prendre la ville de Loivre au Chemin des Dames. Le 16 avril, après trois ans d’engagement, il y trouvera la mort en héros, face aux mitrailleuses, et recevra la Médaille militaire à titre posthume. Bien avant la guerre, il avait confié à un ami : « J’ai voué ma vie à la France, en voudra-t-elle ? C’est le secret de Dieu ». La France accepta volontiers et, voyant qu’il se fut fait tout petit, lui fit passer par la porte étroite ; de l’autre côté, les témoins nous disent qu’il a mené sa dernière charge en criant « En avant ! C’est pour la France. Vive la France ! »
Inhumation d'Hubert Germain au Mont Valérien, le 11/11/2021. / PHOTO: Tristan Reynaud/SIPA / 01047991_000019
Se remémorer ce chevalier moderne, cette âme légionnaire au parcours incroyable, reçu par le général de Gaulle au sein de l’ordre des Compagnons de la Libération.
« L’oubli vient seulement quand le canon se tait », disait le général Hallo. Alors que règne le silence des batteries et que le commun des Français en ignore le son sur son territoire depuis deux générations, que reste-t-il du souvenir ? Le 12 octobre soulignait le premier anniversaire de la mort du dernier Compagnon de la Libération, Hubert Germain. Son inhumation dans la crypte de la France combattante au Mont-Valérien, le jour de l’Armistice en 2021, doit encore nous interpeller, inquiet comme il l’était de transmettre le souvenir des morts à une société davantage préoccupée par des droits que par les devoirs, dont celui de la mémoire collective.
Dans l’optique d’un tel devoir, l’auteure Guillemette de Sairigné rend hommage au chevalier croisé dans un émouvant ouvrage, Le dernier des Compagnons : Hubert Germain, paru aux Éditions Tallandier. C’est l’occasion de se remémorer la vie de cet homme si humble, mais aussi terriblement farouche qui avait tant à dire pour ceux qui savaient l’écouter. Au-delà de sa mort, sa voix se fait entendre grâce aux entretiens transcrits par l’auteure, des entretiens vécus non seulement à titre d’historienne chevronnée, mais aussi à titre d’amie, car Hubert Germain avait servi durant la Seconde Guerre mondiale sous les ordres de son père, le capitaine Gabriel de Sairigné, dont la vie fut fauchée trop tôt au champ d’honneur en Indochine. Ainsi, pendant toute une année s’échelonnèrent des rencontres hebdomadaires lors desquelles les souvenirs, les leçons de vie et le parcours furent évoqués.
Et quel parcours ! Celui d’Hubert Germain le menait tout droit vers la chevalerie moderne. La prédisposition à la noblesse de cœur n’est pas réservée à une caste ; elle est accessible à tous, pourvu qu’on honore la terre et les morts au sein de la famille ou au contact d’un entourage enraciné. Voilà Germain qui, à son baptême, reçut le prénom Joseph de son petit-cousin tué au front à la Grande Guerre ; voilà encore le maréchal-ferrant du village qui, mailloche en main, lui vante le paysage drômois qu’il aida à modeler en ferrant les mules qui trainèrent les charrues qui, à leur tour, tracèrent les sillons ; voilà, enfin, la grand-mère Léocadie, « couturière dans une vallée perdue du Dauphiné », qui exigeait de sa descendance, du fils jusqu’au petit-fils, d’aller « toujours plus loin, toujours plus haut » pour la France et – sans jamais l’oublier –, grâce à celle-ci. L’amour de la patrie est palpable et ses liens sont charnels.
Il semblait donc naturel aux yeux d’Hubert Germain, lorsque les Allemands envahirent Paris, de remettre copie blanche aux examens et partir faire la guerre ; c’est la simplicité de l’homme qui ne va pas au plus facile, mais qui va au plus propre. Fasciné depuis toujours par la Légion étrangère, il intègre ses rangs à l’âge de 21 ans. Deux ans plus tard, il sera reçu par le général de Gaulle au sein de l’ordre des Compagnons de la Libération alors qu’il n’est qu’un simple lieutenant. On suit ensuite Hubert Germain dans sa carrière politique de l’après-guerre, d’abord en tant que maire, jusqu’aux fonctions de ministre.
