La Tribune de Diégo Suarez

20160505 - Les premières années de Diego Suarez - 1903 : La fin d’une époque… Joffre s’en va

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A gauche : la statue de Joffre veille toujours sur le port de Diego Suarez.
A droite : Le Colonel Joffre et ses collaborateurs à Diego Suarez en 1901

 

L’année 1903 a surtout été marquée par le départ du Général Joffre qui laissera derrière lui une ville métamorphosée et un Point d’Appui… à terminer !

 
Le départ de Joffre

Arrivé à Diego Suarez en février 1900, le colonel Joffre, devenu entre temps général, et maintenu à son poste de Diego Suarez sur l’intervention du Général Gallieni, quitta le territoire qu’il dirigeait depuis trois ans, le 5 avril 1903, à 5 heures du soir, à bord du paquebot « Djemnah ». Son départ avait donné lieu à de nombreuses manifestations de la part de la population et des autorités. Il avait reçu, le 2 avril, des « délégations indigènes de toutes les parties du territoire », le 3 avril, le Cercle Français avait donné en son honneur une soirée dansante ; le 4 avril ce sont les fonctionnaires, l’Administrateur-Maire et la Chambre consultative qui étaient venus le remercier de « l’œuvre de développement économique qu’il a réalisée à Diego et qui a fait de cette ville une place commerciale et un port de première importance » (J.O de Madagascar)
Quant au Général Gallieni, qui avait choisi de le faire venir pour diriger les travaux du Point d’Appui de la flotte, et qui l’avait constamment soutenu, il rendit hommage à Joffre dans l’Ordre Général n°395 : « Le Général commandant en chef et Gouverneur Général tient à rappeler, par la voie de l’ordre, qu’au moment où le Général Joffre va prendre en France l’important commandement qui lui a été réservé depuis un an, il laisse à Madagascar une œuvre d’une importance capitale au point de vue militaire et maritime, qu’il a organisée à ses débuts, dont il a assuré le développement dans tous ses détails avec une invariable méthode et une constante énergie, et qu’il vient de conduire enfin à son achèvement définitif ».
Le général Joffre allait faire une belle carrière : nommé, à son retour en France directeur du génie au Ministère de la Guerre il devint, pendant la guerre, le « vainqueur de la Marne » resté célèbre dans la mémoire collective pour avoir réquisitionné les taxis parisiens pour amener les soldats au front. Devenu Maréchal de France et Académicien, il est cependant très controversé comme chef de guerre, notamment en raison de sa stratégie d’« offensive à outrance » qui fut extrêmement coûteuse en vies humaines. Mais il n’oublia jamais Diego Suarez, entretenant une correspondance avec plusieurs de ses habitants, notamment Alphonse Mortages ; et Diego le lui rendit en nommant « Joffreville » l’ancien Camp d’Ambre et en lui érigeant une statue face à ce port dont il avait conduit les premiers aménagements.
Il est certain que Joffre a grandement contribué à transformer la petite bourgade qu’était Diego à son arrivée. Aussi, Gallieni, dans l’ordre général 395, rend-il hommage à ses qualités d’administrateur : « Enfin, l’activité et les qualités administratives du général Joffre se sont exercées de la façon la plus profitable pour les intérêts de la région placée sous son commandement. Les grands travaux de la ville et du port, la construction de la route et du Decauville conduisant au Camp d’Ambre, enfin, le prolongement de cette voie par un excellent chemin muletier qui reliera bientôt Diego à l’intérieur de Madagascar, ont donné un vif essor à toutes les affaires de la région et assuré l’avenir commercial et maritime de notre grand port du Nord de l’Ile ».
En dehors du caractère obligé de cet hommage, que faut-il retenir de l’œuvre de Joffre à Diego Suarez ?

L’oeuvre de Joffre à Diego Suarez : ombres et lumières

Les grands travaux de la ville
Il n’est pas douteux que Joffre ait transformé le Territoire de Diego Suarez et la ville d’Antsirane. Son plan d’urbanisation a permis d’assainir la ville basse, de la relier à la ville haute. Dans celle-ci, de nouvelles voies ont été tracées, la rue Colbert a été prolongée et empierrée, le Camp malgache de la Place Kabary, un amoncellement de cases en falafa, a été transporté à Tanambao. Au niveau de l’urbanisme, la ville a été dotée d’égouts, d’une meilleure alimentation en eau, d’un hôpital, d’une prison etc. On peut dire que l’actuelle ville d’Antsiranana, du moins dans le centre, reste à peu près conforme à ce qu’avait voulu Joffre.
Peut-on pour autant considérer, comme la Revue de Madagascar le proclamait, qu’Antsirane était devenue « une ville avec des rues tracées au cordeau, de beaux immeubles, où le confort européen s’allie aux aménagements hygiéniques des habitations tropicales » ? Ce n’est pas l’avis de tout le monde à l’époque. Dans un livre intitulé Sous les Tropiques on trouve ce jugement féroce : « Des maisons en bois, quelques-unes en bambou, des cases malgaches, et quelques constructions inachevées en pierres. Mais c’est petit, cela tiendrait semble-t-il dans un mouchoir. » La Gazette agricole de 1903 reconnait toutefois le chemin parcouru : « Antsirane qui était presque désert il y a quatre ans, se transforme peu à peu en une ville qui, au fur et à mesure des ressources disponibles est dotée progressivement de toutes les commodités européennes : éclairage public, trottoirs, adduction d’eau, égouts ».
Bon, il faut tout de même reconnaître que ce résultat, acquis en trois ans est un exploit qu’il faut saluer, même si l’on peut déplorer, de nos jours encore, que la ville, construite dans une optique de défense maritime ait pratiquement tourné le dos à la mer ! Cependant, quand Gallieni affirme que l’action du général Joffre s’est exercée de la façon la plus profitable pour les intérêts de la région, l’affirmation est à prendre avec prudence.
La situation économique au départ de Joffre
En fait, Diego Suarez, contrairement aux assertions officielles n’est pas devenu un important centre commercial. En ce qui concerne l’agriculture, si beaucoup de cultures ont été tentées, bien peu ont réussi. Dans un rapport publié en 1903, l’agronome Deslandes remarque que l’agriculture, à Diego Suarez, souffre d’un nombre importants d’handicaps. Tout d’abord, si, dans l’ensemble, les terres sont relativement fertiles, il faut compter avec le climat, notamment avec les vents violents et la sécheresse qui sévit une partie de l’année, ce qui oblige à installer les exploitations au voisinage des cours d’eau. Par ailleurs, Deslandes évoque pudiquement les insuffisances d’un grand nombre de colons qui, plutôt que de choisir des terrains propres à la culture (assez haut sur les pentes de la montagne d’Ambre) ont préféré des emplacements plus agréables à habiter. « Le colon paraît s’être surtout attaché à établir son exploitation en lieu sain et bien aéré et semble ne s’être préoccupé qu’en seconde ligne de savoir si les terrains qu’il avait en vue convenaient ou non aux cultures qu’il devait entreprendre. » De plus, d’après Deslandes, les colons manquent de compétences sur le plan agricole : « la plupart des planteurs de la montagne d ‘Ambre […] étaient presque tous étrangers aux questions agricoles quand ils sont arrivés à Madagascar ». Dans ces conditions, et alors que presque toutes les cultures ont été tentées, les résultats restent gravement insuffisants. D’autant plus que se pose la question de la rareté et de la cherté de la main d’oeuvre : « Il est très difficile à un planteur d’obtenir des résultats pécuniaires satisfaisants à Diego Suarez par suite de la difficulté du recrutement des ouvriers et du taux élevé des salaires ». Il en résulte des pratiques que Deslandes dénonce : « Sous peine de se heurter, par la suite, à de grandes difficultés de recrutement, le paiement des salaires devrait être très régulier et l’observation de toutes les promesses faites absolument rigoureuses ». Nous avons vu, dans l’article précédent que certains faits de criminalité avaient eu pour cause ce manque de justice de certains colons.
Le commerce se porte mieux mais il dépend étroitement de la présence militaire ; aussi les débits de boisson tiennent une place prépondérante parmi les magasins antsiranais. Et cette dépendance à l’égard d’une clientèle particulière se marque également dans le mouvement commercial du port où les importations sont très supérieures aux exportations.
Enfin, l’industrie en est encore à ses balbutiements. Elle se résume à peu près aux exploitations de chaux de la route de Ramena et aux usines d’Antongombato qui ont à peu près abandonné la fabrication pour se livrer à l’exploitation forestière et agricole des milliers d’hectares que possèdent la Société-Franco- Antankarana et la Compagnie coloniale française d’élevage et d’alimentation.
Quant aux Salines…Les choses ne vont pas très bien non plus. Le 5 novembre 1903 a lieu à Paris la vente « sur folle enchère » « Au plus offrant et dernier enchérisseur » de l’Etablissement des Salines de Diego Suarez, sis à Anamakia et de la concession accordée par le Gouvernement de Diego Suarez d’une contenance totale de 516 hectares 23 ares. Les Salines de Diego Suarez sont vendues avec tout le matériel d’exploitation, les maisons du personnel et une voie Decauville avec wagons de 700m environ. La mise à prix est de 10 000 francs (environ 40 000 euros).
Sur le plan économique le développement de Diego Suarez, sous le commandement du général Joffre est donc largement subordonné à la présence et aux travaux militaires, qui drainent la main d’œuvre et fournissent l’essentiel de la clientèle des commerces. Aussi, même si quelques uns s’inquiètent de « l’après-Joffre », la plupart des européens sont satisfaits de l’action du général et lui vouent une totale admiration.
Ce qui n’est pas toujours le cas chez les « indigènes ».

Le climat social sous le commandement de Joffre

Les relations entre la population civile et les militaires ne sont pas toujours parfaitement sereines. En témoigne l’incident qui se produit le 4 janvier 1904 entre tirailleurs sénégalais et habitants de Tanambao : « Des tirailleurs sénégalais ayant trouvé dans la brousse le cadavre d’un de leurs compatriotes se sont rendus en nombre au Tanambao et supposant que les indigènes étaient les auteurs de cet assassinat, ils en ont tué trois et blessé une dizaine… Les femmes terrorisées ont fui, se réfugiant à Antinabe ». (Revue de Madagascar). Il fut donc décidé de déplacer le camp des tirailleurs à Diego Suarez et de leur retirer leurs armes. Par ailleurs, si la pénurie induit des salaires relativement élevés (par rapport aux autres régions de l’île) pour la main d’œuvre (entre 150 et 175 euros par mois, plus la ration de riz), nous avons vu que certains patrons « oubliaient » de payer leurs employés. La Feuille de renseignements économiques fait état des réclamations des employeurs devant les exigences de leurs employés : « Le nombre des indigènes engagés au 1er janvier dernier au service des colons, industriels ou services publics, s’élevait au chiffre de 1800. Les prétentions exagérées de la main d’œuvre somali employée au service des transports a soulevé une discussion parmi les membres de la Chambre consultative [...] Les Arabes arrivent à demander jusqu’à 6 et 7 francs par jour (environ 25 euros ou 85 000 ariary)… » Les revendications des Somalis vont même parvenir à Paris. Le journal socialiste L’Humanité, évoque le 31 janvier 1904 la pétition des somalis que l’on veut assujettir à la taxe par tête de 20 F que payent tous les « indigènes ». Arguant du fait qu’ils ont servi dans l’Armée française ils refusent de payer cette taxe car ils vivent misérablement (ils sont chargés du batelage du port) et demandent à être rapatriés chez eux.

