Le prince Louis de Monaco vient d'être nommé caporal honoraire du 1er régiment étranger, dont le dépôt est à Sidi-Bel-Abbès. Le souverain en a été avisé par le colonel commandant le régiment, dans lequel il a servi. On sait que le prince Louis, qui est général de l'armée française, fit presque toute sa carrière militaire dans nos troupes d'Afrique.
Au mois de mars dernier, il fut invité à assister aux diverses cérémonies qui furent organisées à Sidi-Bél-Abbès à l'occasion du centenaire de la fondation de la légion étrangère. C'est à la suite de ces fêtes que le colonel du 1er régiment étranger vient d'envoyer les galons de caporal honoraire au prince Louis.
De son côté, le souverain, par une ordonnance promulguée hier au Journal officiel de la principauté, vient de nommer grand officier de l'ordre de Saint-Charles le général de brigade Paul-Frédéric Rollet, inspecteur de la Légion étrangère à Sidi-Bel-Abbès.
Après avoir été à la peine pendant un siècle, tous les enfants de l'Europe, sinon du Monde, qui ont servi dans la Légion, sous les plis du drapeau tricolore et dont beaucoup dorment leur dernier sommeil, vont enfin être à l'honneur.
Nous avons déjà décrit le Monument aux Morts de la Légion dont la masse imposante se dresse dans la cour de la Caserne Viennot, face à la grille d'entrée. Ensemble harmonieux et d'un remarquable effet artistique, dont les légionnaires sont fiers parce qu'il est leur œuvre et qu'il symbolise leurs sacrifices et leur fidélité.
Au matin du 30 avril, un immense voile tricolore recouvrait le monument. Un gai et tiède soleil de printemps brillait dans le ciel promettant une heureuse journée. Dans la cour, les troupes, baïonnette au canon, se massent clans le fond et sur le bas-côtés de la sculpture. D'autres troupes sur deux rangs forment une double haie jusqu'à la grille d'entrée.
Il y a là tout le 1er Régiment Étranger, puis les importants détachements du 2e, 3e et 4e. La musique du 1er s'est massée à gauche du monument. Les premières, les nombreuses délégations d'anciens légionnaires se présentent avec leurs drapeaux et se groupent dans l'allée centrale. Puis, viennent ensuite de nombreux délégués de Sociétés d'anciens militaires, d'associations locales, de fonctionnaires, de conseillers municipaux et généraux, de conseillers d'arrondissement, le Conseil général d'Oran, de Tlemcen, de Mascara ; le Barreau en robe ; le clergé dont Mgr Bollon, évêque d'Alger et Mgr Durand, évêque d'Oran, de nombreuses sections de la Croix-Rouge, de l'U.F.F., etc...
Parmi les personnalités, citons encore, en nous excusant, vu leur nombre, d'en omettre quelques unes. MM. Galle, président des Délégations Financières; Menudier, maire d'Oran, et ses adjoints ; Brière, Parés, député ; Marlier, préfet ; Fouque, président du Tribunal de Commerce ; presque tous les Maires et de nombreux adjoints et conseillers du département.
Rassemblés au pied du Monument, on remarque de nombreux généraux en grande tenue et revêtus de leurs insignes et, au premier rang, les officiers généraux délégués étrangers qui ont tous appartenu à la Légion : le brigadier général Stanley Ford, attaché militaire américain; le colonel Szarvas, de l'armée roumaine ; le capitaine Godrington et le colonel Etheron, de l'armée anglaise ; le colonel Kosik et le commandant Preminger, de l'armée Tchécoslovaque.
Mais voici qu'un commandement vient de se faire entendre. Toutes les troupes, avec un ensemble parfait présentent les armes tandis que résonne la sonnerie « Aux Champs », que le Gouverneur Général, le Maréchal Franchet-d'Espérey, suivis de leurs chefs de Cabinet et d'officiers d'ordonnance, apparaissent à l'entrée de la cour et viennent, au milieu des acclamations, se placer au pied du Monument.
A ce moment, six avions du centre de La Sénia, auxquels se sont joints deux appareils venus de Colomb-Béchar, passent et repassent rapidement dans l'azur étincelant.
