19310501 - L'inauguration du monument destiné à commémorer le centenaire de la Légion étrangère.

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19310501 - L'apothéose de la Légion étrangère.

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Hier, à Bel Abbès, a eu lieu la grandiose cérémonie de l'inauguration du monument du Centenaire.

M. Carde, Gouverneur général de l'Algérie, le maréchal Franchet d'Espérey et de nombreux orateurs ont célébrés la gloire des héroïques soldats.

193105 - Le Centenaire de la Légion étrangère.

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La Légion étrangère a célébré le jeudi 30 avril le centenaire de sa création. A cette occasion a été inauguré à Sidi-Bel-Abbès un monument élevé à la mémoire des héros de la Légion morts aux quatre coins du monde, au service de la France.

Y assistaient: les vingt-sept délégations des sociétés d'anciens légionnaires de France, des colonies et de l'étranger, avec leurs drapeaux; les délégués de nombreuses sociétés d'anciens militaires, de nombreux généraux, parmi lesquels le général Guillaumat, le général prince de Monaco, le brigadier général Stanley Ford, attaché militaire américain, de nombreux officiers étrangers et les personnalités civiles et religieuses du département.

Le gouverneur général Carde et le maréchal Franchet d'Espérey, tous deux en grande tenue officielle, présidaient la cérémonie.

Ils firent leur entrée dans la cour de la caserne de la Légion étrangère où se trouve le monument.

On entendit successivement le colonel Poley, président du comité du monument, le colonel Nicolas, commandant le 1er étranger; M. Maurer, président de l'Union des Sociétés d'anciens légionnaires; M. Valleur, vice-président du conseil général d'Oran; le maréchal Franchet d'Espérey, représentant le ministre de la Guerre, qui dit notamment :

M. Maginot a voulu que son délégué proclamât la gloire des enfants d'adoption de la France. C'est une oeuvre toute française que celle de la Légion, car, à tous ces hommes venus des pays les plus divers, la France offrait un nouvel idéal : l'amour des armes et 1'orgueil de servir. « Honneur et fidélité » fut la devise offerte à tous ces hommes. Partout la Légion a répondu « présent », et,  sur les traces de ses pas vainqueurs, le soleil ne se couche pas. La gloire de ce corps illustre suffit, dans le cœur des siens, à remplacer l'image de la patrie perdue.

M. Carde gouverneur général, termina la série des discours : Sur cette terre, dit-il, où se lève une France nouvelle, quelles sont les oeuvres auxquelles, en véritables émules de leurs ancêtres, les légionnaires de Rome, les légionnaires de France, n'ont point apporté l'appui de leurs bras, de leur ténacité et de leur vertu?

Infatigables, ils furent de toutes les tâches et des entreprises les plus fécondes.

Le maréchal Franchet d'Espérey donna alors lecture d'un télégramme du ministre de la Guerre ainsi conçu: J'associe l'armée entière aux fêtes du centenaire de la Légion, commémorant l'héroïsme de ses morts, les brillants faits d'armes de ses régiments, son intrépidité légendaire.

Je salue ses glorieux drapeaux.

Ce message a été adressé à toutes les unités de la Légion stationnées en Afrique du Nord, au Levant et en Indo-Chine.

En Alsace on a suivi avec intérêt les solennités de ce Centenaire. Cette province n'a-t-elle pas, pendant l'annexion, fourni un très important contingent de légionnaires ?

Ne voulant s'accommoder au casque à pointe et ne pouvant porter le pantalon rouge, des milliers d'Alsaciens ont servi jusqu'en 1918 dans les régiments de la Légion, troupe d'élite, qui s'est couverte de gloire et qui a puissamment contribué à la création de l'empire colonial français.

Les Allemands n'ont cessé de calomnier la Légion. Ils ont répandu sur ses manières de recrutement, sur la discipline qui y règne nécessairement, les plus absurdes mensonges, crus, par beaucoup.

A l'occasion du centenaire de cette troupe les nationalistes d'outre-Rhin ont ranimé leur campagne malveillante. Mais, en Allemagne même, des hommes se sont levés pour dire aux disciples des Hugenberg et Hitler:
— « Vous mentez I Jamais la France n'a eu besoin de dépenser un sou pour entretenir des recruteurs pour la Légion étrangère. Si aujourd'hui l'Allemagne fournit, parmi tous les peuples, le plus grand nombre de soldats à ce corps, ce fait n'est dû qu'à deux facteurs: la misère ou la soif d'aventure. »

Chez les Alsaciens, nous l'avons vu, c'était, du temps de l'annexion, l'horreur de la caserne allemande qui les poussait vers la Légion. Et ceux qui y ont servi, n'en sont pas peu fiers.

Une délégation d'anciens légionnaires alsaciens s'est d'ailleurs rendue à Sidi-Bel-Abbès avec le drapeau tricolore des légionnaires mulhousiens, que les autorités allemandes avaient cherché à confisquer, mais qu'ils n'avaient jamais pu trouver.

 

 

193105 - Le centenaire de la Légion étrangère.

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19310430 - Fêtes du Centenaire de la Légion étrangère à Sidi Bel Abbès.

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19310429 - Le Centenaire de la Légion étrangère.

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19310428 - Un Glorieux Centenaire.

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19310428 - La Légion.

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A NOS LECTEURS

Dans deux jours, la Légion Étrangère inaugurera le Monument élevé par les Légionnaires à leurs morts, tombés au cours des Cent années d'une existence de bravoure et d'abnégation.

Caserne Viénot, Sidi-Bel-Abbès 30 Avril.

Pouvait-on trouver cadre plus vivant que Bel-Abbés, berceau de la Légion, nom évocateur entre tous ?

Pouvait-on trouver date plus héroïque que celle de l'anniversaire du combat de Camerone (Mexique 1863) où, pendant neuf heures, sous un ciel de feu, 62 légionnaires, commandés : par 3 officiers, forcèrent l'admiration de 1.800 Mexicains ?

Notre ville a le droit de s'enorgueillir d'un tel honneur et le devoir de s'associer à l'hommage rendu à ceux qui, héros obscurs et inconnus, ont versé leur sang pour une plus grande France

Dans notre humble sphère nous avons cherché à participer à ce tribut de reconnaissance et consacrons notre numéro d'aujourd'hui à l’œuvre valeureuse de la Légion Étrangère.