 

Les conditions de travail des dockers à Diego Suarez en 1903 n’étaient pas des plus confortables...

 

Comme on le voit si Joffre, à son départ, laisse indiscutablement une ville transformée, en voie de se moderniser, tout n’est pas au beau fixe dans le Territoire de Diego Suarez. En fait, Joffre avait été nommé pour mettre en place le Point d’Appui de la flotte de l’Océan Indien : il a vraisemblablement porté l’essentiel de ses efforts sur ce qui constituait le centre de sa mission, les travaux militaires et regardé d’un œil plus distrait les problèmes de la population civile…
■ Suzanne Reutt

20120405 - L'Arsenal de Diego Suarez : de la Direction de l'Artillerie à la SECREN

Jeudi, 05 Avril 2012

le Vaucluse, aviso de transport de 1 600 tonneaux est le
premier navire à entrer dans la forme de radoub le 17 mars 1916

Pendant longtemps, la rade de Diego Suarez resta relativement en dehors des routes maritimes en raison de la barrière que constituait le Cap d'Ambre « fascheux à passer », comme on l'avait écrit dès le XVIème siècle. Cependant, dès la seconde partie du XIXème siècle, la France commence à se préoccuper de la nécessité de se doter de bases navales susceptibles d'assurer sa présence dans les mers lointaines. Ceci pour des raisons coloniales et pour des raisons stratégiques.

Les progrès techniques font de ce souci une nécessité: en effet, avec l'invention de la propulsion à vapeur, les navires deviennent tributaires du ravitaillement en charbon, leurs soutes ne pouvant contenir les énormes quantités de combustible nécessaires. Sous le Second Empire sont alors créés, à Sainte-Marie, à Nosy Be et à Mayotte de petits dépôts de charbon.
A cette nécessité s'ajoute, vers la fin du XIXème siècle la rivalité avec l'Angleterre dans la perspective de la conquête coloniale. En 1885, Jules Ferry s'écrie, devant la Chambre des Députés: « dites-moi si ces étapes de l'Indochine, de Madagascar, de la Tunisie, ne sont pas des étapes nécessaires pour la sécurité de notre navigation? »
Aussi, dès que le Territoire de Diego Suarez est cédé à la France, en 1885, l'idée d'y créer un arsenal s'impose immédiatement. Le médecin du navire La Dordogne, sur laquelle se trouvent les premières troupes d'occupation écrit, en 1886 : « Des magasins, des ateliers de réparation, un petit arsenal en un mot, doivent y être établis, assurant le ravitaillement et l'entretien de nos navires de la mer des Indes ».
Il faudra cependant attendre presque 20 ans pour que Diego Suarez, promue au rang de « Point d'Appui de la Flotte de l'Océan Indien » devienne une véritable base navale.

Diego Suarez, Point d'Appui de la Flotte

Dans le dernier quart du XIXème siècle la question de doter les colonies d'une organisation défensive revenait régulièrement. Le Conseil d'Amirauté français propose dix bases d'opérations. Parmi celles-ci, Diego Suarez est considéré comme une excellente base d'opérations en cas de fermeture du Canal de Suez, d'autant plus qu'elle dispose d'une magnifique rade, qu'il faudrait cependant mettre en position de défense.
Cependant, les crédits ne seront votés qu'en 1901.
Le décret du 3 juin 1902 relatif aux points d'appui de la flotte, ne mentionne plus que cinq places (qui seront ensuite réduites à quatre) dont Diego Suarez « qui deviendrait la base d'opérations, en temps de guerre, de la seconde division de l'escadre de guerre » 20,5 millions (sur 75) furent affectés à Diego Suarez pour la mise en état du Point d'Appui de Diego Suarez qui fut confiée au Colonel (puis Général) Joffre.

Le bassin de radoub

Pièce essentielle de l'arsenal de Diego Suarez, il est créé en exécution de la loi du 2 mars 1901 décidant la création de Points d'Appui de la Flotte dans les colonies.

Remplissage du bassin de radoub

Le choix de l'emplacement

Plusieurs emplacements furent successivement examinés:

- Cap Diego : d'abord considéré comme l'emplacement le plus convenable, cette option fut abandonnée en raison des alizés qui, pendant une grande partie de l'année, rendraient périlleuse l'accès à la forme. De plus, l'arsenal serait alors isolé de la vie économique d'Antsirane, et notamment du trafic des navires de commerce ainsi que des possibilités d'approvisionnement à partir de l'intérieur.

Cette solution fut donc écartée.

- Orangea : Ce choix, qui avait les mêmes inconvénients d'éloignement d'Antsirane, avait également celui d'offrir un mouillage moins sûr : très exposé au vent en période de mousson, le site offrait des fonds vaseux et d'une profondeur insuffisante ce qui aurait occasionné des travaux très onéreux.

- le cirque d'Antsirane : Le choix se porta alors définitivement sur l'emplacement actuel du port de commerce: protégé par le plateau, offrant un mouillage sûr et un accès facile à la ville, il semblait présenter toutes les qualités. Le bassin aurait été construit sur l'axe de la rue de la République (rue principale de la ville basse, perpendiculaire au port, à l'emplacement approximatif de PFOI).

Cependant, une fois encore, des difficultés surgirent: de mauvaises conditions d'exposition aux vents et - surtout- l'expropriation obligatoire de presque tous les bâtiments de ce qui constituait alors la ville basse: docks, ateliers, bureaux, magasins.

-Baie des Amis : On se reporta alors sur un emplacement précédemment écarté parce que trop malsain : le fond de la baie.

On constata qu'une fois l'assainissement effectué, ce site avait de grands avantages: sûreté du mouillage, accès facile à la ville, possibilités d'installations sur le haut du plateau.

Il fut donc décidé que là serait installé l'Arsenal avec son bassin, ses ateliers, ses magasins et ses bureaux.

La construction

Le caisson métallique utilisé pour la construction du bassin de radoub

Elle fut d'abord envisagée à une assez grande distance du rivage Est de la baie mais il fallut y renoncer en raison de la qualité des sols qui aurait obligé à établir des fondations d'une très grande épaisseur.

Le Ministère ayant refusé d'approuver le projet, le tracé définitif adopta une direction de 30°NO; par ailleurs, on rapprocha la forme de la côte de façon à rencontrer un sol résistant à 15m de profondeur: parallèle à la rive Est de la baie des Amis, elle en est distante de 50m. Si cette option entraina des travaux de renforcement du plateau, ceux-ci s'avérèrent assez peu onéreux;

La construction de l'ouvrage fut confiée le 25 mars 1905, après concours, à l'Entreprise parisienne Fougerolle frères.

Les entrepreneurs opérèrent une fouille rectangulaire de 45 m de largeur et de 209,60 m de longueur, dont le fond serait arasé à la cote moins 15m. L'angle N.O de cette fouille fut consolidé par des blocages, des piliers et des voutes de soutènement destinés à supporter la pression de l'eau de mer lors des plus hautes marées.

A proximité de la fouille, on construisit un caisson métallique rectangulaire de 209 m sur 41 m, muni de patins métalliques, qui fut amené par flottage à son emplacement définitif. Puis, les maçonneries furent édifiées à l'intérieur du caisson. Au fur et à mesure de l'enfoncement, tout le tour du bassin fut surélevé pour éviter à l'eau de l'envahir jusqu'au moment où le bassin ait atteint la profondeur de quinze mètres.

Dans cette enceinte étanche, on acheva le mur du fond et l'écluse d'entrée au nord pour achever la construction. Puis, par des cheminées on insuffla à l'air comprimé du ciment à prise rapide dans les vides laissés par les patins entre le dessous du caisson et le fond de la fouille.

Dans l'ensemble, les résultats furent satisfaisants malgré quelques infiltrations que l'on fit disparaître par des injections de ciment sous pression.

Les résultats

Le bassin devait avoir une longueur réelle de 200 m. Cependant, l'étude du projet fut revue pour le porter à 250 m. L'entrée est formée par un bateau-porte qui est un écran étanche amovible. Il est amené dans l'écluse et échoué avant l'assèchement de la forme; il est relevé après le remplissage de la forme, par l'enlèvement du lest en eau qui a servi à le couler.

L'ouvrage est entouré de 2 terre-pleins de 250 m de longueur. Les bureaux furent installés dans l'ancienne Direction de l'Artillerie.

Les essais eurent lieu le 17 mars 1916 par la rentrée dans la forme de radoub du « Vaucluse », aviso de transport de 1 600 tonneaux.

Carrière de pierres pour le bassin de radoub (Montagne des Français - 1907)

 

 

L'évolution de l'arsenal

La SCAB

Du fait des retards apportés à sa construction (notamment un allongement de la longueur du bassin), l'arsenal ne fut pas utilisé pendant la première guerre. D'ailleurs, l'importance de Diego Suarez en tant que point d'appui avait été revue à la baisse. D'après un rapport confidentiel de 1904, l'arsenal « est, en effet, trop éloigné du grand fleuve commercial (qui, sortant de la mer rouge, coule vers les Indes et l'Extrême-Orient) pour que nos bâtiments de guerre puissent y trouver un point de relâche ordinaire, et un lieu de ravitaillement constant... ».

Par mesure d'économie la Marine française céda son exploitation à la colonie. La SCAB (Société des Chantiers et Ateliers du Bassin) fut chargée de gérer l'arsenal en 1917.Mais malgré les possibilités du bassin d'accueillir des carénages de navires importants, Diego Suarez n'offrait que des moyens restreints de ravitaillement.

L'arsenal ne bénéficia pas, dès lors, du programme de grands travaux de modernisation qui fut décidé à Paris.

1942

Lors de l'attaque des forces anglaises sur Diego Suarez, en mai 1942, les portes du bassin de radoub sont détruites: accident, sabordage de la part des français?

Quoi qu'il en soit, maîtres de Diego Suarez, les anglais assureront la gestion de l'arsenal jusqu'en 1945, époque à laquelle ils remettront la base à la France.

Entre 1943 et 1945, 35 BATRAL (Bâtiments de transport légers mesurant 53,46m)seront construits; ils étaient destinés au ravitaillement et au soutien des troupes débarquées en zones dénuées d'infrastructures portuaires.

La DCAN

La Direction des Constructions et Armes Navales (DCAN) va remplacer la SCAB sous la direction de l'Ingénieur en chef du Génie Maritime, Gilles. Le développement de la base est alors conçu pour lui permettre de soutenir l'escadre d'Extrême-Orient, engagée en Indochine.

Dès 1945, les effectifs sont renforcés. 9 ateliers sont construits. La plupart des constructions seront achevées en 1951. Mais l'arsenal devient insuffisant pour l'assistance aux bâtiments modernes sophistiqués, bourrés d'électronique.

L'arsenal, dont les effectifs ont chuté ( de 1650 à 600 entre 1946 et 1951) doit envisager une reconversion vers le secteur civil. Cette diversification des activités va permettre une relance qui se traduit par l'accroissement des effectifs vers 1970. Les chantiers bénéficient en particulier de la fermeture du Canal de Suez qui va amener à Diego Suarez les gros pétroliers passant par le Cap de Bonne Espérance.