Mais il revient sans cesse à la Légion étrangère et c’est cet exemple de fraternité indéfectible qui jalonne le fil rouge de la biographie. Au-delà des décorations, il dira que la Légion l’aura accompagné toute sa vie durant, elle qui lui aura inculqué le culte des morts. La devise de son régiment sera d’ailleurs restée avec lui jusqu’à la fin : More majorum, à la manière de nos anciens.
Il est vrai que la Légion étrangère entretient le souci constant de préserver la mémoire et elle ne manque pas de symboles et de rites pour en assurer la transmission ; Hubert Germain vient donc s’apaiser auprès des képis blancs. Lorsqu’on dit que les engagés volontaires de la Légion étrangère sont « dépositaires » de la gloire des Anciens, ce n’est ni une exagération, ni une métaphore : les nouvelles recrues se présentent à la crypte d’Aubagne à l’obtention de leur premier contrat, où ils s’inclinent devant la main en bois du célèbre capitaine Danjou – qui, avec ses hommes, « fit Camerone » –, puis devant les noms de tous les officiers de la Légion morts pour la France. Ils y retournent à la fin de leur carrière à l’occasion d’un ultime hommage. Ces idées du temps long, de l’ascendance et de la tradition, les légionnaires les retiennent jusqu’à la fin de leur vie. Aux côtés des jeunes, les anciens continuent d’y jouer un rôle actif : c’est parmi eux qu’est sélectionné chaque année l’ancien qui aura l’honneur de porter la relique du capitaine Danjou lors des commémorations de la bataille de Camerone le 30 avril à Aubagne. Hubert Germain en a été le prestigieux élu en 2012 et, à cette occasion, avoua à l’auteure qu’il se sentit enfin de retour chez lui. La Légion étrangère, avec notre héros pour parangon du souvenir, nous enjoint en ces jours qui nous mènent aux commémorations du 11 novembre : « On ne pleure pas ses morts, on les honore ».
Deux soldats de l'armée franco-indochinoise brandissant leurs armes derrière un point fortifié de sacs de sable, alors qu'ils combattent les forces communistes du Viet Minh, 24 janvier 1947 / AP / SIPA
Connaît-on vraiment la guerre d’Indochine ? Connaît-on ceux qui l’ont faite ? Un dictionnaire de cette guerre, publiée il y a un an, fait la lumière sur un conflit que les Français semblent avoir oublié.
Nous sommes le 26 juin 1994. Un homme droit et fier, aux traits marqués, dépose une gerbe au bas d’un monument isolé dans la cuvette de Diên Biên Phu. Ce monument, il l’a construit de ses propres mains, sur un lopin de terre qu’il a acheté de ses seuls moyens et avec des matériaux qu’il a payés et traînés dans un camion sur une ancienne route coloniale. Rolf Rodel, ce bâtisseur comme tant d’autres légionnaires, ancien survivant de la bataille sanglante qui s’était déroulée en ces lieux, est entouré de Vietnamiens. Il y a même quelques dignitaires venus rendre un hommage solennel à leurs ennemis d’autrefois. Malgré cet entourage, il est seul, en quelque sorte, puisqu’à l’inauguration de ce monument aux morts français – le seul et l’unique en ces parages –, aucun représentant français ne s’est déplacé pour honorer ce sacrifice. C’est donc Rodel lui-même, avec le président de la province vietnamienne, qui devra couper le ruban bleu, blanc et rouge.