Puisse cette modeste collaboration être appréciée de nos lecteurs et valoir à « notre Légion le respect et l'admiration auxquels elle a droit.

LA LÉGION

SA CRÉATION

C'est en vertu de la loi du 9 mars 1831 que fut formée la légion étrangère qui devait être constituée au moyen d'engagés volontaires étrangers. La durée des engagements y était de trois années au moins et de cinq au plus avec possibilité de rengagement. Pour être admis à y entrer, il fallait être âgé de plus de 18 ans et de moins de 40 ans.

Des Suisses, provenant des régiments de la Garde royale et des soldats étrangers provenant du régiment de Hohenlohe, lesquels, n'étant pas naturalisés français, n'avaient pas trouvé à servir dans d'autres corps, formèrent le premier noyau de légionnaires.

Mais bientôt vinrent s'enrôler des Espagnols et des Italiens, qui cherchaient une protection hospitalière contre les persécutions politiques, de nombreux Belges, des Allemands des provinces rhénanes qui regrettaient d'avoir été séparés de la France à la suite des traités de Vienne, des Polonais compromis dans la révolution de Varsovie, enfin des soldats des diverses armées européennes. Au 1er octobre 1832, le nombre des engagés volontaires s'élevait déjà à 5.538.

La légion étrangère fut primitivement formée à sept bataillons de huit compagnies du centre, comptant 112 hommes chacune (les compagnies d'élite ne devaient être créées que l'année suivante) et placées sous les ordres du colonel, baron Stoffel, ancien colonel commandant du régiment de Hohenlohe.

A peine leur organisation terminée, ces bataillons furent mis en marche sur Toulon. Et à la fin d'août 1831, les 1er, 2e, 3e, 5e et 7e bataillons embarquaient pour Alger tandis que le 4e Bataillon faisait voile sur Oran et le 6e bataillon sur Bône.

Avant son départ pour l'Algérie, chaque légionnaire avait reçu l'équipement suivant : un pantalon garance tombant droit sur le pied ; un habit bleu de roi boutonnant sur la poitrine, une capote en drap gris de fer à deux rangées de boutons, un képi de turban garance, bandeau et passepoils bleus, une paire de guêtres en drap bleu foncé avec boutons doubles aux sous-pieds; un col d'ordonnance; un équipement complet en buffle blanc et un étui en toile bleue à raies blanches pour y mettre l'habit. Ainsi qu'on le voit, l'uniforme du légionnaire différait fort peu de celui du fantassin d'un régiment de ligne. Cependant, sur les boutons de cuivre étaient gravés ces mots : Légion étrangère.

A la suite de son débarquement en Algérie, la légion étrangère vécut sous la tente, de la vie des camps. Si, grâce aux officiers et aux sous officiers provenant des régiments suisses et du régiment de Hohenlohe, la légion étrangère avait été organisée en moins de quatre mois, son organisation, à vrai dire, laissait encore fortement à désirer.

On avait commis l'erreur de grouper par compagnies les légionnaires de même nationalité, ce qui facilitait le commandement, mais donnait lieu à de fréquentes rixes entre compagnies voisines, le nationalisme survivant, au cœur de l'homme, par delà les frontières et même par delà les mers. Il fallût attendre le mois de janvier 1832 pour voir enfin l'ordre régner dans la légion étrangère.

Le 1er avril 1832, le colonel Stoflel ayant atteint l'âge de la retraite il fut remplacé dans son commandement par le colonel Combes. Par ordonnance royale du 9 novembre 1831, le roi Louis-Philippe avait donné un drapeau à la légion et le colonel Combes débarqua à Alger, le 24 juin 1832, apportant avec lui l'emblème tricolore.

Le premier drapeau de la légion étrangère portait, brodées dans ses plis, ces deux inscriptions : « Le Roi des Français à la légion étrangère » et « Honneur et Patrie ». Sa hampe n'était pas surmontée du coq gaulois, comme celles des autres drapeaux, et ne portait pas de cravate. Le colonel Combes remit l'emblème aux troupes, au cours d'une grande revue passée au camp de la Kouba.

Par la suite, cette inscription ayant été jugée impropre à s'appliquer à la légion fut modifiée et remplacée par « Honneur et Fidélité ». C'est cette dernière inscription que porte encore aujourd’hui le drapeau de la légion étrangère.

SON ŒUVRE

La légion étrangère avait déjà reçu le baptême du feu. Le 27 avril 1832, le 3e bataillon avait pris part à une « razzia » organisée contre la tribu d'El Ouftia et les légionnaires avaient montré beaucoup d'ardeur au cours de ce combat. Mais la première affaire sérieuse à laquelle ait participé la légion fut celle de Sidi-Chabal, le 11 novembre 1832. Mahdi-ed-Din, accompagné d'Abd-el-Kader, s'était présenté devant Oran avec 3.000 cavaliers et 1.000 fantassins.

Le général Boyer, qui commandait les troupes françaises, déploya sa colonne, les chasseurs d'Afrique, à droite, le 66e d'infanterie appuyé par l'artillerie au centre, et à gauche les chasseurs non montés et le 4e bataillon de la légion, composé d'Espagnols.

Dès que les boulets français eurent jeté le désordre parmi les cavaliers arabes, le 66e et la légion, avec un magnifique élan, se ruèrent sur l'ennemi. Tandis que les cavaliers d'Abd-el-Kader s'enfuyaient au galop, les fantassins arabes, se laissant acculer à un ravin, perdaient 63 tués et 146 blessés.

L'épopée continue — De parcourir l'Afrique du Nord en tous sens l'espace semble moindre et, prenant ses ailes, la Légion part en Crimée, puis en Italie, puis au Mexique. L'Asie, l'Europe et l'Amérique sont les terrains nécessaires à ses pérégrinations glorieuses.

Le colonel Vienot à la bataille de l'Alma, et le lieutenant Saussier, dans les tranchées de la Quarantaine, sont les dignes chefs des bataillons qui s'illustrent dans le cours de cette bataille célèbre et dans la stoïque défense de ces tranchées.