Lors des évènements de 1972, les accords de coopération entre la France et Madagascar sont dénoncés. Les activités de la DCAN doivent cesser au 4 juin 1975. Le 1er septembre 1973 la base passe sous commandement malgache. Le 31 janvier 1975 le remplacement de la DCAN par la SECREN (Société d'Etudes et de Constructions et Réparations Navales) est effectif. A cette date, la DCAN laisse la place à la SECREN où 70 coopérants français assureront la transition.

■ S.Reutt - Ass.Ambre

20120127 - Mahatsinjoarivo : la sentinelle oubliée

Vendredi, 27 Janvier 2012

Du fortin de Mahatsinjarivo, perché sur le plateau au dessus de l'aéroport d'Arrachart, il ne reste quasiment plus rien qu'un bosquet d'arbres visible de toute la région, se détachant sur la ligne du plateau, et quelques pans de mur qui disparaissent peu à peu. Cette petite bâtisse oubliée a pourtant constitué le « point d'appui principal de la colonie » à la fin du XIXe siecle, qui défendait le jeune établissement de Diego Suarez contre les menaces venues du sud.

Dès le mois de juillet 1885, le Commandant Particulier Caillet établit une solide redoute au sommet du plateau de Mahatsinjoarivo à une altitude de 215 mètres sur le versant nord de la Montagne d'Ambre, à 15 kilomètres environ au sud de la baie et à 6 kilomètres au nord-ouest du Fort d'Ambohimarina.

Ce poste qui se trouvait à mi-chemin du Canal du Mozambique et de l'entrée de la Baie, devait par la suite jouer un rôle important pour la politique de pénétration entreprise par les autorités de Diego Suarez. Mais il fallut attendre l'inspection générale effectuée en 1887 par le Général Borgnis-Desbordes pour qu'un plan définitif du dispositif de défense de Diego Suarez soit décidé par le département.

Le poste de Mahatsinjoarivo, considéré comme une position stratégique de premier ordre fut choisi comme « point d'appui principal de la colonie ». Ce choix était surtout motivé par sa situation sur une hauteur qui domine les plaines du sud de la Baie et par le rôle stratégique qu'il pouvait être appelé à jouer dans une guerre contre les Merina.
Par un décret en date du 8 février 1888, il a été décidé que le poste de Mahatsinjoarivo devait être organisé pour entretenir une garnison de trois cent soldats composée de deux compagnies de "disciplinaires" (cent hommes par compagnie) et d'une compagnie de tirailleurs indigènes (cent hommes). Trente sept hommes de cadre européen dont quatre officiers et huit sous officiers furent chargés de l'encadrement de cette garnison. On y affecta aussi cinq gendarmes à cheval chargés de faire la liaison avec le quartier général d'Antsiranana et les autres postes de la ligne de défense sud.
Cependant, le Général Borgnis- Desbordes avait trouvé le fort de Mahatsinjoarivo peu opérationnel : placé trop près de la Montagne d'Ambre, il ne permettait pas de surveiller suffisamment la vaste plaine de la Betahitra où le passage d'une colonne ennemie venue du Fort Merina d'Ambohimarina serait passée inaperçue. C'est pourquoi, dès octobre 1887, un nouveau fort fut créé au Point 6.
Mais, en dépit de la volonté affirmée par les administrateurs, les travaux et l'armement de la garnison furent ralentis par le manque de moyens mis à disposition par l'administration. En juin 1892, le botaniste Kergovatz écrivait : « Le fort de Mahatsinzo(sic) n'est encore qu'une longue caserne défensive en pierre, entourée d'une forte palissade. Les courtines et les bastions sont tracés, mais on n'a pu encore commencer les terrassements. On attend que le camp des tirailleurs de Diégo-Suarez, qui, pour le moment, est établi autour de la caserne, ait été transporté aux environs immédiats d'Antsirane. Le capitaine Lamiable, commandant des tirailleurs, voulut bien me faire visiter le camp et m'expliquer par quelles vicissitudes a passé ce malheureux corps indigène. Formé pendant la guerre de Madagascar sous le nom de tirailleurs sakalaves, il rendit les plus grands services et se distingua sous le commandant Pennequin au combat d'Andampy, le 27 août 1885, où soixante tirailleurs, non seulement protégèrent la retraite d'un peloton d'infanterie de marine tombé dans une embuscade, mais encore, immobiles à leur poste, autour du commandant blessé, attendirent sans broncher la charge furieuse de quinze cents Hovas, ne firent feu qu'au commandement et finalement mirent l'ennemi en complète déroute. C'est grâce à l'énergie, au dévouement, à l'ingéniosité des capitaines qui se sont succédés à la tête de la compagnie, grâce aussi au concours tout patriotique du service local, qui employa ses premières ressources à donner un uniforme aux tirailleurs, que l'on a pu attendre le décret récent organisant deux compagnies de tirailleurs de Diégo-Suarez, en attendant le bataillon complet. Ils ont fort bon air, ces tirailleurs, sous leur uniforme provisoire; chéchia, blouse bleue à parements et pattes rouges et pantalons blancs. Les compagnies comptent déjà 200 hommes qui manoeuvrent comme de vieux troupiers. »

Dans la nuit du 23 au 24 décembre 1894, pendant la montée des tensions qui aboutirent au conflit franco-merina de 1895/96, plusieurs soldats Merina encerclèrent le poste de Mahatsinjoarivo, ils essayèrent d'organiser une attaque, mais ils furent rapidement repoussés.

En 1900, quand Diego Suarez fut déclarée « Point d'appui de la Flotte », la ligne de défense du Front de Terre fut déplacé un peu plus au sud de la ligne établie en 1887 par le Général Desbordes ; le poste de Mahatsinjoarivo fut déplacé à Sakaramy à 6 km plus au sud, formant ainsi une ligne qui va d'Orangea-sud à l'est en passant par Ambohimarina, Sakaramy, Montagne d'Ambre et la Baie du Courrier à l'ouest.
 

20111029 - Orangea, Oronjia...le nez de sable...

Samedi, 29 Octobre 2011

Orangea, promesse de salut et cadeau de bienvenue pour les intrépides navigateurs qui ont osé affronter le Cap d’Ambre, ses courants et ses tempêtes. Et, sitôt franchie la Passe, cette longue plage de sable blanc ...

Orangea a toujours fait rêver.

Elle a surtout, très tôt, fait rêver ceux qui souhaitaient faire de la baie de Diego Suarez la place forte de l’Océan Indien.
Quelle position pour défendre l’entrée de cette immense baie qui n’ouvre sur l’extérieur que par un goulet de moins d’un km de large...

Dès 1886, le Dr Bonain, médecin-major de « la Dordogne »( le bateau sur lequel se trouve le premier commandant militaire de la nouvelle colonie de Diego Suarez ), s’extasie sur la beauté du lieu: « En entrant dans la baie, on voit sur la gauche le port des boutres et le lieu-dit Orangea ou village des Antalotches, remarquable par sa belle plage et sa végétation abondante; c’est certes un des sites les plus agréables de la baie de Diego Suarez.»

Moins romantiques, d’autres voient immédiatement en cet emplacement les possibilités qu’il offre pour la défense de la baie: « La défense de la baie n’est pas difficile...Des batteries rasantes à...la pointe d’Orangea, dans les baies intérieures, et un chapelet de torpilles immergées entre l’ilot et la pointe y suffiront »
(J.Xior).

Dès les débuts de la présence française à Diego Suarez les deux vocations d’Orangea -touristique et militaire - sont donc envisagées.

Le site au moment de l’installation française à Diego Suarez

Il abrite déjà le « port aux boutres »ou «port des Antalaotra »ou encore « port des arabes».

Les Antalaotra « gens de la mer » sont, pour la plupart des commerçants islamisés, venus souvent de Zanzibar ou de Mayotte et parlant un dialecte swahili. Faisant du commerce dans le Nord de Madagascar, ils fournissent les populations en biens de toutes sortes: armes, produits manufacturés, et parfois...esclaves.

Leurs boutres, construits à Oman, à Mascate, en Inde ou à Nosy-Be font du cabotage le long des côtes malgaches. Dans la seconde partie du XIXème siècle, ces derniers battront souvent pavillon français, Nosy-Be étant colonie française.

Le Port des Boutres se trouve devant le village d’Orangea (actuel village de Ramena) composé à l’époque, selon la Revue de Géographie de 1988 « de quelques misérables cases indigènes »

 

Les installations militaires

La défense de la passe:
L’étendue de la baie et l’étroitesse de la passe comprise entre la presqu’île d’Orangea et la petite île de Nosy Volana (ilot de la lune) ont été pour beaucoup dans l’intérêt des puissances coloniales pour Diego Suarez.

Aussi, dès les débuts de l’installation française dans le territoire, l’armée se mit en demeure de rendre la passe infranchissable à d’éventuels vaisseaux ennemis.

Le naturaliste Kergovatz qui visita Diego Suarez en 1892, décrit ainsi l’arrivée dans la baie: « Notre bâtiment longe la côte sud du canal, où les rochers couverts d’une végétation rabougrie et malmenée par le vent du large sont déjà surmontés de longs parapets, de traverses larges comme des collines, sur lesquels s’agite une armée de travailleurs. Ce sont les batteries qui doivent achever de rendre imprenable l’arsenal de la France dans l’Océan Indien.

Sur l’île de la Lune, au pied d’une colonne noire et blanche qui sert d’amer pour l’atterrissage, on commence déjà à élever d’autres batteries. Elles pourront tirer presque à bout portant sur le bâtiment qui aurait bravé leur feu pendant le long détour qu’il faut faire pour ne pas se jeter sur le récif...»

Cependant, ces travaux effectués dans l’urgence, furent rapidement jugés insuffisants, les batteries de canons étant de trop faible portée pour inquiéter d’éventuels agresseurs.

En 1894 les défenses d’Orangea furent renforcées. Le colonel de marine Piel s’occupa de couvrir par des feux convergents la ligne que devaient suivre les navires. Des batteries plus modernes remplacèrent les anciennes pièces de la batterie d’Orangea .

De nouveaux travaux confortèrent la position d’Orangea après la conquête de l’Ile en 1895.
Il fallut pourtant attendre 1900 pour que, sous le commandement énergique de Joffre, Orangea soit équipé d’une série de batteries assurant une réelle défense du front de mer.

Cependant, dès 1904, la Revue « Armée et Marine » déplorait la vétusté et l’insuffisance des batteries de côte censées défendre la passe: « aux canons de 194, modèle 1893, prévus pour la batterie de Vatomainty et la batterie est d’Orangea, on a substitué des canons modèle 75-76; aux canons de 240, du modèle le plus récent, qui devaient armer la batterie du Cap Miné, on a substitué des canons modèle 70-81 sur affûts de casemate.

On a utilisé un matériel que la Guerre avait fait construire en grande quantité et que sa médiocrité a fait proscrire des batteries de côte de la métropole »
(Armée et Marine - 9 juin 1904)

En fait, c’est en grande partie en raison de cette « vétusté » que Diego Suarez a pu garder ses canons: en effet, ils échappèrent ainsi au « rapatriement »des canons coloniaux au moment de la Grande Guerre!
Ironie du sort, les canons de la passe, qui devaient fermer la baie à toute intrusion ennemie furent impuissants à arrêter les anglais lors de l’attaque de 1942 !