Encore aujourd’hui, à l’exception de quelques mentions dans les journaux un 7 mai pour commémorer la bataille de Diên Biên Phu – heureusement que Schoendoerffer en a fait un chef d’œuvre au cinéma –, l’on dirait que la guerre d’Indochine (1946-1954) est restée figée dans cette éternelle parenthèse de la mémoire. Coincée entre la Deuxième Guerre mondiale où la France en sortit victorieuse aux côtés des Alliés, puis la guerre d’Algérie où elle en sortit décidément moins vaillante, c’est à peine si, en 1954 ou en 2022, l’on sait définir ce conflit qu’on a rarement cherché à comprendre.
« Une stérilité nationale qui est le résultat d’un État qui jongle et qui hésite »
Salutairement, La guerre d’Indochine. Dictionnaire, paru chez Perrin avec le soutien du ministère des Armées, ainsi que la participation d’une cinquantaine de chercheurs civils et militaires sous la direction d’Ivan Cadeau, François Cochet et Rémy Porte, traite de front notre question : quel était le but de la guerre d’Indochine ? Était-ce par exemple une tentative de recolonisation, ou bien une lutte comme tant d’autres à cette époque contre l’idéologie du communisme ? Le lecteur demeure frappé par cette France qui n’a pas su accoucher d’une idéologie positive pouvant s’opposer à celle de ses ennemis, comme le soulignait en 1955 le capitaine Prestat. Une stérilité nationale qui est le résultat d’un État qui jongle et qui hésite. Face à l’absence de stratégies à long terme, on comprend que les troupes souffrirent moralement, aussi, devant le haussement d’épaules du peuple.
Le principal coupable désigné par l’opinion publique, cependant, n’étant ni le communiste du Viêt Minh ni l’État français désaxé, se trouvait incarné par l’Armée française. Ce blâme peut raisonnablement expliquer une part de la défaite si l’on considère que l’antimilitarisme du PCF joignait, en une combinaison fatale, la trahison d’une élite politique à l’hostile indifférence du public. L’arrivée des communistes aux hautes fonctions de l’État à la fin de la Seconde Guerre mondiale absorbe tout le discours, si ce n’est pour aussi trahir à l’occasion les intérêts de la nation en fournissant des informations secrètes à l’ennemi.
On découvre également, dans des faits rarement mis de l’avant, l’ampleur de la complaisance de l’État et de ceux qui se proclamèrent « défenseurs des droits de l’homme ». En pleine guerre, les camps de prisonniers ne faisaient pas trop pour cacher leur taux de mortalité de 42% (le Dictionnaire nous indique habilement qu’à titre de comparaison, « les prisonniers de guerre français en Allemagne entre 1940 et 1945 comptent moins de 5% de morts »). Encore, on souligne que sur les 9000 prisonniers de Diên Biên Phu, 3000 seulement revinrent vivants après trois mois d’emprisonnement. Au moyen d’une hypocrisie qui ne nous étonne plus, le PCF – dont certains de ses militants, comme Georges Boudarel, servirent l’ennemi et participèrent à la torture des soldats français prisonniers – régnait tout en dénonçant les « crimes du colonialisme ».
Le Dictionnaire des légendes
Le Dictionnaire éclaircit et dénonce comme il se doit, mais il élève aussi comme il le faut à travers les nombreux portraits des hommes et des femmes héroïques et, pour plusieurs, devenus légendaires. Citons entre autres Claude Barrès, petit-fils de Maurice Barrès ayant d’abord passé par les Forces françaises libres et qui sera tué plus tard en Algérie ; Erwan Bergot, écrivain militaire couronné par l’Académie française qui survécut au supplice d’une marche à la mort vers les camps du Viêt Minh ; Marcel Bigeard, le mythique, qui repoussa trois assauts ennemis ; Gabriel Brunet de Sairigné, Compagnon de la Libération et commandant de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère, qui sera tué lors d’une embuscade.