La Légion quitte la Crimée sitôt la campagne finie et, pour se reposer, elle parcourt la Kabylie dont-la conquête marche bon train. A côté des célèbres faits d'armes de Boghni, d'Ikhouchelen, d’Icheriden où l'intrépidité des légionnaires fait merveille, il est donné de voir le capitaine Saussier arracher des mains des Kabyles un soldat blessé et, sur le même champ de bataille, le caporal Van Leyen, décoré pour avoir sauvé le capitaine des mains des Kabyles- qui l'entraînaient.

Puis, c'est 1859 et la campagne d'Italie. Aux cotés du 2e Zouaves qui pour son héroïque conduite, mérite de voir son drapeau décoré par l'Empereur; la Légion combat brillamment à Magenta.

La campagne est courte. La Légion revient en Oranie, participe aux colonnes contre les Beni-Snassen et, sous les ordres du général Martimprey, elle va faire partie de l'expédition décidée contre le Maroc, lorsque une épidémie de choléra décime le corps expéditionnaire et fait ajourner l'exécution du plan militaire.

De 1863 à 1868, la Légion prend part à la funeste expédition du Mexique. Là se place, entre maints faits d'armes émouvants, l'héroïque défense des hangars de Camerone. On ne peut lire le rapport simple et grandiose couché par les survivants sur le vieux registre de campagne du 1er Étranger sans une poignante émotion.

Pendant neuf heures consécutives, dans un hangar mal fermé, organisé à la hâte, 62 légionnaires résistèrent à 1 800 Mexicains auxquels ils mettent 500 hommes hors de combat.

Si cette conduite est belle, lorsqu'elle a pour but immédiat de sauver sa propre vie en se défendant crânement, elle ne l’est pas moins lorsqu'un bataillon, sac au dos, fait, en 32 heures, 120 kilomètres pour secourir des camarades qui succombent. Ce raid sans pareil fut accompli par le bataillon Saussier sur Monterey (Mexique).

Puis la Légion revient en Algérie et le Sud-Oranais lui fournit encore une belle carrière. Elle poursuit les Oulad-Sidï-Cheik, rebelles lorsque la France, succombant, fait appel à toutes ses ressources. La Légion forme un bataillon qui combat victorieusement sous les ordres du commandant Arago, au faubourg Bannier, à Orléans, se fait hacher à Coulmiers, se bat héroïquement à Cercotte, Monbéliard et donne enfin à la terre française continentale, d'où le décret de 1831 avait voulu l'exclure à jamais, le meilleur de son sang.

De retour en Algérie, les survivants du bataillon de marche rejoignent les colonnes qui répriment l'insurrection en Kabylie et dans le Sud-Oranais.

En 1881, la Légion opère contre Bou-Amama et guerroie ainsi jusqu'en 1883. Elle part alors avec les tirailleurs algériens et l'infanterie de marine et va participer à la conquête et à la colonisation du Tonkin. Miliana et Camerone ont une troisième édition à Tuyen-Quan où, pendant 26 jours, 390 légionnaires et 6 officiers, avec une compagnie annamite, résistent victorieusement à une attaque furieuse de 20 000 Chinois.

Depuis cette époque, la Légion a concouru à toutes les expéditions contre les pirates dans la région montagneuse, elle a élevé des postes, tracé des routes pendant les répits qui lui étaient donnés.

Elle a occupé, depuis 1886, toute la région ouverte du Tonkin-Laoki. Elle a construit des postes sur la haute rivière Claire, le fleuve Rouge et la rivière Noire pour chasser les pirates, elle a enfin élevé des constructions et assuré de façon normale la pacification de ces régions.

Depuis cette époque, les contingents tonkinois de la Légion sont périodiquement renouvelés par des envois des régiments stationnés en Algérie.

Et cependant, depuis 1892, aussi bien au Dahomey qu'au Soudan et qu'à Madagascar, la Légion, n'a pas cessé d'envoyer ses bataillons et de se couvrir de gloire.

A Dogba et Karra au Dahomey, à Trinaïnoudry et Tananarive à Madagascar, à Taghit, à Zenaga, à Kenadsa à El-Moungar, à Berguent, à Taza, à Tissa où la 3e compagnie du 1er étranger, capitaine Rollet, ouvre à l'ouest de Fez la route de Zegolta, ce qui fait dire au général Gouraud : « Une fois de plus la Légion se distingue par ses travaux autant que par ses faits d'armes » la Légion est à l'honneur.

Puis ce sont les opérations chez les Beni-Mtir et les Béni Mguild.

Au Maroc Oriental, c'est le 1er Etranger qui, le 11 avril 1913, livre le combat de Nekhila où tombe glorieusement, face a l'ennemi, le capitaine Doreau et une dizaine de légionnaires qui se" sont fait tuer sur son corps.

Le 10 mai 1914, marche sur Taza des colonnes Baumgarten et Gouraud, le 16 elles font leur jonction et le 18 le Résident général Lyautey, salué par le drapeau décoré du 1er Étranger, passe une superbe revue dans la ville même.

Et nous voilà à la vaille de la guerre mondiale. La mobilisation générale est proclamée et, le 2 août 1914, la Légion s'embarque à Oran pour aller prendre part aux opérations en France.

Souain, en Champagne ; Belloye-en-Santerre; Auberive ; Cumières ; Laffaux, Hangard ; Ambleny, etc.. sont preuves vivantes que la Légion n'a pas déchu et que, si dans les autres corps français on sait vaincre, à la Légion on sait mourir.

Le 9 mai 1915 en Artois, au cours d'un assaut le clairon Theissen, monte sur une meule de paille, se met tout droit et donne la charge jusqu'au moment où il tombe.

Pendant l'attaque des « ouvrages blancs », l'adjudant Sedley mortellement frappé par un éclat d'obus, sort un carnet de sa poche, plonge un bout de bois dans sa blessure et écrit avec son sang : « Je meurs content, puisque nous sommes victorieux ! Vive la France ! »

A Belloy-en-Santerre, le sergent Telmini chef d'une section de mitrailleuses, a le bras emporté par un obus. Malgré cette horrible blessure il garde toute sa présence d'esprit, fait tirer sa pièce, mettre les hommes à l'abri et va ensuite se faire soigner.

