20230721 - Histoire : 1895 - 1905 - Madagascar - Fiche FSALE N° 143 - 1 - L'expédition

FSALE

27 février 2023 - Affichages : 2614

1895-1896 : expédition militaire française à Madagascar.

L’intervention française à Madagascar fut provoquée par la non-exécution des clauses du traité de 1985 qui avait établi un Protectorat de la France sur l’île. Les Français y étaient constamment molestés et le gouvernement Hovas se refusait à poursuivre les auteurs d’attentats devenus de plus en plus fréquents. ‘’Les Sakhalaves, les Antankares et les Antaimours n’ont jamais accepté la suprématie des Hovas qui leur ont imposé des fonctionnaires oppressifs et concussionnaires’’.

En 1895, la France doit envoyer une nouvelle expédition.

 

    • Le 1er Etranger forme avec le 2e régiment un bataillon de marche qui dépend du ‘’Régiment Algérie’’, de l'armée d'Afrique, composé d’un bataillon de légionnaires et deux bataillons de Tirailleurs algériens, sous les ordres du colonel Oudri du 2e régiment étranger. Placé sous les ordres du commandant Barre, l’effectif du bataillon étranger, formé à Sidi-Bel-Abbès, s’élève à 22 officiers, 46 sous-officiers et 772 légionnaires.

 

Le 4 avril 1895, le bataillon de marche s’embarque à Oran.

  • Le bataillon est fort de quatre compagnies ; la 1re du capitaine Perrot, la 2e du capitaine Courtois, la 3e du capitaine Bulot et la 4e du capitaine Sardi.

Le 23 avril, le bataillon débarque à Majunga dans des conditions incroyables : la baie de Bombetoka, à l’embouchure de la Betsiboka, offre un plan d’eau magnifique mais l’ensablement par les alluvions oblige les transports à mouiller loin de terre. Les vapeurs qui arrivent se disputent un vieux ponton charbonnier, les baleinières doivent s’échouer loin du rivage.

  • Le Régiment Algérie prend sa place dans la colonne mobile du général Metzinger. Il constitue l’avant-garde des troupes du général Duchesne, commandant l’expédition.

Des soldats musulmans combattent à Madagascar sous le drapeau français.

189504 - De Majunga à Tananarive - Supplément au Bulletin de l'Afrique Française

 

Expédition de Madagascar -Supplément au journal le Temps - Mars 1895 - Itinéraire Majunga Suberbieville

 

Expédition de Madagascar -Supplément au journal le Temps - Mars 1895 - Itinéraire Suberbieville Tananarive

 

Fin avril 1895, les hostilités commencent avec la prise d’un bourg nommé Marovoay, au fond de la grande baie à l’embouchure de la rivière, par deux bataillons de tirailleurs sénégalais et une compagnie d’infanterie de marine. Les Hovas fuient comme des lapins, y compris le chef Ramastombozaba. 

  • L’objectif est Tananarive, quatre cents kilomètres au sud, dans la montagne.
  • Les légionnaires marchent avec l’avant-garde. Pas d’ennemi en vue. Les Hovas retraitent sans interruption, maintenant toujours une trentaine de kilomètres entre leur arrière-garde et l’avant-garde des Français. Les fièvres et la dysenterie frappent les deux camps.

Expédition de 1895 - Carte pour les affaires de Miadana, Marovoay et du Gué du Tamarinier - Avril - Mai

Le 1er juin 1895, la Légion bivouaque au camp des Hauteurs dénudées. Cent kilomètres ont été franchis depuis Majunga. Les hommes sont rouges de la tête au pied, ainsi que leurs paquetages, les mulets ; la colonne est rouge par la poussière des sentiers de l’Ile Rouge.

  • Assez vite, les vraies difficultés surgissent pour le corps expéditionnaire, condamné à se battre sur plusieurs fronts ; Hovas, climat, conditions naturelles.
  • Les Hovas ne sont pas les plus dangereux. Ils tiraillent de loin sans grande précision et utilisent mal leurs armes. Par contre, la nature offre d’autres obstacles : marécages aux miasmes morbides, fourmis aux piqûres venimeuses, moustiques porteurs de fièvres, caïmans flottants entre deux eaux dans les marigots.
  • Décimé par la maladie, le corps expéditionnaire n’avance pas. Il gagne à peine deux à trois kilomètres par jour, laissant constamment des tombes derrière lui.
  • Expérimentés et aguerris, les légionnaires résistent mieux.

Le 6 juin 1895, l’avant-garde traverse par sections, à bord de la canonnière l’Invincible, la Betsiboka, large de 450 mètres. Les Hovas interrompent leur retraite et se retranchent dans un grand village nommé Maevatana.