Le Dictionnaire révèle aussi ces grands hommes méconnus ou oubliés. Faisons renaître le souvenir de Paul Brunbrouck qui, à deux reprises et sans espoir de renforts, refusa de se replier face aux assauts à Diên Biên Phu. On lui prêtera ces nobles paroles, « Pour moi, France n’est pas un vain mot, et ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort ». Qui se souvient d’Hervé Burgens de Broca, cet ancien combattant de la Grande Guerre qui rejoignit Vichy et, après une condamnation à mort, choisit la Légion étrangère pour y devenir une de ses plus illustres figures en Indochine ? Il y laissera sa vie, ayant largement réparé ses fautes passées. Enfin, le Dictionnaire nous rappelle également ces Vietnamiens qui, amoureux de leur nation, rallièrent la France face aux communistes. À ce titre, ne laissons pas sombrer dans l’anonymat le prince Vinh San ; d’abord révolté dans sa jeunesse contre la colonisation de son pays, il finit par s’engager dans la Résistance – la « voie de l’honneur » –, et ensuite dans l’Armée française en tant que caporal. Envoyé spécial du général de Gaulle en Indochine afin de calmer les tensions, il périt dans un accident d’avion.
Après avoir refermé le Dictionnaire, l’on retient particulièrement le portrait saisissant de Hélie de Saint Marc, au nom déjà célèbre. Cet homme qui aura fait la Résistance et qui aura survécu à l’arrestation et à la déportation aux mains des nazis, compara très justement, suivant le traumatisme indochinois, le destin des Vietnamiens fidèles à la France à celui des Harkis. Que l’on ne s’étonne pas, alors, de sa digne défense face au tribunal à la suite du Putsch des généraux, effaçant l’humiliation subie par l’Armée française quelques années plus tôt.
La guerre d’Indochine. Dictionnaire, sous la direction d’Ivan Cadeau, François Cochet et Rémy Porte, Perrin, 2021, 950 pages.
Dimitri Amilakvari (1906-1942), fougueux légionnaire, mérite que l’on se rappelle de lui. À Bir Hakeim, dans le désert, il déclarait: «Nous, étrangers, n’avons qu’une seule façon de prouver à la France notre gratitude pour l’accueil qu’elle nous a fait, c’est de mourir pour elle».
Il avait le panache de d’Artagnan, la noblesse d’Athos, le raffinement d’Aramis et la truculence de Porthos… Oui, le lieutenant-colonel Dimitri Amilakvari de la Légion étrangère était tous ceux-là à la fois. Comme le dit le refrain, « ils ont une âme de mousquetaire, les légionnaires ».
Ce prince géorgien, arrivé en France en tant que réfugié politique avec sa famille suivant l’invasion par l’Armée rouge de son pays natal, fit honneur à l’idéal et aux fortes têtes de la Légion. Il y servit de 1926 jusqu’à sa mort au champ d’honneur en 1942 mais, malgré ses brillants exploits et sa présence mythique parmi les rangs de la France Libre, il est longtemps demeuré inconnu du grand public.
« Nous, étrangers, n’avons qu’une seule façon de prouver à la France notre gratitude pour l’accueil qu’elle nous a fait, c’est de mourir pour elle »
Enfin, en 2021 parut l’ouvrage Dimitri Amilakvari : un prince combattant, la toute première biographie de ce grand soldat qui participa aux batailles de Bir Hakeim, après quoi il fut fait Compagnon de la Libération, et d’El Alamein, au cours de laquelle il est mort pour sa patrie d’accueil. C’est l’écrivain et l’ancien lieutenant-colonel de la Gendarmerie nationale Jean-Paul Huet qui nous délivre de l’oubli collectif afin d’honorer ce héros devenu pleinement, passionnément Français. La deuxième édition revue et augmentée grâce à des renseignements géorgiens, publiée en 2022 à l’occasion du 80e anniversaire de la mort du prince Amilakvari, permet à tous les lecteurs de plonger dans la mémoire française et d’en ressortir engaillardi de patriotisme.