Une tribune tricolore a été aménagée à gauche du monument. Le premier, le colonel en retraite Forey, qui fut l'âme de ces réjouissances, y monte et, au nom de tous ses collaborateurs, grands et petits, de toute la Légion, adresse ses remerciements à ceux.' qui ont répondu à son appel, en particulier au Gouverneur Général et au Maréchal Franchet d'Espérey.
Puis il rappelle que ce fut le général Rollet qui eut l'idée d'élever un Monument aux
Morts de la Légion. Enfin, il expose par quels moyens le Comité parvint à accomplir la mission sacrée qui lui avait été confiée.
Au milieu des applaudissements, le premier orateur cède maintenant la place au colonel Nicolas, commandant le 1er Régiment Étranger. Celui-ci remercie tous ceux qui ont permis, par leur dévouement, l'édification du Monument, puis, en termes vibrants d'émotion narre l'épisode du combat de Camerone, dont la date a été choisie pour la célébration du centenaire. Une longue acclamation accueille cette péroraison.
C'est maintenant à M. Maurer, président de l'Union des Sociétés d'anciens légionnaires de France et de l'étranger, d'exprimer sa profonde gratitude au général Rollet et au colonel Forey.
« Combien il serait désirable, s'écrie-t-il, que toutes les mères, épouses et sœurs françaises sachent que ceux que nous honorons aujourd'hui ont droit à leur reconnaissance, puisque le sang versé si généreusement par ces nobles parias leur ont épargné tant de larmes et de deuils. »
« ...La France, ajoute-t-il, pas plus dans la vie que dans la mort, ne fait de différence entre ceux qui sont nés sur son propre sol et les étrangers accourus pour combattre sous les plis de son glorieux drapeau ! Tous sont égaux et tous sont honorés avec la même piété, puisque tous ont également bien mérité de la Patrie. »
Quatrième orateur, M. Valleur, maire de Tlemcen et vice-président du Conseil général d'Oran, excuse M. Saurin, empêché, puis apporte à la Légion l'hommage admiratif du Corps élu qu'il représente.
M. le Maréchal Franchet-d'Espérey lui succède et termine son discours longuement applaudi par ces mots :
« Honneur et fidélité fut la devise offerte à tous ces hommes. Partout la Légion a répondu « Présent » et sur les traces de ses pas vainqueurs, le soleil ne se couche pas. La gloire de ce corps illustre suffit, dans le coeur des siens, à remplacer l'image de la Patrie perdue. La Légion a conquis, dans les rangs de l'armée nationale, une place de choix. Troupe étrangère sous le drapeau français, son aîné, elle est devenue française. L'esprit de la Légion ne mourra pas ! »
Avant de terminer, le Maréchal, chaleureusement applaudi, donne lecture d'un télégramme de M. Maginot qui s'associe au nom de l'Armée française à l'hommage rendu aux glorieux morts de la Légion étrangère.
C'est à M. Carde que fut dévolu le soin de compléter ces nobles harangues.
En termes excellents, empreints d'émotion, le Gouverneur Général brosse un prestigieux tableau de l’œuvre accomplie par les légionnaires pendant un siècle puis termina en évoquant la Grande Guerre :
« Lorsqu'en 1914, à l'appel de la Patrie en danger, nous vîmes nos splendides régiments d'Afrique se jeter dans un élan sublime au combat pour barrer la route à un ennemi plein de superbe et de jactance, ne le trouvions-nous pas dans nos zouaves et nos chasseurs d'Afrique, les vertus de nos vieux légionnaires, qui, par une sorte d'atavisme, renaissent en nos soldats algériens de la Grande Guerre, démontrant ainsi à l'Univers étonné, que les enfants de l'Algérie savaient, comme leurs pères, vaincre et mourir. »
Les troupes se retirent pour défiler devant le Monument aux accents entraînants de la « Marche de la Légion ». Défilé impeccable. En tête marche martialement le général Rollet, suivi des 1er, 2e, 3e et 4e étrangers précédés de leurs officiers. On remarque tout particulièrement les sapeurs de la Légion vêtus du long tablier blanc et portant la hache. En arrivant à la hauteur du monument, les officiers, d'un geste large, saluent de l'épée. Le Gouverneur Général et le Maréchal félicitent ensuite chaudement le général Rollet pour la belle tenue de ses troupes.
Après la cérémonie, M. Carde se rend à l’École d'Agriculture pour la visiter. Au seuil de l’établissement, il est reçu par M. Brémond, directeur qui le pilote dans les différentes salles.