Chargé de nettoyer une tranchée au nord du bois des bouleaux, le caporal Arrocas lance des grenades sans arrêt ne prenant pas le temps de se reposer, blessé, il continue et quand, au bout

de 36 heures, il s'arrête, c'est qu'en face de lui il ne reste plus d'ennemis.

C'est encore le légionnaire Giorne qui, au Combat d'Amblemy, a les jambes coupées et le bras droit emporté par un éclat d'obus. Il ne profère pas une plaine. Son capitaine arrive et ne peut cacher son émotion :

- Mon pauvre gosse, comme il t'ont arrangé !

- Mon capitaine, reprend-il, plus de pieds, plus de bras droit, mais il me reste encore le bras gauche, pour vous serrer la main et vous souhaiter bonne chance !»

Au médecin-major qui imbibe ses plaies de teinture d'iode il dit en souriant : « Cette fois, M. le Major, je suis exempt de service !»

Oh, j'entends bien les murmures des sceptiques, je vois le sourire serein des gens à l’esprit subtil, je perçois le haussement d'épaules de celui, de ceux qui songent qu'après tout ce sont des étrangers, bien des fois déserteurs, des gens sans foi qui portent la ceinture bleue sur la capote kaki.

Soit, mais pour leur répondre, voici qu'un homme de grand cœur, qui les connaît bien, le capitaine Borelli a pris la parole et s'est adressé à tous ces vagabonds, qui sont morts pour la France :

Sans honneur. Ah ! Passons ! Et sans foi ?

Qu’est ce à dire :

Que fallait-il de plus et qu'aurait-on voulu ?

N'avez-vous pas tenu, tenu jusqu'au martyre,

La parole donnée et le marché conclu ?

Mercenaires ? sans doute : il faut manger pour vivre,

Déserteurs ? Est-ce à nous de faire ce procès ?

Étrangers ? Soit. Après. Selon quel nouveau livre

Le Maréchal de Saxe était-il donc Français f

Et quand donc les Français voudront-ils bien entendre

Que la guerre se fait, dent pour dent, œil pour œil,

Et que ces étrangers qui sont morts, à tout prendre,

Chaque fois, en mourant, leur épargnait un deuil ?

Sidi-Bel-Abbès, berceau de la Légion

Sidi-Bel-Abbès ! Bel-Abbès comme on dit là-bas. Sur le papier, ces deux petits mots ne disent pas grand'chose.

Sur les atlas, sur les cartes, ils passent inaperçus. Et, pourtant, Bel-Abbès est la capitale d'un monde, d'un monde extraordinaire, où les mots de patrie, de frontières, de citoyens n'ont pas de sens, d'un monde sans nom. Bel-Abbès n'est pas la capitale d'un pays : c'est la capitale d'un drapeau : la capitale de la Légion.

Il y a quelques années — c'était au moment où le fameux Abd-el-Krim faisait des siennes — une compagnie de Légion quittait, au petit matin, le poste de Bab-Moroudj, au nord de Taza.

Après une avance relativement facile dans la vallée, la Légion fut brusquement arrêtée par le tir admirablement précis de quelques « salopards », au moment où elle gravissait les pentes du Djebel Amseft. Un vieux sergent de la Légion s'affaissa tout à coup, touché au ventre. Tandis qu'on le hissait péniblement sur un cacolet; le vaillant légionnaire, dans un sourire douloureux, trouva la force de parler, il n'y a pas d'êtres en chair et en os dans ce pavillon. Mais il y a une âme, l’âme de la Légion, le Drapeau.

La nuit comme le jour, un légionnaire monte la garde devant cette âme et devant les ombres des morts de la Légion.

Dans la salle d'honneur du 1er Étranger, il n'est nulle part question de patrie.

Sur les plis tricolores, on lit « Honneur et fidélité ». Ce drapeau n'est pas un symbole. C'est une fin en soi.

Ce drapeau, c'est leur patrie aux légionnaires, une patrie qui s'appellerait « Honneur et Fidélité ». C'est leur famille ; c'est aussi leur passé, un passé jeune qui remonte à la conquête de l'Algérie. La Légion, en effet, fut créée en 1831. Mais elle a mis les bouchées doubles. Pour s'en convaincre, il n'est, que de jeter un coup d’œil sur les murs de la salle d'honneur, sur ces photos, sur ces tableaux qui nous entraînent du Tonkin au Tchad, de Madagascar à Verdun, sur ces « pavillons noirs » annamites, sur ces sagaies sénégalaises, sur ces « bonzes » et ce fut pour dire : « Ah ! je le reverrai tout de même, mon Bel-Abbès. » Son Bel-Abbès !

Le Monument « La Légion à ses Morts » (vu de face)

Combien de braves, nés sous toutes les latitudes, parlant les langues les plus diverses, ont laissé échapper au moment de mourir les deux petits noms très chers : Bel-Abbès.

Car c'est vraiment leur Bel-Abbès ! C'est pour eux que Bugeaud a décidé

que se dresserait une ville sur l'emplacement du vieux douar des Beni-Atmer.

Ce sont eux qui ont jeté les fondations des premières maisons.

Aujourd'hui, Bel-Abbès est une grande ville, une ville riche comme; beaucoup de villes algériennes, une ville commerçante, comme tant d'autres. Mais elle est et restera toujours unique

au monde parce qu'elle est la ville de la Légion et des légionnaires.

Un spectacle étrange saisit le voyageur qui pénètre la nuit dans la ville.

A l'extrémité de la Grande-Rue, un pavillon situé dans" un minuscule jardin arrête le regard. Dans ce jardin, une sentinelle monte la garde. Nulle lumière dans le pavillon. .Aucune trace de vivant à l'intérieur. Et, en effet, Indochinois, sur ces « boukhalas » marocains, sur ces inausers allemands, dans cette atmosphère tout imprégnée de courage et de gloire, des noms gravés

sur le mur sautent aux yeux : Des braves parmi les braves.