Le 9 juin 1895, les légionnaires, les tirailleurs et les chasseurs à pied marchent à pied sur ce village ; la pente est rude ; un ou deux canons tirent d’un fortin perché sur une crête. Les obus mal dirigés n’explosent pas. Le général Metzinger donne l’ordre d’expérimenter quelques obus à la mélinite, nouvelle invention. Le premier de ces projectiles explose juste au-dessus du fortin. Une clameur s’élève dans une palpitation de lambas blancs et les survivants disparaissent au-delà de la crête rouge. Un légionnaire plante le premier de drapeau sur l’ouvrage.

  • Les Hovas abandonnent à Maevatana 700 fusils et 5 canons dont 3 Hotchkiss à tir rapide ; les artilleurs hovas ne connaissaient pas les fusées d’éclatement et se servaient de leurs projectiles comme des boulets. Les fantassins hovas ne savaient pas employer la hausse des fusils.
  • Dix pour cent des hommes du corps expéditionnaire, au moins, sont maintenant hors service. Un hôpital de campagne est installé en hâte à Suberbieville. Certaines unités ont perdu plus du tiers de leur effectif. Le fameux 200e de ligne, dont le chef de corps, le colonel Gillon, a succombé, compte 1 500 malades hospitalisés. Le ravitaillement arrive à Majunga par eau avec des canonnières tirant des chalands et les denrées sont ensuite transbordées à bord de pirogues. • Le général Duchesne décide alors de construire une route pour utiliser les 5000 voitures Lefèvre.
  • Il décide de rester à Suberbieville pendant que le Génie, la Légion et d’autres contingents prélevés sur les deux brigades entreprennent cet ouvrage. 160 kilomètres à construire ; Un demi-tour pour se mettre au travail sur la partie la plus malsaine du trajet.
  • Le 12 juin, la Légion commence sa portion de route entre Beratsnana et la rivière Mandroya. Les hommes du Génie et les légionnaires résistent le mieux au climat mais les terrassiers des autres corps font pitié. Chaque jour, les gradés comptent les manquants.
  • L’hôpital de Suberbieville devient chaque jour plus insuffisant et le cimetière est agrandi.
  • Le 14 juillet 1895, le général Duchesne ordonne une prise d’armes et une revue pour célébrer la fête nationale. Tout le monde doit y participer, même les convoyeurs kabyles. En dernier lieu, la Légion, dont le défilé a toujours fait tout oublier.

 Le 16 juillet, la piste carrossable est construite de Majunga à Suberbieville, et même un peu au-delà ; le corps expéditionnaire-bulldozer reprend sa marche en avant, deux kilomètres par jour. 

  • Construisant la route et se battant, ne s’arrêtant de se battre que pour poursuivre la construction de la route, la colonne française met trois mois et demi pour arriver au but.
    • L’objectif est Tananarive, quatre cents kilomètres au sud, dans la montagne.
    • Construisant la route et se battant, ne s’arrêtant de se battre que pour poursuivre la construction de la route, la colonne française met trois mois et demi pour arriver au but.

Fin juillet 1895, après un simulacre de combat, l’armée Hova abandonne la solide position d’Andriba, porte des Hauts Plateaux. La route y arrive le 26 août.

  • Le général décide de constituer une colonne légère de 4 000 hommes qui foncera à marche forcée sur Tananarive. Une fois encore la Légion est en tête. La colonne part le 14 septembre.
  • Le bataillon de la Légion, avec 19 officiers et 350 légionnaires, marche en tête de cette colonne ; il est mené par le capitaine Brundseaux et les lieutenants Martin et Tahon.
 

Le 20 août 1895, après 37 jours de progression insensée, la colonne principale atteint la région d’Andriba où les Hovas sont retranchés. La position est magnifique. Le mont d’Andriba, à 900 mètres d’altitude, s’érige au-dessus de la plaine comme un fort colossal, défendu à son pied par des batteries à tir rapide, à mi-hauteur par de l’infanterie dissimulée dans une brousse propice ; au sommet, deux pièces Hotchkiss commandant tout l’alentour. Le général Duchesne ordonne un repos de quelques heures et remet l’assaut au lendemain. Seule l’artillerie tonne et réduit au silence l’artillerie hova.

  • La reine a donné l’ordre aux défenseurs de tenir jusqu’à la mort.

Le 21 août, aux premières lueurs du jour, la colonne se remet en marche vers les retranchements d’Andriba, porte des Hauts Plateaux ; l’avant-garde les trouve vides. Tous les ouvrages de la position si bien armés ont été abandonnés par les défenseurs hovas après le simulacre de combats de la veille. Mais 200 kilomètres séparent la colonne de Tananarive tandis que la saison des pluies approche. Or la troupe est fatiguée. Les unités sont exsangues.