Quelques mois avant la Défaite de 1940, Dimitri Amilakvari avait reçu la naturalisation française. Au moment de rallier le général de Gaulle à Londres – c’est le début de sa grande aventure –, il déclame ces paroles toutes empreintes d’honneur et de fidélité et que le biographe fait si bien de nous rappeler : « Je dois tout à la France, ce n’est pas au moment où elle a besoin de moi que je l’abandonnerai. »
Jean-Paul Huet nous fait également découvrir cette phrase du prince légionnaire, prononcée dans l’enfer de Bir Hakeim, alors que les forces de Rommel étaient dix fois plus nombreuses que celles de la 1er Brigade Française Libre: « Nous, étrangers, n’avons qu’une seule façon de prouver à la France notre gratitude pour l’accueil qu’elle nous a fait, c’est de mourir pour elle. » Ces mots avaient l’allure d’un serment comme celui de Camerone, mais l’heure du sacrifice n’avait pas encore sonné. On le sait, la ténacité des légionnaires assura à Bir Hakeim la première grande victoire des résistants français et le dévouement du prince, comme celui des autres chefs ce jour-là, y était pour quelque chose. Ayant pour règle d’or que « le chef doit payer de sa personne et être toujours devant », Amilakvari accumulait les faits de bravoure pour encourager ses hommes, allant jusqu’à s’exposer au feu de l’ennemi sans casque et privilégiant son képi. « On n’abdique pas l’honneur d’être une cible ! », comme disait Cyrano. À l’instar des Saint-Cyriens qui chargeaient hors les tranchées coiffés du casoar, le képi était son panache.
Victime de la bataille d’El Alamein
Le destin s’accomplit cependant à la Bataille d’El Alamein, le 24 octobre 1942 : débordé par l’ennemi, on avait offert au lieutenant-colonel de le ramener vers l’arrière à bord d’un blindé léger. Il refuse en grand seigneur : « Ma place est à la Légion, au milieu de mes hommes. » À peine quelques instants plus tard, âgé de 36 ans, Dimitri Amilakvari s’effondre à cause d’un éclat d’obus qui le frappe mortellement à la tête. Fidèle à son habitude, il ne portait que son képi. Celui-ci, troué du côté gauche, peut être aperçu aujourd’ hui au Musée de la Légion étrangère à Aubagne. Préservé comme une véritable relique, la Légion sait par-là honorer ses morts et respecter une de ses plus belles devises, More majorum, à la manière de nos anciens. Avant de devenir de vrais légionnaires, tous les engagés volontaires sont tenus de se présenter devant la crypte de la Légion – un monument solennel qui se trouve à la droite de ce célèbre képi –, et ont la chance de s’incliner face au sacrifice d’Amilakvari.
Jean-Paul Huet déplorait dans l’introduction de cette biographie que le nom du prince géorgien « n’évoque rien ou si peu aux jeunes générations ». Saluons sa contribution accessible au grand public, sans pour autant avoir négligé le travail scientifique aux archives. Réunissant pour une première fois également les témoignages de grands militaires, dont ceux du maréchal Juin, des généraux Rollet, Simon, Koenig, Saint-Hillier, Catroux et de Gaulle, l’historien réussit sa mission, celle d’enrichir le souvenir français et de nous donner à admirer un autre héros national.