Les campagnes calomnieuses déclenchées un peu partout, aux États-Unis, en Angleterre et même en Suisse, contre la Légion, ne réussiront pas à ternir l'auréole dont elle est entourée.

Le Monument « La Légion à ses Morts » (vu de côté)

Le Monument du Centenaire

Ce monument est en onyx.

La pierre provient de la carrière de Sidi-Hamza, à 75 kms de Bel-Abbès où, durant deux ans. les légionnaires ont extrait, tailler, poli les blocs destinés au monument.

Celui-ci offre l'aspect d'un tronc de pyramide irrégulier sur le sommet duquel repose la mappemonde terrestre.

Sur quatre socles placés aux angles, quatre légionnaires évoquent la Légion au cours de son siècle d'existence.

Le légionnaire de 1831, celui de l'Empire, le Colonial et celui de la dernière guerre montent la garde autour de la mappemonde sur laquelle sont dorées les régions où la Légion a combattu.

Pour l'Europe, c'est la France, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, la Turquie, la Russie.

Pour l'Asie : le Tonkin, l'Annam, le Cambodge, la Cochinchine, Formose.

Pour l'Afrique : l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, le Soudan, le Dahomey, Madagascar.

Pour l'Amérique : le Mexique.

Les légionnaires ont 3 mètres de haut, le monument, 6.

Une des grandes faces porte l'inscription : La Légion à ses Morts 1831 — 1931

Quelques amis de la Légion ont apporté leur obole à l'édification mais aucune aide n'a été demandée.

Ce monument a été construit pour les Légionnaires et par eux.

Il leur appartient.

Son but n'est pas d'embellir une cité.

Il est destiné a être le symbole de la troupe qui donne asile à ceux qui ont besoin d'un refuge et à perpétuelle souvenir de ceux qui sont tombés, pour la gloire de la Légion.

Autour du Centenaire

Bienvenue

L'inauguration du Monument "La Légion à ses Morts" sera placée sous la présidence de M. Carde, Gouverneur Général de l'Algérie.

Parmi les personnalités qui seront présentes à cette cérémonie grandiose citons :

M. le Maréchal Franchet d'Esperey.

MM. les Généraux Gouraud, Gouverneur Mililaire de Paris, Guillaumat, Directeur de l'Ecole de Guerre, Naulin, Georges, Commandant le 19e Corps d'Armée, Troisson, ,Commandant la Division d'Oran, Clément, Commandant la 4e Brigade, Etheillion ancien « Consul Général de Grande Bretagne » en Turkestan, Prince de Monaco, Boulet Desharraux, Lamiable.

Nous souhaitons à ces hôtes de marque une très déférente bienvenue.

Dans la Légion d'Honneur

Dans la promotion de la Légion d'Honneur établie à l'occasion du Centenaire de la Légion Etrangère, nous relevons les noms de MM. Theraube, Chef de Bataillon au 5e Etranger, fait Officier, Tikhonravov, Capitaine et Laparra, Lieutenant, du 1er Etranger, promus Chevaliers.

Nous leur adressons nos vives félicitations.

Un communiqué de la mairie

Le Maire de la Ville de Sidi-Bel-Abbès, a l'honneur d'aviser ses concitoyens, de la venue à Sidi-Bel-Abbès le 29 Avril, de M. le Gouverneur Général CARDE. Ce même jour, la Cité aura l'honneur de voir débuter les grandioses fêtes du Centenaire de la Légion.

A ces occasions, la Municipalité a la conviction que toute la population Bel-Abbésienne aura à cœur de donner à la Ville, un air de fête en pavoisant et en illuminant les façades de ses immeubles.

Elle fait un pressant appel auprès des Administrations, Banques, Indutriels et Commerçants, pour qu'il prennent d'ores et déjà toutes leur dispositions pour donner congé à leur employés et ouvriers le 29 Avril après midi pour acclamer le Chef de 1a Colonie et le 30 Avril, jour de l'inauguration du Monument aux Morts de la Légion, que tous les Bel-Abbésien voudront considérer comme férié.

Proclamation du Maire

Chers Concitoyens,

Mercredi 29 Avril 1931, à 16 heures M. Jules CARDE, Gouverneur Général de l'Algérie, sera l'hôte de la Ville de SIDI BEL-ABBÈS.

L'éminent représentant de la République Française, qui vient représenter le Gouvernement

aux fêles du Centenaire de la Légion Étrangère et tout particulièrement à l'inauguration du

Monument aux Morts de ce régiment d’élite fait sa première visite à notre ville.

Nous aurons donc à cœur de manifester notre enthousiasme en acclamant ce digne représentant qui est des nôtres, puisqu'il est né sur nôtre belle terre d’Algérie.

A ce double titre, nous l'accueillerons avec toutes les marques de la plus chaleureuse sympathie.

Notre devoir est de témoigner, à notre chère Légion tout l'amour que nous avons pour elle. Notre Ville est son Berceau. Nous l'avons vu grandir. Bel-Abbès lui doit en partie sa prospérité. Elle fêtera dans deux jours son Centenaire. Elle inaugurera ce beau monument édifié dans la cour de sa caserne et qui rappellera que de nombreux légionnaires sont tombés pour agrandir notre empire colonial et repousser l'ennemi qui, lors de la dernière guerre, avait envahi notre sol.

Chers concitoyens, pavoisez et illuminez vos demeures et pendant tous ces jours de fêtes, vibrons tous à l'unisson.

Vive Bel-Abbès ! Vive l'Algérie !

Vive la France ! Vive la République

L. BELLAT

Maire

Programme général des fêtes

MERCREDI 29 AVRIL

Après midi. — Réception des délégations. Cérémonie au Monument aux Morts de la ville.

Soir. — 2 l h. 45. Retraite aux flambeaux avec motifs lumineux, Arrêt au plateau Bugeaud, feu d'artifice; Rentrée à la caserne.

JEUDI 30 AVRIL

Matin. — 8 h 30. Inauguration du Monument « La Légion à ses Morts ». Cartes blanches et jaunes.

10 h. 30. — Cérémonies religieuses.

12 h 15. — Grand Banquet (garage Serua,). Cartes blanches.

Après midi — 15 h. 1er Concert par l'orchestre à cordes au Foyer du Légionnaire du stade Girardot. Cartes blanches et roses.