Mais l'heure du banquet officiel offert par la Légion approche. Près de quatre cents convives se trouvent réunis dans le cadre verdoyant des glacis ou se trouve le garage Falcon dans lequel aura lieu le banquet.
A la droite du Gouverneur Général, qui préside, prennent place : le Maréchal Franchet-d'Espérey et M. Biière, député ; à sa gauche, le Prince de Monaco et M. Parés, député. Remarqués, en outre, toutes les personnalités et autorités civiles et militaires déjà citées.
Avec sa façade pourpre et sa salle ornée de fleurs, de plantes vertes et d'oriflammes, le garage transformé en réfectoire, offre un aspect enchanteur qui fait honneur aux organisateurs. Dehors, par les larges portes vitrées l'on aperçoit la fraîche verdure de la promenade du Ruisseau.
Au Champagne, le Général Rollet vivement acclamé se lève pour prendre la parole.
D'une voix mâle et vibrante, il dit sa gratitude à tous ceux qui ont bien voulu honorer de leur présence les Fêtes du Centenaire de la Légion dont il salue les délégations venues, au nombre de 27 de différents pays. Il exprime sa joie en recevant de nombreux télégrammes des légionnaires de l'active en détachement au Tonkin. en Indo-Chine, dans le Levant, au Maroc en Tunisie, sur les contins du Sahara.
« J'ai l'honneur, le droit et le devoir dit-il de crié bien haut ma fierté d'être légionnaire et, aujourd'hui, le premier d'entre eux…
Je lève mon verre à la France que les légionnaires ont servie et serviront toujours avec honneur et fidélité. »
Après ces paroles couvertes d'applaudissements, la « Marche de la Légion » est exécutée par des musiciens du 2e étranger qui ne cessèrent sous la direction de M. Giaccardi, et durant tout le repas, de se faire entendre dans des morceaux et dans des chants en français et en allemand d'une remarquable exécution.
Puis un représentant des volontaires étrangers de là Grande Guerre rappelle que 45.000 d'entre eux; accoururent pour défendre notre pays dans les rangs de la Légion…
M. Maurer, président des Anciens Légionnaires, expose la genèse du groupement qu'il a l'honneur de représenter.
« La Légion, précisa-t-il, c'est la Démocratie avant la lettre ».
M. Bellat, maire de Bel-Abbès, exprime toute la reconnaissance de la ville pour les légionnaires qui ont fondé cette cité actuellement en pleine prospérité.
M. Carde enfin brosse un prestigieux tableau de l’œuvre à la fois guerrière et colonisatrice accomplie par la Légion depuis un siècle.
Il remonte même à l'origine des Corps étrangers qui combattirent sous les ordres de nos rois. Il rappelle les mercenaires de l'Helvétie, les régiments Irlandais de Fontenoy, les heures vibrantes de la Révolution de 17S9, du Consulat et du 1er Empire, les légions Batave, Germanique, Suisse, Italienne, Irlandaise, Hellénique, les lanciers de Poniatowsky et le régiment de Hohenlohe.
Il ressuscite également, la prise d'Alger, l'émir Abdelkader, les combats de Sidi-Chabal, de la Macta, d'Arzew et Mostaganem, Miliana où les légionnaires perdirent 462 hommes sur un effectif de 750 unités. De là il passe à la Crimée, au Sud Oranais et plus récemment à l'échauffourée du Djihani (1929) où un peloton de légionnaires complètement encerclé tint pendant quatre heures, après avoir perdu les 23 de ses hommes.
En achevant, son exposé, écouté religieusement par tous, M. le Gouverneur Général dit quelle dette de reconnaissance l'Algérie a contracté envers la Légion.