En dehors de la mise en place des batteries, Orangea fut doté de moyens de transmission. Un sémaphore qui permettait de signaler les navires entrant en rade fut installé. Par ailleurs, pour aider les navires à entrer dans la passe, on construisit, au Cap Miné un phare constitué d’une tourelle métallique de 6m de hauteur, reposant sur un socle en maçonnerie de 3m de haut. Son feu blanc s’éclairait toutes les 10 secondes.

Enfin, il fallut penser à héberger les troupes stationnées à Orangea. Les premiers bâtiments construits sur la plage furent remplacés par les fameuses cases Maillard que l’on peut encore voir dans le quartier militaire . Celles-ci furent fortement endommagées par le cyclone de 1905.
On construisit également l’élégante infirmerie à arcades que nous voyons encore (pour combien de temps?) et qu’il fut question de détruire en 1927.

Orangea, site touristique

 

Si Orangea fut très tôt investi par les militaires, le site fut également apprécié par les premiers visiteurs. Nous avons vu plus haut que, dès 1886, le médecin des troupes d’occupation s’extasiait sur « sa belle plage de sable blanc et sa végétation abondante ».

Mais Orangea a d’autres charmes. En 1903, le géographe Lemoyne visite une grotte que lui a signalée un militaire: il s’agit de la « grotte aux pintades »: « Elle a environ 500m de longueur et communique en son milieu avec l’extérieur par des puits d’environ 20m de profondeur régulièrement cylindriques ».

Cependant , les habitants de Diego Suarez fréquentent peu Orangea en raison des difficultés d’accès. En effet, pendant longtemps, la route d’Orangea reste « une route militaire non empierrée ». Pour se rendre à Orangea, il faut donc prendre une chaloupe et s’attendre parfois à une traversée mouvementée...
Il faudra attendre 1935 pour que la route devienne « automobilable » (suivant le jargon de l’époque) et que la plage devienne un lieu d’excursion fréquenté.

L’attrait touristique du site fut d’ailleurs très tôt mis en avant. Dès le début du siècle l’Annuaire du Gouvernement de Madagascar, signale qu’Orangea est un but d’excursion intéressant: on peut y manger chez un certain M.Jacquet et visiter les grottes : « A Orangea se trouvent des grottes curieuses qu’il est facile de visiter, à condition de s’assurer un moyen de retour, soit par mer, soit par terre. La chaloupe desservant Orangea ne s’arrête que 10 minutes dans cette localité et rentre de suite à Diego Suarez ». Gare à celui qui raterait le départ!

On notera qu’il n’est pas question de la plage, les bains de mer n’ayant pas encore l’attrait qu’ils ont actuellement. Mais les choses changent après 1925. Dans la Gazette du Nord de février 1927, on déplore que la route ne soit pas encore terminée ce qui donnerait de la valeur à Orangea: Et l’auteur ajoute: « Orangea devrait être une station balnéaire très fréquentée. Son sable fin lui attirerait une nombreuse clientèle... ». L’article déplore également le projet de détruire l’infirmerie, beau bâtiment tout en pierre dont on pourrait faire «un hôtel vaste, aéré, magnifiquement situé. »Et il termine par la phrase suivante: « Actuellement, tous les éléments semblent réunis pour faire d’Orangea un coin fréquenté par tout Diego Suarez et par les étrangers qui nous visitent... Qu’on y réfléchisse en haut lieu.»

1927...Que dire de plus?
■ S.Reut - As. Ambre.

Le phare du Cap Miné

 

Le phare du Cap Miné est construit à partir de 1895. Simple tourelle métallique posée sur un socle en béton carré, le phare est ensuite reconstruit et doté d’une tour octogonale en maçonnerie de 14 m de hauteur. La lumière est donnée par un mécanisme Sautter-Harlé qui assure la rotation de la lentille et donne un feu à trois éclats séparés de 15s sur un plan focal de 47m. Le phare a fait l’objet d’une rénovation complète en 2009 et est désormais alimenter par des panneaux solaires. Un gardien vit avec sa famille dans le bâtiment attenant au phare. Il accepte volontiers de faire la visite contre une petite gratification.

20111018 - La batterie de la Côte 84, un trésor historique en péril

Mardi, 18 Octobre 2011

1- Canon de 164 cm Mle 1893-96 dans la cuve n° 3

2- Poste de tir et sa coupole blindée

3- Intérieur de la coupole du télémètre.

Cette batterie, encore équipée de ses quatre canons très spectaculaires, est selon les experts le plus bel exemple encore existant dans le monde de ce type d’installations. Alors que ce patrimoine devrait être un point focal des politiques de développement culturel et touristique, il fait l’objet d’un pillage sans merci dans l’indifférence générale.

 

Entre 1938 et 1942, on se décide enfin à moderniser la défense du front de mer, dont l'équipement remontait au début du siècle au moment où Diego Suarez avait été déclaré point d'appui de la Flotte.
Sont ainsi réalisées plusieurs batteries dont une batterie de quatre pièces de 164 cm Mle 1893-96 sur affût C Mle 23 qui ont été récupérées sur le croiseur Jules Ferry, et installées dans la presqu'île d'Orangéa, au lieu dit « le Point de Vue », à la côte 84, le long de la crête dominant les baies des Dunes et des Pigeons. Cette crête culmine à 84 m, d'où le nom de la batterie, aussi connue comme Batterie du point de vue ou Bellevue.

Les canons de 164 cm du croiseur Jules Ferry en 1914.


Ce croiseur de 12 550 t lancé en 1903 est désarmé en 1927 et vendu à la ferraille en 1928. Quatre de ses canons de 164 cm sont envoyés à Diego Suarez pour équiper la batterie du Point de Vue.

Canon n°1 en 2006 toujours revêtu de son blindage

C'est une batterie moderne, dotée d'un système de visée constitué d'un conjugateur de tir de type « Colonies », d'un télémètre à coïncidence de 5 mètres O.P.L 3, et d'un projecteur électrique de 150cm G.P.Sauter-Harié pour le tir nocturne. Les pièces ont une portée de 19 kilomètres et délivrent à une cadence de tir de trois coups à la minute des obus de rupture coiffés pesant 54,9 kilos chacun. La batterie est servie par le groupe d’Artillerie coloniale de Diego Suarez. C’est une batterie d’artillerie secondaire (de deuxième ligne).

Les pièces sont installées dans des cuves de 8 mètres de diamètre, encadrées de niches à munitions bétonnées. Ces niches sont ravitaillées, à partir d’un magasin souterrain, via un monte-charge et une galerie de desserte parcourue par une voie de 60.

Un casernement, tout en longueur, communique avec la galerie de desserte, par un escalier à 2 volées de marches.
Le Poste de Tir est situé entre les pièces 3 et 4. Un abri principal présentant une embrasure d'observation semi-circulaire supporte la coupole du télémètre. Un second abri plus petit flanque le premier. Une peinture représentant le paysage de la côte depuis la passe est encore visible dans l'abri du télémètre. Elle donne une idée de la vue qu'on avait depuis cet endroit avant que la végétation n'y ait repris ses droits.
Plusieurs casernements sont accolés en contrebas. Le magasin souterrain est constitué d'un ensemble de salles reliées par une galerie avec au sol une voie de 60 qui mène au puits du monte charge. L'aération est assurée par des cheminées dont les ouvertures sont visibles non loin du poste de tir.

Quoi qu’ envahie par la végétation tropicale, cette batterie possède encore, spectacle rare, ses quatre canons, encore très présentables. Elle est le plus bel exemple, encore existant, d’une batterie française d’artillerie secondaire.

Au sud de la cuve n°1, un abri bétonné recevait le générateur et servait d'abri de jour pour le projecteur. Une voie de 60 permettait de déplacer rapidement le projecteur vers son abri opérationnel, à une cinquantaine de mètres de là.
La batterie était gardée par deux petits postes de garde bétonnés situés au nord-ouest et au sud-est du dispositif. A quelques dizaines de mètres du poste nord, une plate-forme d'observation était aménagée au bord de la ligne de relief. On a toujours depuis cet endroit un point de vue exceptionnel sur les abords de la passe qui marque l'entrée de la baie de Diego Suarez.

Jean-Jacques Moulins, expert historique militaire, dans son ouvrage L'index de la fortification Française, dit de la batterie de la Côte 84 que « Quoiqu’ envahie par la végétation tropicale, cette batterie possède encore, spectacle rare, ses quatre canons, encore très présentables. Elle est le plus bel exemple, encore existant, d’une batterie française d’artillerie secondaire ».

Fresque représentant la vue depuis le poste de tir. On reconnait à gauche la Passe, au loin la Mer d’Emeraude, et à droite les baies de Dunes et des Pigeons séparées par le petit îlot.

1942 : Iron Clad

Le 5 mai 1942 à 8 h 10, la batterie du Point de Vue signale un croiseur se dirigeant vers la passe. Il s'agit de L' Hermione, avec laquelle la batterie de 164 engage un duel dès que l' objectif est à moins de dix-neuf kilomètres. Celui-ci s'éloigne et est bientôt remplacé par le Devonshire, dont les canons de 203 ont une portée supérieure, ce qui lui permet de maintenir la batterie sous son feu, sans être lui-même menacé. Mais son tir reste sans grands effets et ce sont les servants eux mêmes de la batterie qui la rendront inutilisable avant de se rendre quand le reste de la garnison aura succombé.
Le 7 mai à 16h, le Ramilies, l' Hermione et le Lightning, précédés de dragueurs de mines, entrent dans la baie.
La batterie sera rapidement remise en état par les Anglais qui avaient pu juger de son efficacité, et elle est restée opérationnelle jusqu'au départ des Français qui ont pétardé ses tubes avant leur retrait dans les années soixante dix.

Source : Jean-Jacques Moulins
Diego Suarez 5-8 mai 1942 :
l’Opération « Iron Clad »

A bord du HMS Hermione qui entre dans la Passe le 7 mai 1942 vers 16h. Noter la position des canons qui sont prêts à répondre par un tir en cloche à la batterie de la Côte 84 située non loin au sud. (Photo IWM)

Un patrimoine sur le point de disparaître

Or ce patrimoine subit actuellement une dégradation très rapide. Alors que les canons possédaient encore leur blindage en 2006, ceux-ci ont disparus, enlevés par des récupérateurs de ferraille inconscients de la valeur de ce qu’ils détruisaient. C’est désormais à la maçonnerie que s’en prennent les pillards qui détruisent systématiquement chaque morceau de béton pour en récupérer qui la ferraille, qui les moellons. Les galeries, encore intactes en 2009, sont désormais à ciel ouvert sur quasiment toute leur longueur. Ce qui représente en plus un grand danger pour les visiteurs du site qui est désormais sillonnés de fossés profonds, abrupts, et infranchissables.
La visite de ces installations pourrait pourtant très facilement être intégrée à des circuits vers les trois baies en proposant, en plus d’un peu d’histoire, plusieurs points de vues particulièrement intéressants sur la région. La visite de la Côte 84 et son point de vue sur toute la zone de l’entrée de la Passe, pourrait être précédée par la visite, à une centaine de mètres de la piste qui mène à la Baie des Sakalava, du fort du Mamelon Vert, construit sur un promontoire offrant un panorama superbe et un bel exemple d’architecture militaire du début du siècle, avec notamment sa « Casemate de Bourges », ouvrage d’artillerie fortifié caractéristique de cette époque qui abritait deux canons de 95 mm.
Au coeur de la Nouvelle Aire Protégée (NAP) d’Orangéa, la mise en valeur ce site semble correspondre pleinement aux nouveaux objectifs de la gouvernance de ces zones.