  • La Légion elle-même a perdu son commandant Barre. Le capitaine Rabaud l’a remplacé.

Expédition de 1895 - Carte de la prise d'Andriba - Journée du 21 août

Expédition de 1895 - Carte de la prise d'Andriba - Journées des 21 et 22 août

Le 23 août, à Mangasoavina, le général décide d’arrêter la construction de la route et de constituer une colonne légère de 4 000 hommes qui foncera à marche forcée sur Tananarive. Une fois encore la Légion est en tête. Les voitures Lefebvre sont abandonnées et les mulets sont chargés au minimum. La colonne comporte 237 officiers, 4 013 soldats et gradés, 1 515 convoyeurs auxiliaires, 266 chevaux, 2 809 mulets, 12 pièces de montagne avec 1 116 projectiles, 140 cartouches par homme et 22 jours de vivre. La colonne part le 14 septembre.

Le 26 août, la piste carrossable arrive à Andriba. Et les Français occupent la position forte sans tirer un seul coup de feu. L’ennemi véritable est la route de la mort.

Le 10 septembre 1895, la Légion reçoit d’Algérie un renfort conduit par le capitaine Brundseaux et 2 officiers et 147 hommes. La plupart des renforts nécessaires pour boucher les trous causés par la route, sont fournis par les formations et les services de l’arrière.

Le 14 septembre, la colonne se met en marche, suivant la piste malgache qui serpente au flanc des hauteurs rocheuses bordées de précipice. C’est la colonne ‘’Marche ou Crève’’.

  • Le bataillon de la Légion, avec 19 officiers et 330 légionnaires, marche en tête de cette colonne ; il est mené par le capitaine Brundseaux et les lieutenants Martin et Tahon.

Le 15 septembre, les légionnaires enlèvent le défilé de Tsinaïmondry.

Expédition de 1895 - Carte du combat de Tsinainondry - 15 septembre

Le 17 septembre, la colonne livre combat au col de Kiangara.

Le 19 septembre, un obstacle naturel barre la route de Tananarive : les monts Ambohimemas, culminant à 1 500 mètres. Les Hovas y ont construit 14 ouvrages. Ces forts sont simultanément, par les deux brigades de la colonne, tournés et attaqués de front. La manœuvre permet de les prendre à revers. Dès qu’ils se voient menacés d’encerclement, les Hovas abandonnent leurs canons et leurs fortins pleins de munitions et se sauvent à toutes jambes. La bataille est finie avant d’avoir réellement commencée. Et la marche en avant reprend.

  • Cette première victoire provoque une panique à Tananarive. Les habitants s’enfuient vers la campagne. La reine décide de rester. Le Premier ministre lève en hâte une nouvelle armée de 2 000 hommes en assurant la reine qu’elle est en mesure de s’opposer aux Français.

Expédition de 1895 - Carte du combat des Grands Ambohimena - 19 septembre

 

Expédition de 1895 - Carte des opérations de la colonne légère - 20 au 24 septembre

 

Expédition de 1895 - Carte des opérations de la colonne légère - 24 au 26 septembre

 

Expédition de 1895 - Carte des opérations de la colonne légère - 27 au 30 septembre

 

Le 28 septembre, après avoir fait opérer à sa colonne un vaste mouvement tournant pour attaquer la ville par le sud et par l’est, le général Duchesne lance six colonnes convergentes dont l’objectif est le palais de la reine. Les militaires français signalent des actions éparses, des velléités de résistance rencontrées ici et là. Les défenses, que les Hovas abandonnent comme d’habitude, sont successivement prises. Deux obus à la mélinite sont envoyés sur le palais royal et le grand pavillon Hova descend du sommet d’une des tourelles du palais et un drapeau blanc monte à sa place. L’objectif de la campagne est atteint.

  • Toujours à la peine depuis le départ, la Légion reçoit la mission d’occuper le palais royal. C’est un honneur. Le colonel Oudri et la 1re compagnie du bataillon de Légion s’installent dans les murs de Ranavalona III.

Le 30 septembre, les Français entrent à Tananarive. L’armée Hova qui avait juré de mourir sans se rendre, se volatilise sans combattre du tout. La campagne est terminée. 

  • Finalement, au premier coup de canon sur la capitale Antananarivo, la reine Ranavalona III fait hisser le drapeau blanc. Elle accepte le protectorat français avec toutes ses conséquences.
  • Sur un effectif total de 21 600 hommes, 7 ont été tués au combat, 13 sont morts des suites de leurs blessures, 5 736 sont morts pour ‘’des raisons diverses’’.
  • Les responsables de la colonne doivent organise le transport des malades de Tananarive vers Majunga et des cimetières aux côtés des hôpitaux.

Expédition de 1895 - Carte de la Prise de Tananarive - 30 septembre

 

Dernières Infos