Le Gouverneur Général de l'Algérie et le maréchal Franchet d'Espérey ont présidé les fêtes du Centenaire de la Légion Étrangère. Dans son discours, M. Carde a notamment prononcé les paroles suivantes :
« D'autres, avant moi, ont dit ce que fit en Espagne ce Corps admirable, au temps des guerres carlistes, en Crimée, en Italie, au Mexique, en France, aux heures sombres de 1870-71, aux armées de la Loire et de l'Est, au Tonkin, au Dahomey et au Maroc, ainsi qu'au cours de la grande tourmente de 1914-1918. Vous permettrez au Gouverneur Général actuel de l'Algérie qui, au cours de sa carrière coloniale, eut l'honneur de servir à Madagascar sous les ordres directs du Maréchal Galliéni et y vit personnellement œuvrer ces soldats d'élite, de rappeler que leur endurance et leur esprit de sacrifice furent tels, durant la conquête de la Grande île, qu'un Médecin-chef pouvait prononcer ces mots, légendaires depuis : « quand un troupier de France entre à l'hôpital c'est pour être rapatrié ; un tirailleur, c'est pour guérir ; nn légionnaire, c'est pour mourir » et que, le Maréchal Galliéni, écrivant pour demander qu'on lui envoyât 600 Légionnaires, disait : « Les effectifs actuellement présents dans l'Ile, mieux employés, me paraissent suffisants. Toutefois, je demanderai 600 hommes de la Légion Étrangère afin de pouvoir, le cas échéant, mourir convenablement».
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Le programme chargé des fêtes du centenaire de la Légion étrangère avait aussi prévu la célébration d'un service religieux à la mémoire des Légionnaires morts au service de la France.
Ce service fut célébré le jeudi 30 avril à 10 heures 30 du matin en l’Église Saint Vincent de Sidi-bel-Abbès, sous la présidence effective de Mgr Durand, évêque d'Oran.
Bien avant l'heure fixée notre coquette et vaste église était comble. Pour éviter l'inévitable cohue, des cartes avaient été distribuées aux officiels ainsi qu'aux principaux membres du bureau de chaque association religieuse ou société mutuelle.
Malgré cette sélection obligatoire, en raison du grand nombre de visiteurs que nous valaient les fêtes imposantes du centenaire, une foule compacte se pressait dans les moindres coins el recoins de l'église, et lorsque l'officiant monta à l'autel il aurait été bien difficile de trouver la moindre place. ,
L'église était artistement décorée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Une profusion de drapeaux tricolores étaient suspendus aux murs et des flots de lumière se reflétaient en tous sens dus à des centaines d'ampoules électriques.
C’est dans ce merveilleux et flatteur décor que Mgr Bollon, protocolaire apostolique, monta en chaire à l’Évangile. Tout de suite il exhorta la gloire des héros célèbres ou obscurs de cette belle arme qu’est la Légion étrangère. « Oui s’écria-t-il, il m’appartient de vous dire pourquoi l’église, la plus tendre et la moins oublieuse des mère, se fait un devoir aujourd’hui de les bercer dans leurs tombeaux.»…
Et pendant une demi-heure Mgr Bollon développa avec le talent qu’on lui connaît ces deux pensées de circonstance :
Que doit l’église à la Légion Étrangère ? Comment entend-elle payer sa dette ? Et l'orateur de terminer par cette splendide péroraison qui émut profondément l'assistance :
« Pour nous, catholiques, la mort n’est pas une porte ouverte sur le néant mais sur 1éternelle vie. Nous avons non seulement l'espoir, mais la certitude qu’aux fidèles la mort n'enlève pas la vie, mais qu'elle la change. Nous savons en outre que nous pouvons être utiles aux âmes par nos prières et nos sacrifices. Certaines d'entre elles ont peut-être emporté de ce monde quelques rouilles du corps, selon l'expression de Victor Hugo, il est en notre pouvoir de leur rendre tout l'éclat exigé pour les soldats de la céleste armée triomphante. Voilà pourquoi après avoir dit tout à l'heure : Gloire aux morts de la Légion ! Vous êtes venus dire ici aux pieds du Juge suprême : Paix éternelle aux morts de la Légion ! Cette démarche vous fait grand honneur, mes frères, et vous pouvez être assurés qu'en ce moment, Là-haut, il y a bien des yeux qui vous sourient, bien des mains qui vous bénissent, bien des lèvres qui vous remercient ».
Pendant toute la durée de la le messe, l'orchestre à cordes de la Légion se fit entendre dans des morceaux pieux et bien rendus.
La sortie s'effectua sans bousculade, un service d'ordre ayant été assuré parfaitement par nos chers scouts de France lesquels eurent pour mission de canaliser la foule et aussi de rendre les honneurs aux on nombreux personnages officiels présents.