 

Accéder à la Côte 84

La principale raison du pillage de ces installations est sans doute qu’elles sont situées à l’écart du passage et ignorées de la plupart, ce qui laisse le champ libre aux rares personnes en connaissant l’emplacement. Il n’en a pas toujours été ainsi  : au nord, la batterie était en effet reliée au camp d’Orangea par une chaussée soutenue par un muret du côté de la pente sur le premier tiers de son parcours. Il semble qu’une voie de 60 permettait le transport des munitions depuis le grand magasin à munitions souterrain d’Orangea, situé à environ 3 km au nord de la batterie. La voie de 60 a depuis longtemps disparu, mais on retrouve cette chaussée, bien qu’envahie par la végétation, en partant depuis le haut du camp d’Orangéa et un 4x4 peut l’emprunter sans (trop) de difficulté. Le seul risque est de se perdre en s’engageant sur des pistes « à zébus » qui souvent semblent trompeusement plus accessibles.

Galerie principale en cours de destruction près de la cuve n°3

Au sud, la Côte 84 était reliée au fort du Mamelon Vert (ouvrage E) par une piste rectiligne de 3 km. Cette piste, si elle est encore parfaitement visible sur les photos satellites, est par endroit totalement obstruée et ne permet pas le passage d’un véhicule.

Des randonneurs courageux pourront cependant assez facilement atteindre la batterie depuis son intersection avec la piste qui mène à la Baie des Sakalava. Mais il sera plus facile pour eux de partir depuis le nord de la Baie des Sakalava, de traverser la dune en direction du nord ouest et de gravir ensuite jusqu’au sommet de la colline qui se trouve en face. Mais attention : si de nombreux sentiers s’ouvrent dans la végétation, tous ne conduisent pas où on l’espère, et tant qu’un balisage digne de ce nom n’aura pas été mis en place, il est vivement recommandé de se munir d’un GPS afin de ne pas se perdre au milieu de la végétation. Les coordonnées des postes de garde nord et sud sont indiquées en légende du schéma d’implantation ci-dessus.

20110918 - Cap Diego : le « porte avions » du nord de Madagascar

Dimanche, 18 Septembre 2011

 

Le rocher de Cap Diego

Lieu des premières implantations des colons dans la baie, le plateau d’Andrakaka, dans la presqu’île de Cap Diego a fait, au cours des siècles, l’objet de plusieurs aménagements et reconversions. Histoire.

 

Diego ou Antsirane ?

Pour nous, Diego et Antsiranana (Antsirane à la fin du XIXème siècle) ne font qu’un. Pourtant, pendant longtemps « Diego » a désigné Cap Diego et non la ville que nous connaissons. Et, pendant plusieurs années l’administration française a hésité sur le choix de la ville en train de naître .En effet, dans la perspective d’une installation militaire Cap Diego semblait disposer de meilleurs atouts.

Des avantages naturels d’abord. On pouvait lire, dans la Revue Maritime et coloniale en 1885 :
« Du fond de la baie dans l’ouest se détache une grande presqu’île formée d’une partie évasée se rétrécissant peu à peu pour se rattacher à la terre ferme…c’est à l’extrémité de cette presqu’île que se trouve le Cap Diego formant dans la baie de la Nièvre une sorte de petit port naturel, parfaitement abrité et absolument caché pour quiconque vient de l’Est »
Des avantages stratégiques ensuite. D’après les Instructions Nautiques de 1885 « Ce cap est le seul point de toute cette côte qui présente un réduit naturel de facile défense ».
Les autorités militaires furent donc longtemps convaincues que la position du Cap Diego les mettrait « à l’abri d’un coup de main » qu’il vienne d’Ambohimarina, la place forte tenue par les troupes merina, ou qu’il vienne de la mer.

Vue de Cap Diego

 

Aussi, alors qu’Antsirane n’était encore qu’un tout petit village, des installations militaires furent établies à Cap Diego. Cependant, en 1885, tout était encore à faire.
Voici ce qu’écrit, François de Mahy, député de La Réunion, dans une lettre de 1885 :
« Il n'y a encore rien de construit au Cap Diego, sauf un petit quai en pierre, qui a été fait par un créole de Bourbon, sous la direction du commandant Caillet. Ce dernier avait tracé, au milieu des brousses qui revêtent cette partie du terrain, un chemin qui a été exécuté par les canotiers de la baleinière. Les bâtiments que nous avions visité la veille ont été faits par les hommes de la Dordogne et par la troupe au moyen des débris du transport l'Oise, naufragé en février dernier à Tamatave. Bref, on a tiré parti de tout, le mieux qu'on a pu. »

Mais, très rapidement, des bâtiments vont sortir de terre.

 

A cet effet, on utilise le calcaire du rocher de Cap Diego en construisant des fours à chaux qui vont permettre de fournir les matériaux nécessaires.
« Un dépôt de charbon a été créé en ce point ; sous peu, les vastes hangars élevés sur la plage seront terminés et reliés par un chemin de fer Decauville à des appontements que pourront accoster les grands navires. Des magasins, des ateliers de réparation, un petit arsenal en un mot, doivent y être établis, assurant le ravitaillement et l’entretien de nos navires dans la mer des Indes.
Un embryon de ville s’élève déjà sur les flancs, déserts il y a quelques mois, du cap Diego… » (Revue Maritime et Coloniale)

La grotte de Cap Diego

Et, en effet, entre 1885 et 1886, tous les efforts furent portés sur cap Diego ; on y construisit un hôpital, des ateliers, des casernements, des dépôts de vivres; le petit village d’Antsirane, de l’autre côté de la baie de la Nièvre, fut à peu près négligé à l’exception de la construction de deux petits fortins sur la hauteur dominant la plage.

C’est donc à cap Diego que fut installée la garnison composée d’une compagnie d’infanterie de marine, d’une compagnie de tirailleurs sakalaves et d’une compagnie de disciplinaires.

La situation changea avec les instructions du 28 août et du 2 septembre 1886 qui préconisaient l’occupation des hauteurs qui dominent la baie au sud.
Le commandant militaire Caillet regroupa alors une partie de la garnison à Antsirane.
Dès 1887, se trouvaient donc à Antsirane, le commandement et les services administratifs, trois compagnies d’infanterie de marine, une compagnie de disciplinaires et l’Artillerie.

Cap Diego abritait une compagnie d’infanterie de marine, une compagnie de disciplinaires, la compagnie des « Sakalaves », l’hôpital, les magasins et le parc à charbon.
Cette séparation entre les services se révéla rapidement difficile à organiser, les communications entre les deux points « stratégiques » ne pouvant se faire que par mer.
De plus, la petite ville « civile » d’Antsirane se développait rapidement, favorisée par sa position ouverte vers l’intérieur du pays, ce qui permettait un approvisionnement plus facile.

A son arrivée, en mars 1887, le gouverneur Froger avait regroupé tous les services civils à Antsirane qui devint ainsi le centre administratif de la colonie de Diego-Suarez.
Se posa alors la question de la division des services, les militaires répugnant à abandonner Cap Diego où de gros travaux avaient été effectués et dont la position paraissait plus sûre.

Logement des légionnaires

Cependant, en 1888, la compagnie des disciplinaires et celle des tirailleurs malgaches, les « sakalaves »furent affectées au poste de Mahatsinjoarivo, qui faisait face au poste merina d’Ambohimarina.
Il ne resta plus alors à Cap Diego qu’une section de l’artillerie de marine et l’hôpital militaire.

Le transfert de celui-ci à Antsirane fut dès lors envisagé mais ne fut réalisé que 10 ans plus tard. En effet, il semble que l’Administration ait répugné à la dépense : « J’estime qu’il n’est pas rationnel de dépenser 600.000 F à Antsirane pour construire un hôpital quand, à Diego, il est possible d’en avoir un très convenable avec une dépense de 50.000F » jugea l’Inspecteur-Général venu inspecter les travaux en 1891.

Mais cet éloignement de l’hôpital était source de problèmes et, en 1899, on pouvait lire dans l’Annuaire Général du Gouvernement de Madagascar :
« L’ancienne ambulance du Cap Diego, transformée en hôpital ne peut encore satisfaire à tous les besoins. Aussi, la construction d’un nouvel hôpital de 300 lits à Antsirane a-t-elle été décidée. La ville d’Antsirane a été choisie de préférence à Orangea et à Cap Diego, parce que c’est là qu’est réunie la garnison la plus importante et qu’habite aussi la population civile presque toute entière »

Antsirane avait gagné…

Et après…

En 1900, lorsque Diego fut déclaré « Point d’appui de la flotte » sous la direction du colonel Joffre, Cap Diego ne fut pas oublié mais ne bénéficia cependant pas du formidable développement des fortifications qui devaient devenir « la ligne Joffre ».Cet abandon relatif se lit dans le texte de D’Anfreville de la Salle, daté de 1902 :
« Le port militaire occupera la baie de la Nièvre. On passera, en le quittant, devant Antsirane à droite, Diego à gauche, puis, traversant la baie de Diego sous le feu des diverses batteries qui s'y trouvent, on atteindra enfin le goulet, formidablement défendu.
Outre les batteries qui battent la passe, des deux côtés, la superbe batterie de Vatoumanti (sic), entièrement taillée dans le roc, prend celle-ci d'affilée, puis à droite, se succèdent les batteries installées à Orangea et Ankeriki (sic). D'autres encore se trouvent à Diego, bourg exclusivement militaire, composé d'un hôpital, de magasins divers, avec un petit appontement pour permettre de plus faciles communications maritimes. »

Ancien hôpital de Cap Diego

Un bataillon de la Légion Étrangère fut cantonné à Cap Diego où il occupa l’ancien bâtiment des disciplinaires. La légion resta à Diego jusqu’en 1974 et beaucoup d’Antsiranais se rappellent la présence des légionnaires et les anecdotes qui accompagnaient les exploits –plus ou moins appréciés- de ce corps . Ce qui frappa surtout les esprits c’étaient les descentes du haut du rocher par le « ventral », c'est-à-dire le long de câbles qui plongeaient dans la mer où les légionnaires arrivaient tête première !

Cap Diego devint aussi un lieu d’excursions à la mode. En 1929, on vantait ainsi cette excursion « facile » : « Au Cap Diego, service quotidien par chaloupe à vapeur. Ascension du rocher ; escalier et route à travers la forêt calcaire ; vue splendide sur toute la baie, la ville et le massif du cap d'ambre. Déjeuner dans la grotte du Cap Diego, au bas du rocher. Village indigène très pittoresque, jolie plage sur la baie du sépulcre, ainsi appelé à cause des sépultures malgaches qu'elle contient. Cette excursion peut être faite dans une demi-journée ».

L’aérodrome d’Andrakaka

La base d’Andrakaka a été construite et aménagée par la Royal Air Force (RAF) dès 1942 après l’opération «Iron Clad». Elle a été prise en charge par l’Armée de l’Air à partir du départ des Anglais (approximativement entre mi 44 et début 45). Par décret du 19 Septembre 1946, l’Armée de l’Air était affectataire principal avec comme affectataires secondaires, l’Aéronautique Navale, les Transports Aériens (civils) et l’Aviation de tourisme.