Soir. — 21 h. Revue de la Légion « Cent ans de guerres » au Foyer du Légionnaire du stade Girardot. Cartes blanches et roses.

21 h 30. — Bal privé (Garage Falcon) Cartes de toutes couleurs.

VENDREDI 1er MAI

Matin.— 9 h 30. Congrès des anciens légionnaires (salle de lecture du Foyer du Légionnaire caserne du 1er Étranger).

Après-midi.— 14 h. 30. Sports. Carrousel (Stade des Amarnas.) Cartes de toutes couleurs.

Soir. — 21 h. Attractions (Foyer du Légionnaire du Stade Girardot). Cartes blanches et roses.

SAMEDI 2 MAI

Matin. — 8 h. 30. Attractions au Foyer du légionnaire (au stade Girardot) séance réservée aux délégations et légionnaires du 1er Étranger. ) 9 h. 30 Congrès (comme le 1er Mai)

Après midi. —18 h. Festival au Jardin public.

Soir. — 21 h. Revue de la Légion (comme le 30 Avril). Cartes blanches et bleues.

DIMANCHE 3 MAI

Après midi. — 15 h. 2e Concert par l'orchestre à cordes. Cartes blanches et bleu.

Grand Meeting d'Aviation organisé par les clubs Aéronautiques d'Oranie et de Bel-Abbès avec la participation de l'as Lemoigne.

Soir. — 21 h. Attractions. Cartes blanches et bleues.

LUNDI 4 MAI

Après midi. — 14 h. 30. Attractions. Cartes blanches et grises.

Soir. — 21 h. Revue de la Légion. Cartes blanches et grises.

A partir du 29 Avril et pendant la durée des fêtes : KERMESSE organisée par les Médaillés Militaires près le Monument aux Morts.

Les 30 Avril soir et le 1er Mai (soir) BAL PUBLIC sur la Place Carnot.

19310426 - Le Caporal de Rakkha.

BNF

 

Tandis que l'on fêtait le centenaire de la légion étrangère, deux scènes se .présentèrent à ma mémoire avec la force des images qui ne s'oublient pas, qui subsistent, intactes, vigoureuses dans le jet des souvenirs confus que porte toute sa vie avec lui un voyageur.

Elles sont revenues me hanter, ces jours derniers, lorsque le hasard me fit piloter un légionnaire à travers Paris. Il était gauche, enfantin, miraculeusement astiqué.

Il n'était pas à sa place. Et son dépaysement, sa gène me faisaient penser sans cesse au cadre vrai des hommes tels que lui.

Ainsi je revis tout d'abord une longue route, pierreuse, cahoteuse qui allait de Deraa à Soueïda.

C'était en avril 1926, alors qu'une colonne allait reprendre une seconde fois la capitale druse.

Les troupes étaient parties dans la nuit et je les rejoignais en automobile jusqu'au premier bivouac.

Il apparut vers midi, fouillis de petites tentes blanches perdues dans les broussailles. Sous la toile relevée pour que l'air circulât, les hommes, recrus de fatigue et de chaleur, dormaient côte à côte. Les files de corps bruns, dans leur sommeil massif, avaient la force et la poésie brutales de la terre ardente'.

Seul, au milieu de cette immense lassitude, un groupe de soldats veillait, fourbissant des armes, poussant des mulets vers une fontaine. Mais bien plus encore que cette activité, leur aspect força, fascina mon attention.

La patine de leurs visages, leurs sombres regards, l'audace et la dureté de leurs fronts avaient un relief saisissant. Soudain, comme un mulet glissait, l'un d'eux jura en russe et un autre en allemand.

Du coup, je compris. Ils appartenaient à la légion.

La légion Ce mot, pour tout homme sensible au mystère, au courage, au hasard, a un pouvoir prestigieux. Hypnotisé, je les regardais passer.
Ils allaient carrés, lents. Leurs figures étaient fermées comme autant d'énigmes. Leurs yeux étaient absents.
Ils marchaient tête nue, malgré le soleil, tranquilles; maussades, muets. Ils venaient de se battre au Maroc. Ils recommençaient en Syrie. Que leur importait ? Ils avaient choisi un terrible métier qui était pareil partout.

Par quel mystérieux enchantement ces Allemands se faisaient-ils si bien tuer pour la France ?

Pourquoi ces Russes voulaient-ils mourir sur les pentes du Djebel ? Personne ne l'a expliqué, personne ne l'expliquera.

Six mois après, je partais en avion de Der-es-Zor, sur les bords de l'Euphrate, où j'avais été l'hôte de l'escadrille et du capitaine méhariste Muller, roi du désert de Syrie, pour gagner Alep.

Nous suivions les méandres du vieux fleuve lorsque le jeune sergent pilote qui me conduisait me fit signe qu'il avait des difficultés avec son moteur. Apercevant un minuscule village, accroché à une boucle de l'Euphrate, au milieu du désert, il se posa près de lui.

11 y avait là une section de la légion et, par bonheur, une équipe de mécaniciens d'aviation.

Tandis que ces derniers s'occupaient de notre appareil, leur adjudant nous conduisit à la baraque Adrian où logeaient les gradés, c'est-à-dire lui, le sergent et le caporal des légionnaires, tous deux Français.

Ces derniers se trouvaient déjà à la cantine, en train de boire du porto, le seul vin qui leur restât, car le ravitaillement était en retard. Ils nous accueillirent chaleureusement, surtout le caporal.

Malgré son bas grade, il devait avoir soixante ans environ. Il était chauve, chétif d'aspects et des moustaches très soignées ombrageaient une bouche fine, sinueuse, intelligente..

Sa conversation me surprit davantage encore que son physique étrange.

Vous êtes à Rakkha, me dit-il, l'ancien séjour de plaisance du khalife Haroun-al-Raschid.

Et dans un langage choisi, avec une érudition souriante, il me parla du grand souverain arabe,
du khalife légendaire. Il me fit voir les ruines de son palais, dont on apercevait encore les lourdes murailles crénelées et parmi lesquelles on trouvait des restes de poteries admirables, couvertes de fleurs d'une miraculeuse fraîcheur.