Thierry Fusalba a déjà connu plusieurs vies et pas des moindres. Cet ancien officier de la légion étrangère a toujours écrit, des poésies dès son enfance, puis des romans, des pièces de théâtre et des essais politiques. « L’armée que j’ai connue lors de ma conscription a été une révélation. À la suite de mon service militaire, j’ai intégré l’école des officiers et me suis ensuite engagé dans la légion étrangère où j’ai servi en Afrique notamment et à Sarajevo (Bosnie-Herzégovine), avant d’entrer dans différents états-majors et enfin à l’Otan en qualité de colonel de réserve. » Après vingt-cinq années de bons et loyaux services, il a créé l’agence C4, où il enseigne la stratégie de gestion de crises, mais aussi la communication sensible dans plusieurs universités et instituts privés. Il déborde d’idées pour mettre en avant la culture sous toutes ses formes, comme la sculpture, la peinture et l’écriture. Six de ses ouvrages ont déjà vu le jour chez son fidèle éditeur L’Armatthan, comme son dernier né, Mémoire d’outre-espace, cinq nouvelles comme de lointains souvenirs de jeunesse, dont l’une d’entre elles a pour décors Draché, sa commune d’adoption, où il réside désormais avec son épouse et son fils, et dont il est conseiller municipal. Comme une prospective, il traite de l’invasion de l’Ukraine, d’un virus dévastateur et d’un robot qui ressent la mort des humains, mais pas que… « Ma récente paternité me donne des nouvelles idées, notamment l’écriture de contes pour enfants. »
Thomas Jefferson, un des pères de la nation américaine, disait que « tout homme a deux patries : la sienne et puis la France ». Le jeune poète Alan Seeger naquit sous le ciel de la première et, par le mystère qui s’opère chez les hommes disposés à devenir soldats de l’idéal, combattit et mourut sous les drapeaux de la seconde.
Nous l’imaginons dans cette marée d’étrangers qui, le 25 août 1914, défila dans les rues de Paris pour s’enrôler aux Invalides. Ils étaient 20 000, dont 201 Américains, à répondre à l’Appel aux étrangers de Blaise Cendrars et clamant qu’ils avaient, oui ! eux aussi aimé et chéri ce pays d’accueil comme une seconde patrie. Le « besoin impérieux de lui offrir leurs bras au service de la plus grande France » s’était fait sentir, et Seeger s’engagea à la Légion étrangère dès le début de la guerre.
Dette morale
Arrivé à Paris en 1912 après des études à Harvard, il voulut dévouer sa vie à la beauté et à la poésie : seule la France était digne d’admiration à ses yeux, puisqu’elle échappait au matérialisme américain et à la banalité ambiante des relations humaines. Déçu de New York, qui n’avait pas satisfait son envie de grandeur, c’est la France qui lui fournit sa nourriture spirituelle. À l’heure où sa nouvelle patrie était menacée, il devait répondre à sa générosité, dût-il en mourir. Faisant écho à Cendrars, il confronta les étrangers résidant en France qui hésitaient à s’enrôler : naturalisés ou pas, le devoir leur incombait, puisqu’après avoir récolté « tous les bénéfices et toutes les bénédictions » que la France leur avait offerts en les accueillant, n’avaient-ils pas contracté envers leur nouvelle patrie une dette qui, n’étant certes pas légale, demeurait morale ?
Animé d’une foi hautaine, intransigeante et infaillible en sa terre d’accueil, n’apercevant que gloire et beauté dans les paysages défigurés, puis ne se plaignant jamais du dur labeur propre aux soldats, le légionnaire Seeger avait le don de se faire remarquer, notamment par ses supérieurs. Enthousiaste et énergique, aimant passionnément la France, engagé auprès du Régiment de marche de la Légion étrangère(RMLE), Alan Seeger combattait le jour et écrivait la nuit, puis son talent littéraire prit toute son ampleur pendant la guerre. L’armée française de l’époque étant sensible au génie du soldat-poète, elle encensa son talent.
D’ailleurs, après sa mort en 1916, la ville de Paris envisageait déjà l’installation d’un monument à son effigie dans le Quartier Latin portant l’inscription de son poème le plus célèbre, J’ai un rendez-vous avec la mort. Ainsi, la ville rendait hommage non seulement au soldat, mais aussi à l’écrivain. Jean Richepin, de l’Académie française, refusa de traduire en vers ses poèmes de « premier ordre » tant leur beauté était intouchable. Un journaliste pour Le Matin déclara le 24 août 1916 que « cet admirable volontaire Américain, par ses vers, a écrit un testament que Cyrano de Bergerac eût signé ».