Jusqu’en Décembre 1951, un détachement de l’Armée de l’Air a effectivement occupé le terrain mais les besoins en personnel des autres théâtres en ont nécessité le départ, officiellement le 1er janvier 1952.

L'aérodrome d'Andrakaka

A partir de là et jusqu’en 1954, il est resté sur la base une «garde» composée d’un sous-officier et de 3 Hommes.

 

Depuis le 1er Janvier 1952, le terrain n’est plus ouvert à la circulation aérienne que sur demande exceptionnelle

 

Les installations sont juste «gardiennées» (à minima)

BAN Andrakaka

Depuis Mai 1948, la Marine Nationale envisage la création à Andrakaka d’une base d’aéronautique navale (BAN) pour des Formations «d’exploration et de surveillance» ainsi que d’»hélicoptères». Cette mise en place, initialement prévue à partir de 1953, est retardée.

La situation d’Andrakaka est exceptionnellement privilégiée. En dehors des rares journées cycloniques, l’arrivée est toujours réalisable à vue. L’absence totale de brume ou de nuages basse altitude permet toujours les mouvements d’aéronefs (décollage / atterrissage).
Les vents dominants, alizés du Sud / Est ou les moussons du Nord / Ouest sont dans l’axe de la piste. La nature du sol a permis, par simple désherbage et nivelage, l’utilisation de la piste par des avions de trente tonnes. De fortes pluies prolongées peuvent rendre la surface de la piste légèrement glissante, mais en moins d’une heure après la fin de la pluie, la surface de la piste retrouve son caractère normal. Beaucoup d’espace est disponible sur le plateau. Il n’y a donc aucune difficulté d’implantation pour l’installation de stations météo, radio, d’aides à la navigation et d’atterrissage

L’implantation d’Andrakaka présente de multiples intérêts : raccourcissement des lignes impériales (En 1953, la France parle encore de son «Empire»...), situation au «coeur» du point névralgique de Madagascar, proximité d’un port de ravitaillement «stratégique» de la Flotte.

La construction d’une piste «moderne», (type A) est rendue possible en profitant de la «trouée» du col du Courrier qui permet aux avions de faire une très longue approche avec une faible incidence -idéale pour les gros porteurs.

 

A peu de frais, la piste en dur peut alors être portée à 3 200 m avec 150 m disponible (POR, Piste Occasionnellement Roulable) à chaque extrémité soit 3 500 m au total.

Skyraiders AD sur l'aérodrome d'Andrakaka

Lors de la réunion du Comité des Chefs d’Etat-Major du 9 Février 1953, l’Aéronavale a acceptée d’être l’Affectataire principal de la base d’Andrakaka.

La piste d’Andrakaka a été désherbée en Octobre 1952 et est rendue utilisable par les avions militaires.

L’entretien de la piste et des installations pour l’année 1953 seront réalisés grâce à des crédits de l’Aéronavale.

La date officielle de changement de statut de la base sera le 1er Janvier 1954.

Cette année 1954 verra officiellement la disparition de la BAN DIEGO-SUAREZ et la naissance de la BAN ANDRAKAKA.

Il s’ensuit un transfert progressif des installations techniques de Caméléon (Pyrotechnie) vers la nouvelle BAN. «Provisoirement (sic), les aéronefs continueront à «loger» dans le hangar habituel d’Arachart».

Remarquons que «ce provisoire, style Marine» durera un peu..longtemps, puiqu’en 1972 (18 ans plus tard), il était encore d’actualité et majoritairement appliqué lors du stationnement du C47 à Diégo.

Tout le personnel quittera également la zone vie de Caméléon progressivement pour être caserné à l’Unité Marine.

Ce terrain a servi à des transports de civils (notamment les étudiants qui faisaient leurs études à Tananarive) pendant la Seconde République.

Le DC4 de M MONTEL, Secrétaire d’Etat à l’Air, y a fait escale en Mars 1953 lors de sa tournée d’inspection à Madagascar et la Réunion.

Le 6 juillet 1953, un DC 6 de la T.A.I(Société Commerciale Civile) en difficulté au nord de l’ile et dans l’impossibilité de rallier Tananarive, s’est posé à Andrakaka avec 53 passagers à bord. Il en a redécollé sans problème particulier le 13 juillet après le changement d’un moteur.

On parle d’y créer un nouvel aérodrome… Le Ministre des Transports malgache Rolland Ranjatoelina a annoncé en octobre 2010 la possibilité d’exploiter à Diego Suarez un second aéroport international. Cap Diego aura-t-il un jour l’activité qu’on lui prédisait en 1885 ?

Le C47 Dakota n°45 FYALA de la section liaison Madagascar (SLM) à l'atterrissage sur la BAN Andrakaka

 

■ S. Reutt - Ass. Ambre

20110824 - Joffreville : le réveil de la Belle Endormie de la Montagne d'Ambre ?

 

Mercredi, 24 Août 2011

Inaugurations et grande fête populaire ce samedi à Joffreville

Joffreville : le réveil de la Belle Endormie de la Montagne d'Ambre ?

Nouvelle mairie, grande rue repavée, salle polyvalente, halle du marché, centre de loisirs : l’inauguration des travaux effectués avec l’aide de la Réunion marque t’il le réveil de la belle endormie de la Montagne d’Ambre ?

Après des décennies qui n’ont vu aucun changement dans l’ancienne station de santé de l’Armée Française, des initiatives de différents acteurs de La Réunion ont permis la réhabilitation et la construction de plusieurs infrastructures collectives dont cette commune rurale manquait cruellement depuis trop longtemps. Une grande fête populaire était offerte aux habitants pour marquer l’inauguration de ces réalisations.

SOLO Albert - Maire de Joffreville

SOLO Albert Maire de Joffreville

Les inaugurations se sont déroulées en présence du Chef de Région Mr Romuald Bezara, du Chef de District Anstiranana II Mr Reminantenaina Herman, des maires des communes voisines, des représentants des organisations partenaires de la Commune de Joffreville, et de nombreux habitants du cru venus en famille assister à la cérémonie avant de déguster les trois zébus offerts par la Mairie dans un grand banquet populaire. 

Ces réalisations ont été financées par la coopération avec la Commune Urbaine de St Denis, mais aussi le Conseil Général de La Réunion et des associations telles que l’ARAD (Association Réunionnaise des Amis de Diego Suarez).
A Joffreville, la Commune Urbaine de St Denis de La Réunion a financé trois chantiers importants, à hauteur de 80% du coût total des projets : la réhabilitation du Bazary pour un montant de 25 000 € (les travaux se basaient sur des fondations existantes depuis 1966) ; le pavage de la grande rue dite « Les Champs Elysées » pour un montant de 41 000 € et la construction et l’aménagement d’une salle communale polyvalente « Trano pokolona » pour 20 000 €. Ce dernier bâtiment correspondait à une demande forte de la part de la population qui ne disposait pas jusque là d’une salle de réunion commune. A cette occasion, le bâtiment de la Poste a été repeint par Paositra Malagasy, à ses frais.

REMINANTENAINA Herman, Chef de District Antsiranana II

REMINANTENAINA Herman, Chef de District Antsiranana II

C’est à l’occasion d’une visite de la Présidente du Conseil Général de La Réunion que celle-ci a découvert que le bâtiment actuel de la Mairie avait été au début du siècle dernier –quand Joffreville était le Camp d’Ambre où séjournait la Légion Étrangère– l’ancienne école créole dans laquelle les enfants des Réunionnais qui vivaient là ont fait leurs premières classes. C’est donc sur un coup de coeur que la Présidente a décidé de financer pour un montant de 25 000 € environ la réhabilitation de cette bâtisse au passé chargé de nostalgie.
Le centre de loisirs quant à lui était une nécessité pour les jeunes : il faut savoir que le microclimat dont bénéficie la Montagne d’Ambre en fait une zone très humide où il pleut quasi quotidiennement, rendant impératif pour les jeunes du village de disposer d’un abri pendant les pauses et les temps de loisirs.
Les membres de l’ARAD (Association Réunionnaise des Amis de Diego) ont financé l’électrification en photovoltaïque du CEG pour un montant de 4 000 €. Ils n’ont pas hésité à mettre la main à la pâte puisqu’ils ont participé activement à la peinture de l’EPP. Cette association a également fourni écran et projecteur, ainsi qu’un groupe électrogène afin de pouvoir organiser des séances de cinéma.
Ils ont également fourni des kits scolaires pour les EPP d’Anivorano et d’Ankorikahely notamment.

GASPARD Gislain, représentant de la Coopération St Denis

GASPARD Ghislain, représentant de la Coopération St Denis

La rénovation des infrastructures communales de Joffreville s’inscrivait dans un programme plus général de coopération décentralisé entre la Commune Urbaine de Saint Denis de La Réunion et trois communes de la région de Diego Suarez avec lesquelles des conventions de partenariat ont été signées en octobre 2009.
Les projets à réaliser ont été identifiés par les partenaires malgaches eux mêmes, par une concertation entre les maires des communes concernées ainsi qu’avec les membres des conseils municipaux et après consultation des populations.
Les principaux axes de ce programme avec la Commune Urbaine de Diego Suarez ont été :
La sécurité civile avec la mise en place en coopération avec le SDIS (Service Départemental Incendie Secours) de La Réunion d’une caserne avec une dotation en matériel et la formation d’un corps de pompiers.
La création d’un centre d’enfouissement technique (gestion des ordures ménagères) sur la route d’Anamakia dont la mise en place a rencontré de nombreuses difficultés.
Enfin, à Ramena :  réfection de la bretelle de la RN59B vers le village, soit 182 m de rue re-pavée pour un montant de 40 000 € environ ce qui représentait 80% du montant des travaux (le reste étant pris en charge par la commune concernée, comme pour l’ensemble des projets de ce programme).

Cette coopération qui commence a porter ses fruits est appelée à se poursuivre. Si elle a été l’objet de nombreuses polémiques à La Réunion, il semble que les inaugurations de ce week end tendent à démontrer la volonté de ses acteurs d’en faire une réussite et de la continuer. Un projet de Centre de formation professionnelle à Joffreville en est actuellement aux études de faisabilité.
Mais le développement de cette zone aux forts potentiels touristiques et agricoles ne pourra se faire qu’avec l’amélioration des infrastructures routières, vers Diego Suarez d’une part, et entres les communes de la Montagne d’Ambre d’autre part : Antsalaka, Anketrabe, Joffreville, Mangoaka.

20110710 - Histoire de Madagascar - les Rues de Diego Suarez : le Quartier Militaire

Dimanche, 10 Juillet 2011

 

S’étendant sur toute la partie ouest du plateau d’Antsiranana, le Quartier Militaire présente de nombreux bâtiments qui témoignent de l’importance qu’à eue la fonction militaire de Diego Suarez.

 

Tous les lecteurs de « La Tribune de Diego Suarez » le savent maintenant, les premières implantations dans le territoire de Diego Suarez-Suarez, cédé à la France en 1885, se firent à Cap Diego Suarez et dans la ville basse.

Interdiction était alors faite aux civils, pour des raisons de sécurité militaire, de s’installer sur le plateau.

Pour autant, l’armée n’avait pas vraiment investi les hauteurs de la ville, se contentant, dans un premier temps, d’y construire 2 petits fortins en bois (voir photo). Le premier, situé au sud et entouré d’un rempart en briques était « protégé » (si on peut dire !) par une haie de bambous taillés en pointe. Plus bas, le second dominait la baie « croisant ses feux avec le premier, sur le plateau couvert de hautes herbes qui domine Antsirane (L’Illustration).