Puis, cet étrange caporal mit la conversation sur des hommes politiques, sur des savants, sur des écrivains illustres. Il en discourait avec une information surprenante.

De temps en temps, il lissait sa moustache et souriait. Et le sou- rire était plus énigmatique encore que ses paroles.

Lorsque gronda le moteur de notre avion et que je m'apprêtai à monter dans la carlingue, il me
dit.  Je ne peux vous confier mon nom. Je le regrette. J'aurais bien voulu que vous disiez bonjour de ma part à tous les amis dont je viens de vous parler.



J. Kessel.

19310411 - Le Centenaire de la Légion étrangère.

BNF

 

Le Centenaire de la Légion étrangère.

I. Le monument du Centenaire.

Le 30 avril 1931, dans la cour du quartier Viénot, à Sidi-bel-Abbès, la Légion étrangère inaugurera le monument élevé par les légionnaires à leurs morts tombés au cours des cent années écoulées depuis le 10 mars 1831, date de l'ordonnance royale de Louis-Philippe constituant ce corps.

Ce sera la fête du Centenaire de cette arme.

La date du 30 avril a été choisie parce qu'elle est le jour anniversaire du combat de l'hacienda de Camerone (Mexique 1863). Au cours de ce combat, qui dura 9 heures, 62 légionnaires, commandés par le capitaine Danjou et les sous-lieutenants Vilain et Maudet, tinrent tête à 1.800 Mexicains, dont ils forcèrent l'admiration. Sous un ciel de feu, sans eau, sans espoirs de secours, entourés par l'incendie, ils s'étaient juré de mourir plutôt que de se rendre, et tinrent parole, sauvant le convoi dont ils devaient assurer le passage, tuant 200 de leurs ennemis, en blessant 300.

Par ordre de l'Empereur, le nom de Camerone fut inscrit en lettres d'or sur le mur des Invalides, suivi du nom des trois officiers.

Le monument, qui sera inauguré et qui est actuellement en construction, est en onyx. La pierre provient de la carrière de Sidi-Hamza, située à 75 kilomètres de Sidi-bel-Abbès, carrière mise gracieusement à la disposition du colonel commandant le 1er Régiment Étranger par le Gouverneur général de l'Algérie. Depuis près de deux ans, les légionnaires extraient, taillent, polissent, puis transportent à Bel-Abbès les blocs destinés à ce monument.

Il offre l'aspect d'un tronc de pyramide irrégulier sur le sommet duquel repose le globe terrestre. Sur quatre socles placés aux quatre angles, quatre légionnaires évoquent la Légion au cours de son siècle d'existence : le légionnaire de 1831, celui de l'Empire, le colonial, enfin celui de la dernière guerre, montent la garde autour du globe terrestre, sur lequel les régions où la Légion a combattu sont recouvertes d'un enduit doré :

Pour l'Europe : la France, l'Espagne, l'Italie, la Grèce, la Turquie, la Russie. Pour l'Asie : le Tonkin, l'Annam, le Cambodge, la Cochinchine, l'île de Formose. Pour l'Afrique : l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, le Soudan, le Dahomey et Madagascar. Pour l'Amérique : le Mexique.
Les faces du monument mesurent respectivement 9 mètres et 7 mètres de largeur à la -base. Les légionnaires ont 3 mètres de haut. La hauteur totale du monument, une fois achevé, sera de plus de 6 mètres. Une des grandes faces portera l'inscription: « La Légion à ses morts 1831-1931 ».

Les frais nécessités par l'élaboration des plans, l'achat du matériel d'exploitation, la fonte des sujets en bronze d'un poids total de 6.500 kilos, le transport des pierres de la carrière de Sidi-Hamza à Bel-Abbès, et par l'édification, ont été comblés par les dons de tous les officiers et soldats servant à la Légion : au Maroc, au Levant, au Tonkin, en Algérie et dans le Sud-Oranais, puissamment aidés par les recettes résultant des tournées artistiques accomplies en 1929, en Afrique du Nord, par le légendaire orchestre à cordes du 1er Étranger. Quelques amis de la Légion ont apporté leur obole, mais aucune aide n'a été demandée, et les sociétés d'anciens légionnaires qui auraient désiré participer pécuniairement à l'édification ont été invitées à conserver leurs ressources pour permettre à leurs membres de venir à Bel-Abbès le jour de l'inauguration.

La liste des donateurs sera scellée dans le monument; la pose de la première pierre a eu lieu le 8 octobre 1930. Il a été édifié avec l'autorisation du ministre de la Guerre, dans la caserne de Bel-Abbès, à la demande des légionnaires •— officiers et soldats, anciens et jeunes — qui auront ainsi journellement devant les yeux le souvenir de leurs aînés morts pour la gloire de cette arme.

Ce monument, qui recevra, désormais, les nouveaux engagés et dira adieu aux libérés, a donc été construit pour les légionnaires et par eux;.. Il leur appartient. Son but n'est pas d'embellir une cité. Il est destiné à concrétiser le symbole de la Troupe donnant asile à ceux qui cherchent en elle un refuge et à commémorer ses gloires passées. Il montrera aux générations futures que le légionnaire de la Légion étrangère française est au moins l'égal de son homonyme : le légionnaire romain qui a inscrit des traces durables de son passage partout où il s'est montré. Comme lui, après avoir été le premier au combat, il prend, son métier de soldat terminé, la pelle et la pioche pour construire des routes et créer des villes; la truelle et le marteau pour édifier, à la mémoire de ceux qui sont morts, un monument digne d'eux.

II Les faits d'armes principaux.

Algérie (1831-1834). — Dès que son organisation fut à peu près terminée en Algérie, la1 Légion s'y fit connaître par sa défense désespérée du Marabout de Sidi Mohamed, près de Maison-Carrée, où succombèrent le lieutenant Cham et ses 27 légionnaires (1832).

De 1832 à 1837, elle combattit à Bône, Oran et Karguentah, assista à la prise d'Arzew et défendit Mostaganem. Elle participa aux combats de Moulay Ismaël et de la Macta, puis à la prise de Constantine (1837), où le sergent-major Doze s'empara d'un drapeau et où le capitaine De Saint-Arnaud, le futur Maréchal de France, s'illustra.