Dans l'assistance nous avons pu noter au hasard du stylo : M. le Sous-préfet représentant M. le Gouverneur Général Cardes qui visitait à la même heure l'école d'agriculture, le Maréchal Franchet d'Espérey représentant le Ministre de la guerre, la plupart des conseillers municipaux ayant à leur tête M. Barisien remplaçant M. Bellat, Maire de Sidi-bel-Abbès, qui se trouvait à ce moment au côté de M. le Gouverneur Général... plusieurs généraux qu'escortaient un nombre imposant d'officiers etc..
De cette touchante cérémonie qui fait honneur au talent d'organisateur de notre cher curé doyen M. Julia, les privilégiés qui purent y assister emportèrent le souvenir le plus ému et le plus reconnaissant.
Nous nous excusons auprès de tous de ce pâle compte-rendu si incomplet d'ailleurs. « L'écho catholique bel-abbèsien » organe paroissial qu'on peut se procurer en écrivant à M. le curé, donnera un rapport circonstancié et en même temps l'allocution in-extenso de Mgr Bollon.
P. C.
A Sidi-Bel-Abbès, dans l'Oranie, ont débarqué, ces jours derniers, des détachements des cinq régiments d'infanterie et du régiment de cavalerie de la légion étrangère. Ces délégations, venues du Levant, d'Indochine, du Maroc, de Tunisie, assistent actuellement aux fêtes du centenaire de cette arme d'élite.
Et les anciens légionnaires sont venus nombreux participer à cette cérémonie du souvenir, qu'organisa avec soin le général Rollet, ancien commandant du ler étranger, premier général chargé du commandement de tous les régiments de la légion.
Le monument aux morts de la légion, construit en marbre sur une assise de granit, est édifié dans la cour du quartier Vienot - Vienot, un des colonels du 1er étranger, fut tué au siège de Sébastopol - un globe en bronze rappelle que les légionnaires venus des pays les plus divers se sont battus glorieusement sur tous les continents pour la grandeur de la France, que volontairement ils venaient servir.
Quatre légionnaires de bronze, vêtus des uniformes de la création, c'est-à dire de la conquête de l'Algérie, des campagnes coloniales, de la guerre de 1914-1918, montent la faction devant les plaques dorées où sont inscrits les pays où se battit la légion.
Oeuvre du sculpteur Ch.-H. Pourquet, le monument, sobre de lignes, parfaitement exécuté, rappelle le sacrifice des milliers d'étrangers qui, anonymement, vinrent à Bel-Abbès « en prendre pour cinq ans » et, un peu partout, en Algérie, au Mexique, en Crimée, en Italie, en Allemagne, à Madagascar, en Chine, au Tonkin, en Tunisie, au Maroc, en Syrie, en France, tombèrent pour ne plus se relever.
Le drapeau de la légion porte sur ses plis, inscrite en lettres d'or, cette devise : « Valeur et discipline.» Les légionnaires de 1931 ont conservé les traditions de leurs aînés, et cela malgré toutes les campagnes entreprises pour les détourner de leurs devoirs de soldat. Arrivés à Bel-Apbès, dans la cour du quartier Vienot, Allemands Russes, Belges, Italiens, Norvégiens, Anglais, etc., oublient leur première nationalité ils ne sont plus que des légionnaires. Des hommes que conduisent des hommes.
Et cela, ils ne l'oublient jamais.
A Ain-Sefra, il y a quelques années, une troupe ambulante était venue donner des représentations. Parmi les artistes, un colosse se faisait remarquer par son numéro de « briseur de chaînes ». C'était l'as de la troupe et l'imprésario le payait fort cher. La veille du départ des artistes, le détachement de la légion étrangère, en garnison à Aïn-Sefra, ayant organisé une retraite aux flambeaux, la clique, clairons, fifres, tambours passa devant la baraque foraine en jouant la marche de la légion.
Le « briseur de chaînes écouta avec une émotion qu'il ne parvint pas à dissimuler. Le lendemain, abandonnant sa situation de vedette, il se présentait à la caserne de la légion et contractait un rengagement de cinq ans. Ancien légionnaire, repris par la nostalgie de la vie passée, il n'avait pu résister à l'appel du vieux refrain de son arme.
Et les exemples de légionnaires revenus, après quelques années de vie civile à Sidi-Bel-Abbès, sont nombreux, si nombreux que les effectifs des régiments étrangers ont atteint un chiffre qui dépasse toutes les prévisions.
Édouard Mac.