Le Contre-Amiral Miot, qui avait pris possession du nouveau territoire écrivait, le 11 avril 1885 : «J’ai fait construire deux petits fortins destinés à protéger le village d’Antsirane, plutôt pour rassurer les réfugiés qui viennent jusqu’à nous, que pour nous défendre contre toute agression des Hovas.»

 

L’emplacement pour un casernement est choisi dans les meilleures conditions. Il y a une baignade, de l’ombre, une falaise qui l’abrite des grands vents de sud. L e terrain forme un vaste rectangle de 70m de longueur sur 47 de largeur. Les planchers des cases seront élevés de 0,75 au-dessus du sol. »

 

Les troupes stationnées à Antsirane (l’infanterie de marine) étaient logées dans des baraques en fer et brique sur la plage de Diego Suarez, à un emplacement situé approximativement entre les bâtiments de la Saline et l’entrée du port. Les logements de l’artillerie étaient établis sur le versant du plateau, en-dessous du premier fortin.

 

Il fallut attendre la fin de 1886 pour que l’armée se décide à occuper les hauteurs ; cependant, la plupart des installations militaires demeurèrent à Cap Diego Suarez, alors qu’avec l’afflux d’immigrants, la ville d’Antsirane se développait et que le Gouverneur Civil y installait sa résidence.
En 1887, la Direction de l’Artillerie, chargée des constructions, multiplie les travaux sur le plateau : le quartier militaire compte déjà de nombreux bâtiments : casernes, ateliers, magasins. Les premières maisons étaient des « préfabriqués » importés de France : charpente en fer, murs en briques et couvertures en tuile. (Ces cases « Maillard », du nom de leur constructeur, furent en grande partie détruites par le cyclone de 1912.)

 

Toutefois, il fallut rapidement trouver des matériaux sur place pour construire à plus bas prix : une briqueterie fut installée à Cap Diego Suarez et un four à chaux ouvert au bord de la baie des Français.
Cependant, on pouvait encore lire dans « Le Tour du Monde » de 1897, sous la plume du Dr Hocquard : « …presque toutes les constructions ont l’air d’être provisoires ; à part l’habitation du gouverneur, celle du chef du génie, le commissariat et les casernes, les maisons sont construites en planches, ou en matériaux démontables… »

 

Il fallut attendre l’arrivée du Colonel Joffre et la promotion de Diego Suarez comme « Point d’appui de la flotte de l’Océan Indien » à partir de 1900, pour que les installations militaires prennent un aspect définitif.

 

Dès 1900 plus de 5000 militaires furent envoyés à Diego Suarez : il fallut donc les loger. En 1905, les installations étaient pratiquement achevées : elles comprenaient des casernes pour les troupes, des logements pour les officiers, des bureaux, des magasins, des ateliers. Un nouveau quartier était né, occupant toute la partie ouest de la ville et parallèle à l’agglomération civile groupée autour de rue Colbert, ouverte en 1890.

Ce quartier était relié à la ville basse où s’étaient faites les premières installations, par la rue du Catinat (du nom du bateau du même nom) devenue par la suite la rue Gouraud (un des généraux les plus populaires de la Grande Guerre). Celle-ci se prolongeait (et se prolonge toujours !) par le Bd Bazeilles (nommé ainsi en hommage aux troupes de marine qui combattirent à la bataille de Bazeilles lors de la guerre franco-prussienne de 1870). Enfin, on pénétrait dans le quartier militaire proprement dit, par le Bd Militaire qui se terminait au portail de la Direction de l’Artillerie, devenue la SECREN.

 

Le chemin de fer Decauville

 

Le chemin de fer Decauville, qui reliait le port à Sakaramy empruntait alors cet itinéraire pour bifurquer ensuite dans le Bd de Sakaramy au niveau du Camp Lubert.

 
Suivons un peu le trajet de la petite locomotive Decauville pour rencontrer les militaires des années 1900-1910

Nous grimpons donc, à partir du port, jusqu’au Bd Bazeilles, nous passons devant le Cercle Français – actuellement « Suarez Art ». Le Cercle Français était à l’époque le haut lieu de la vie mondaine et économique. C’est au Cercle Français que le Général Gallieni, en visite en 1901, avait annoncé les mesures d’urbanisme qui devaient transformer la ville, notamment la construction de la rue Richelieu qui reliait les quais à la ville haute.

Nous tournons ensuite dans le Bd Militaire. A droite, se trouve le Cercle Militaire : c’est une construction de bois, moins luxueuse que le Cercle Français ; il fut plus tard remplacé par le bâtiment actuel ; à côté, par contre, la résidence du gouverneur (militaire), un des premiers bâtiments construits sur le plateau en fer et brique, a résisté au temps puisque nous pouvons toujours le voir à peu près tel qu’il était lorsqu’il dominait les installations militaires de la ville basse.

En face, s’ouvre le camp Mehouas, (les 3 camps du quartier militaire portent le nom d’officiers ayant participé à la guerre franco-malgache de 1895) qui abritait à l’époque le 3e bataillon de Tirailleurs malgaches.
Entre le cercle militaire et le Camp Mehouas, s’étend la Place d’Armes où se déroulaient les manœuvres et d’où partaient les défilés, notamment pour le 14 juillet.

Plus loin, le Bd Militaire, bien ombragé à l’époque, passait entre les maisons des officiers, d’abord construites en bois avant de prendre l’aspect que nous leur connaissons à l’heure actuelle.
Au niveau du Camp Lubert, la voie ferrée bifurque dans le Bd de Sakaramy pour se diriger vers le Camp Pardes (où était cantonné le Bataillon Colonial).
Restons dans le Bd Militaire : sur la droite s’ouvre, comme maintenant, le Camp Lubert qui abritait le 7e régiment d’artillerie coloniale.

On entrait ensuite dans les quartiers de la Marine en passant devant l’Hôtel du Commandant de la Marine , jouxtant le sémaphore qui recevait les signaux depuis le Cap d’Ambre. Puis, les casernes de la Marine (ou, comme on le disait à l’époque « le casernement des équipages de la flotte ») et enfin, au bout du Bd Militaire la Direction de l’Artillerie (qui devint plus tard la DCAN puis la SECREN) avec sa cheminée, ses ateliers …et son portail majestueux qui n’a pas beaucoup changé


■S. Reut - Ass. Ambre

Histoire de Madagascar - les Rues de Diego Suarez : le Quartier Militaire

 

20110622 - Les fortifications de la Baie de Diego Suarez : patrimoine oublié du Nord de Madagascar

 

22 Juin 2011

Peu à peu tombées dans l’oubli, les traces des efforts de défense de la baie à travers les âges sont toujours présentes, offrant un voyage dans le temps au promeneur qui sait les découvrir.

 

Visite guidée.

La Baie de Diego Suarez, depuis sa découverte a représenté pour ses occupants un refuge que les caractéristiques naturelles rendait aisé à défendre. La faible largeur de la passe (900 m au plus étroit) constituait un verrou qu’il suffisait de renforcer par des batteries côtières judicieusement positionnées pour faire de la Baie une forteresse inexpugnable. Beaucoup de reste d'ouvrages de défense sont encore visibles. Ces ouvrages sont situés aux points stratégiques de la baie, dont la particularité est d’en être les meilleurs points de vue.
Le pittoresque historique associé à la qualité exceptionnelles des points de vues font de ces lieux des destinations touristiques de choix.

 

Windsor Castle

Windsor Castle tire son nom de la ressemblance de sa silhouette avec celle du château du même nom.
Une tourelle surmonte un des sommets de la crête séparant la Baie de Diego Suarez et le Canal du Mozambique, offrant un des meilleurs point d'observation de la région et un panorama unique : la Baies des Courriers à l'ouest, le Cap d'Ambre au nord, la Baie de Diego et l'Océan Indien à l'est, la Montagne d'Ambre (1485 m) au sud (visibilité inter-points de triangulation géodésique).
On accède au sommet par une série d'escaliers en pierre. À mi-hauteur de la falaise, plusieurs bâtiments avec un four à pain et des traces de réseau électrique.
En contrebas à l'est / sud est, un petit lac collinaire retenu par un barrage artificiel constituait une réserve d'eau.

 

Ambatomainty

Le Cap Ambatomainty est ce dôme si caractéristique, situé au bout d'une petite péninsule qui s'avance en direction du Sud vers le milieu de la Baie. Cette place stratégique est occupée par les ruines d'un ancien fort. On distingue les restes d'un ancien quai, duquel partait une piste solidement aménagée qui montait en lacet vers un premier bâtiment, à l'entrée d'un complexe souterrain.
Le souterrain comprend une dizaine de salles réparties le long d'un couloir qui monte en pente douce jusqu'à un monte charge, puis d'un escalier qui amène au sommet du Cap. Quatre canons ("Modèle 1875-76 - Rives de Giers" d'après les inscriptions sur la culasse) étaient encore là il y a quelques semaines...
Le point de vue est magnifique (visibilité inter-points géodésiques).

 

Cap Diego

 

Un grand terrain d'aviation avec la trace de ses hangars, entouré d'un solide système de défense naval et anti-aérien.

Au Sud-Est, faisant face à la ville, le village de Cap Diego avec le fameux mess des officiers installé dans une vaste grotte à l'intérieur de la falaise.

Le bord Est du plateau est occupé par les batteries de l’Hôpital» et de «la pointe 240»



Mahatsinjarivo

Le Fortin de Mahatsinjarivo est perché à la limite du plateau qui surplombe au Sud l'aéroport d'Arrachart (aéroport de la ville de Diego Suarez).
C'est un bâtiment rectangulaire percé d'embrasures qui défendait l'accès à la ville par le sud. C’est un des tous premiers ouvrage de défense terrestre construit par les français pour se préserver des attaques des Merinas.
Sa disparition totale et rapide est probable en raison du pillage des moellons.

 

Ambohimarina

Le Fort d'Ambohimarina : "Machu Pichu" de la Montagne des Français ?

Situé au sud de la Montagne des Français, face au mont Reynaud à l’Est (Mont Carré) et au-dessus de l’actuel village de Mahagaga, le Fort d'Ambohimarina était le symbole de la domination Merina (habitants des hauts-plateaux) sur le reste de Madagascar -en l'occurrence le Nord. Sa position stratégique lui permettait de dominer toute la région et il accueillait une garnison comprenant jusqu'à 2000 hommes. Au cours de la conquête du pays par les Français, en 1895, ceux-ci le bombardèrent depuis la mer et en prirent possession ensuite sans combat, la garnison ayant fuit sans demander son reste.

Après une marche d'approche d'une heure depuis Mahagaga dont la principale difficulté réside dans la montée sur la falaise, le plateau offre un paysage saisissant avec des formes d'érosion très marquées. Du fort lui même, il ne reste que très peu de traces visibles -particulièrement pendant la saison des pluies où la végétation se fait envahissante. Les restes d'une tour occupent le sommet d'un petit piton, et plusieurs murs se distinguent à travers la broussaille en contrebas, sur un petit plateau, et laissent penser que c'est tout un village qui dort et attend d'être dégagé pour prendre l'aspect d'un véritable petit "Machu Pichu".