Fiers Français
Les Américains, eux, jugèrent que son œuvre était de « second ordre », démodée et immature, surchargée d’un romantisme périmé qui n’était convenable qu’aux jeunes garçons s’obstinant encore à lire Byron. Le mépris était réciproque : en 1916, les Américains ne s’étant toujours pas décidés à rallier l’effort de guerre, Seeger leur avait reproché l’abîme moral qui les séparait dans Un message à l’Amérique :
« …quand retentit le terrible appel aux armes et que vint le temps de régler la querelle, [les Français] s’élancèrent vers leurs canons et chaque homme fut là, prêt, ardent. Observez, et vous verrez s’ils ne combattront pas jusqu’au bout pour leurs foyers, leurs autels et leur passé.
Oui, ils lutteront jusqu’à ce que tout le sang de leurs veines soit tari, pour l’amour de ce pays qui ne veut pas mourir !
O amis ! dans votre heureux bien-être présent […] si vous voyiez comment peut s’exalter une race, qui n’a point l’amour, non plus que la crainte de la guerre ; comment chacun peut abandonner son rôle personnel pour que tous puissent agir en parfaite communion ; comment des hommes peuvent s’élever jusqu’à la place qu’ils revendiquent, et une nation, jalouse de son bon renom, être fidèle à ses traditions de fierté, – Oh ! regardez ici et que la France vous enseigne ! »
Insatiable d’épopées, Alan Seeger ne connaissait donc qu’un langage, celui de la chevalerie. Dans son Ode à la mémoire des volontaires américains tombés pour la France, Seeger parle encore et toujours de cette seconde patrie qui, « leur ouvrant les rangs glorieux de [ses] soldats, leur a donné cette occasion unique de se surpasser, la chance de vivre une vie pure de toute souillure, et le rare privilège de bien mourir ». Force est de constater que c’est la guerre qui le fit homme et c’est la France qui le fit poète. Les États-Unis n’y firent rien.
Au début du mois de juillet 1916, le RMLE était engagé dans la Somme, ayant pour mission d’atteindre le village de Belloy-en-Santerre malgré le crachement des mitrailleuses allemandes. Dans une lettre adressée à un ami quelques jours avant l’assaut funeste, il parla comme un prince : « Nous montons à l’attaque demain. Nous aurons l’honneur de marcher dans la première vague ». Il sauta le parapet avec un sourire aux lèvres qui dédaignait la vie, sachant par avance qu’il allait mourir jeune, et donc mourir beau. Touché mortellement à l’estomac quelques instants plus tard, il parvint à se faufiler dans un trou d’obus et se prépara au trépas.
Dans le récit des événements relatés par le colonel Montagnon, se passa alors « quelque chose de sublime ». Lors de l’assaut final, les mourants allongés sur le sol crièrent ensemble « Vive la Légion ! Vive la France ! Vive la France ! », se soulevant comme ils le pouvaient pour vivre et voir dans un ultime effort la gloire des survivants. Gisant dans le no man’s land en attendant les secours, Seeger chanta toute la nuit des chansons populaires françaises pour encourager ses frères d’armes qui continuaient le combat. À mille lieues de là, pendant qu’il chantait la France en agonie, le ciel américain brasillait de feux d’artifices pour le Fourth of July. Les secours ne vinrent pas à temps, et le légionnaire mourut sous un ciel français flambé d’obus.
Modeleuse des âmes, la Légion étrangère éleva en un seul corps et en un unique esprit des hommes qui donnèrent tout pour une patrie qu’ils aimaient à espérer et prendre pour la leur. Saluons les États-Unis d’Amérique qui, ce soir-là, donnèrent un de leurs fils à la France. Dans son miracle, elle voua cet étranger à devenir non pas un Français par le sang reçu, mais par le sang versé.