 

Montagne des Français

(Anosiravo)

Le massif de la Montagne des Français offre un formidable bastion naturel avec ses hautes falaises de calcaire. C'est un excellent point d'observation qui a été le théâtre d’affrontements majeurs dans la Baie.
Il a notamment été pris par les Français en 1890 aux soldats de la reine Ranavalo III.
On accède au fort par une chaussée qui aboutit à un tunnel d'une centaine de mètres. Ce tunnel, creusé dans la roche, a accueilli un système de câbles / poulies pour faciliter l'accès et le ravitaillement.
Une muraille de pierres sèches délimite une enceinte au sommet de la falaise.
Un grand bâtiment en retrait, reste du camp disciplinaire, comprend une salle de bain et un four à pain.

 

 

Le Mamelon Vert

Le Fort du Mamelon Vert fait partie de la première série de fortifications mises en place suite au classement de Diego Suarez comme "point d'appuis de la Flotte" en 1897.

Il est situé à 1km à peine de la Baie de Sakalava
Le fort comprend deux enceintes séparées par une zone dépourvue de végétation très facilement repérable.
L'accès est relativement aisé par la piste allant à la Baie de Sakalava, et le panorama depuis le haut est saisissant et totalement inattendu : le Mamelon Vert porte bien son nom puisqu'il domine nettement les alentours et permet d'apercevoir la Baie d'Ambodivahibe au sud, les collines du Cap d'Ambre au Nord, Windsor Castle et la Baie du Courrier à l'ouest, et Diego Suarez et le Pain de Sucre au sud-ouest (visibilité inter-points géodésiques).
Le sommet du mamelon est ceinturé par un mur de pierres sèches. Sur le terre-plein central un bâtiment qui ressemble à une réserve, un grand bassin(?) et un bunker qui occupe le coin nord est avec deux embrasures et les traces de deux canons dont il ne reste que les gougeons au sol.

 

Pointe 84 (Bellevue )

Au sud de la crête du Camp d'Orangéa, dominant les Baies des Pigeons, des Dunes, et de Sakalava, un ensemble de quatre canons de fort calibre toujours en place.Au nord des quatre tourelles, un bunker avec un poste d'observation blindé et plusieurs bâtiments de service en contrebas.

Toutes les constructions sont reliées entre elles par un réseau de galeries souterraines. Ce réseau comprend également d’imposants magasins souterrains.

Les canons avaient encore leurs blindages en 2006. Les toits des tunnels sont actuellement démolis pour en récupérer les fers à béton.

Orangea

Surplombant la Passe du haut de ses falaises, le Cap Miné présente en plus de son phare de nombreux ouvrages fortifiés.
Tout le long de la falaise, une série de batteries de canons français «Modèle 1875-76» sur une large banquette de maçonnerie.
Plusieurs emplacement éparpillés sur le plateau de pièces anglaises, portant le sceau du roi d’Angleterre Edouard VII (1841 - 1910).
À l'abri de la pointe extrême de la falaise, un bunker armé de quatre énormes canons défend l'entrée de la passe.
Au sud, l'anse d'Orangéa abrite le Camp militaire avec ses bâtiments typiques de l'architecture coloniale.
Les bâtiments disparaissent rapidement au grès des besoins en matériaux des habitants de la région.

 

La Ville

La ville elle-même était protégée par trois forts : G, H, Pte Corail. Elle comprend également toutes les installations logistiques : quartier militaire, amirauté, chantier naval, etc..

 

Les canons G de 19 cm Modèle 1875-76

Sous la pression des événements de Fachoda (1898), le programme d’armement de la défense de Diego Suarez fut modifié et certains des canons M de 194 Mle 1870-93 prévus remplacés par des canons G de 19 cm Mle1875-76, moins puissants mais disponibles.

En 1914, en raison des progrès de l’artillerie, la défense de Diego-Suarez était obsolète et ses canons, à la portée trop faible et à la cadence de tir trop lente, complètement dépassés. En conséquence, contrairement aux autres points d’appuis de la Flotte, réalisés plus tardivement et dotés de matériels plus moderne, peu de canons y furent prélevés pour être envoyés en métropole renforcer l’artillerie lourde. Tout le reste est resté en place et constitue de ce fait des vestiges exceptionnels de cette époque.

Photos : Philippe Zénone
Retrouvez plus de photos sur : www.photos-de-madagascar.com

 

20100418- LA GUERRE A DIEGO EN...1942

Dimanche, 18 Avril 2010

Le 5 mai 1942, les Anglais attaquent Antsiranana

 

La ville dirigée par le gouverneur Annet est fidèle au général Pétain qui a pactisé avec les Allemands.

L’opération anglaise IRONCLAD est lancée à partir de la baie du Courrier. Diego tombe en 3 jours.

A l’aube du 5 mai 1942, le bruit des bombes et les hurlements des sirènes de l’arsenal réveillent les Antsiranais qui s’étaient endormis dans une ville paisible se croyant très loin du conflit mondial. Puis, c’est du côté de la rade que le grondement des avions et le bruit des explosions plonge la population dans la tourmente .

Que s’est-il passé ?

En 1940, après la victoire allemande, l’administration de l’île, dirigée par le gouverneur Annet, refuse de se rallier au Général de Gaulle et reste fidèle au Maréchal Pétain.

Les Britanniques craignent alors que les Japonais utilisent Diégo, pour menacer la route de ravitaillement des Indes et du Moyen-Orient par le canal de Mozambique. Dans le plus grand secret et sans en avertir le général de Gaulle, ils décident alors une offensive sur Diégo- Suarez : l’opération IRONCLAD.

Le 5 mai 1942, au P.C de la défense, les nouvelles tombent: le terrain d’aviation d’Arrachart est détruit, les hangars sont en feu, tous les avions sont cloués au sol. Du côté d’Ambodivahibe, on aperçoit des parachutistes et des obus éclairants. Dans le port les bateaux sont presque tous coulés, notamment les bâtiments de guerre : le croiseur Bougainville et le sous-marin Bévéziers. Le D’Entrecasteaux, torpillé, arrive à sortir du port et se réfugie dans la baie des Cailloux Blancs d’où il mènera durant 30 heures une défense héroïque.

Mais personne ne sait où sont les Anglais… Au P.C de la Défense le désarroi est grand : en effet, il semble que le danger vienne de la Baie de Rigny : c’est donc vers Mahagaga que vont être détachées les premières troupes. De son côté, le Commandant de la Marine, demande aux trois autres sous-marins de la base, alors en mer, de rentrer au plus vite. Aucune nouvelle ne parvenant de la Baie du Courrier, une reconnaissance est envoyée dans cette direction.

En fait, le débarquement de l’énorme flotte anglaise a eu lieu dans la baie du Courrier : les tirs d’obus et les parachutistes (des mannequins !) sur la baie de Rigny n’étaient qu’un leurre ! Mais en raison des défaillances de la radio et du téléphone, les postes français ne sont pas parvenus à avertir le P.C. Enfin, à 10h, l’instituteur d’Anamakia, Auguste Ratsimbazafy, appelle le P.C : «Mon colonel, actuellement à Anamakia, il y a dix chars anglais qui viennent d’arriver par la route de Mangoaky ».

Le premier combat important a lieu vers 11h, sur la route d’Anamakia, au Col de Bonne Nouvelle, où les trois tanks de tête anglais tombent sur les défenseurs français : les tirailleurs vont résister pendant 4h dans une défense héroïque où 30 d’entre eux trouveront la mort, les autres étant pour la plupart blessés. A 14h30, les Anglais arrivent au niveau de la ligne GH, la « ligne Joffre », constituée par un fossé antichar de 2000m reliant le fort G (que l’on peut encore voir à Morafeno) au fort H de la route d’Anamakia . Mais, sous le feu de l’artillerie, les Anglais stoppent l’attaque à la tombée de la nuit.

La « ligne Joffre » a tenu.De son côté, le D’Entrecasteaux, échoué et pilonné toute la journée, a pu débarquer une compagnie de fusiliers qui a repris Andrakaka.

L’épave du sous marin coulé en 1942, à coté d’une épave plus récente

Bilan des pertes durant les 3 jours d’affrontements

(Le nombre de tués et de blessés varie suivant les sources)

Pertes françaises en hommes: 171 tués, 343 blessés

Pertes anglaises en hommes: 131 tués et 305 blessés 3500 prisonniers.

Pertes en matériel 19 avions – 3 sousmarins-( Bévéziers- Monge – Le Héros) – 2 navires : (D’Entrecasteaux Bougainville), 16 tanks et un navire.

 

A 2 h du matin, le 6 mai, un bataillon anglais parvient à s’infiltrer et à s’emparer des casernes d’Anabozaka mais deux autres bataillons sont repoussés. L’attaque reprend à l’aube mais elle sera stoppée par la défense de la ligne GH. C Cependant , la Marine, jugeant la situation désespérée, ordonne la destruction de l’arsenal et du port . De son côté, en baie des cailloux blancs, le D’Entrecasteaux , en flammes, attaqué sans relâche par l’aviation et la marine est évacué à 11h. Au soir du 6 mai, la situation paraît stationnaire.... Mais le général anglais Sturges, qui commande l’opération, ne désarme pas. Il décide de lancer une attaque surprise en profitant de l’obscurité. A 21h, le destroyer Anthony, pénètre dans la passe sans être repéré et débarque un commando qui s’empare du PC de la Marine. A 21h30, la ligne Joffre est percée. A 23h, les Anglais atteignent Tanambao. A minuit le PC de la Défense est encerclé : Diégo est tombé. Le sous-marin « Le Héros » est coulé en baie du Courrier : 24 marins vont disparaître, attaqués par les requins. Le capitaine Assolant, un des premiers pilotes à avoir traversé l’Atlantique, est tué aux commandes de son avion. A Orangea, les batteries sont détruites par l’escadre anglaise : l’accès de la rade est ouvert. En fin d’après-midi, le 8 mai, la capitulation est signée à la Résidence.

Dès lors, l’autorité britannique remplace l’autorité française. Le 6 novembre, le Gouverneur Annet accepte la négociation. La campagne de Madagascar aura duré en tout 6 mois.

 

 

Sur les traces de la guerre  

Les évènements de 42 ont laissé des traces dans l’histoire : nombreux sont les ouvrages ou les articles qui relatent ces affrontements. L’opération IRONCLAD est même le thème d’un jeu video !

A Diégo même, certains anciens peuvent encore témoigner de la violence de ces 3 jours de combat.
Sur le terrain, on peut encore découvrir les traces de cette bataille meurtrière, notamment la stèle érigée à côté de la STAR près de l’endroit où eurent lieu les combats les plus violents.
On peut se recueillir sur les tombes des victimes (presque tous des jeunes gens !) dans les cimetières militaires anglais et français au début de la route de Ramena.
Tous les habitants de Diégo connaissent les blockhaus du Lazaret ou de la route d’Anamakia (après la SOAM)
Enfin, on peut retrouver –non sans difficulté - les vestiges de la ligne Joffre datant de 1903 : les fortifications d’Orangea, notamment la batterie du Cap Miné (qui avait si mal défendu la passe !) et les forts G (ou fort de la Betaïtra) et le fort H (route d’Anamakia).
Ces deux derniers ouvrages, magnifiques mais laissés à l’abandon, mériteraient d’être dégagés et mis en valeur : ils font partie du patrimoine d’Antsiranana et à ce titre, sont pour la ville, une richesse culturelle et touristique.
Suzanne Reutt

 

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