1839 voyait la Légion à la1 prise de Djidjelli, à la colonne de Bougie, puis à la défense de Milianah où, après 4 mois de siège, le 4" bataillon, qui comptait 750 hommes au début, était réduit le jour de la délivrance à 208. Tout le reste, sauf 80 hommes à l'ambulance, avait succombé.

Pendant que le colonel de Huisen, 9 officiers et 207 légionnaires succombaient au Fondouck de la province d'Alger, par suite des fièvres et du manque d'eau, le 1er Régiment Étranger se signalait, par une belle défense, à Coléah, à la colonne du Chéliff et construisait Orléansville (1843). Le 2e Régiment, à la même époque, défendait Djidjelli et Bougie, guerroyait contre les Hamenchas et, sous les ordres du Duc d'Aumale, occupait Biskra et recevait son drapeau.

La construction de Bel-Abbès date de la même époque (1844).

De 1845 à 1880, les deux régiments poursuivaient Bou Maza, s'enfonçaient dans le Sud jusqu'à Aïn-Sefra1 sous les ordres du général Cavaignac, puis opéraient en Kabylie avec Canrobert. Le 2e Régiment se signalait particulièrement aux deux sièges de Zaatcha.

Jusqu'en 1854, la Légion parcourait la Kabylie, concourrait à la soumission des Beni-Snassen, puis, avec le colonel Desvaux, 200 légionnaires, montés sur des chameaux partaient dans la direction d'Ouargla, appliquant en Algérie les essais tentés par Bonaparte en Egypte.

Crimée (1854-1855). — En 1854, les deux régiments sont envoyés en Crimée et s'illustrent à l'Alma. Le 1er Régiment enlève le Bastion Central devant Sébastopol, et son colonel, Viénot, est tué pendant que le colonel Saussier, commandant le 2e Régiment, est décoré pour son intrépidité clans la défense des tranchées de la Quarantaine. Les deux régiments étaient cités à l'ordre de l'Armée pour leur admirable bravoure.

Algérie (1856-1863) et Italie (1859). — Après avoir parcouru pendant trois ans la Kabylie et s'être particulièrement signalés à la prise d'Igheriden, les deux régiments furent envoyés en Italie et se firent remarquer à Magenta. Rentrés en Algérie, ils furent employés à différentes opérations dans la région de Sétif et des Beni-Snassen jusqu'au moment de leur départ au Mexique. Mexique (1863-1867) et Algérie (1867-1870). —

C'est au cours de l'expédition du Mexique que la 3e Compagnie, commandée par le capitaine Danjou, et forte de 62 hommes, livra le légendaire combat de Camerone (30 avril 1863) que nous avons rappelé en commençant. Après avoir participé au siège d'Oayacca, à la colonne sur Monterey, où le bataillon Saussier fit trente lieues en 32 heures, sac au dos; au combat de San Isabel, où le commandant Brian, 6 officiers et 102 légionnaires, sur 177, trouvaient la mort, la Légion rentrait en Algérie et jusqu'en 1870 participait à la colonne contre les Ouled-Sidi-Cheikh.

France (1870-1871) et Algérie (1870-1883). La — guerre franco-allemande voyait 3 bataillons de la Légion à Orléans, Coulmiers, Cercottes et Montbéliard, pendant que les unités restées en Algérie continuaient les opérations contre Si Kaddour ben Hamza, grand chef arabe.

En 1881, le Sud oranais s'étant soulevé sous l'influence de Bou Amama, les légionnaires firent partie de toutes les colonnes et se signalèrent plus particulièrement au combat du Chott Tigri, perdant sur l'effectif de deux compagnies tous leurs officiers, 53 tués, 29 blessés, mais sauvant leurs morts et forçant à la retraite 4.000 arabes. Le général Saussier, qui commandait le 19" Corps, pouvait écrire : « La Légion étrangère, qui compte déjà tant d'actes héroïques et de glorieux souvenirs, peut inscrire le combat du Chott Tigri aux IDIUS belles pages de ses annales ».

Tonkin (1883-1914). — Les incidents du Tonkin ayant nécessité l'expédition de troupes en Extrême-Orient, le général de Négrier, un ancien légionnaire, obtint que 4 bataillons de la Légion y fussent envoyés. Son Tay, Bac Ninh, Hong Hoa, puis Formose, Fou Tchéou, les Pescadores sont leurs étapes. Ils sont les premiers à Langson. Deux compagnies de la Légion s'immortalisent à Tuyen Quang, en résistant pendant 4 mois à l'attaque de 10.000 pavillons noirs; 198 légionnaires sur 390 étaient tombés (1885). Puis c'est, de 1886 à 1894 : le cap Pac-Lung, Ioc Nara, Bac Day, Lung Kett, les colonnes du Yen The et Mona Luong, etc.. Le Siam voit aussi les légionnaires et, jusqu'en 1914, de nombreuses colonnes, dans toutes les directions, maintiendront la sécurité de la grande colonie.

Dahomey (1893) et Soudan (1892-1894). — La Légion apporte un sérieux appoint à la conquête du Dahomey, se distingue à Poguessa et à Koto, pendant qu'à la même époque, au Soudan, elle contribue puissamment à la prise de Bosse.

Madagascar (1895-1905).— L'expédition de Madagascar ayant été décidée, un bataillon de Légion y est envoyé. Il fait partie de la colonne légère qui entre, le 30 septembre 1895, à Tananarive, et le général Galliéni demande bientôt le renfort d'autres unités de la Légion. De 1895 à 1905, les légionnaires parcourent la grande île. Ils sont à Ambohidan, à Nossy Bé, à Vohingezzo. Partout, ils poursuivent les rebelles et, à Diego-Suarez, organisent un point d'appui de premier ordre.

Algérie (1883-1914). — Dès 1900, la conquête du Sahara est entreprise par les compagnies montées de la Légion. C'est le commandant Letuile qui, avec 2 compagnies de Légion, traverse le Grand Erg et atteint Timimoun. En 1903, El-Moungar, où 113 légionnaires résistent, pendant 8 heures, aux attaques de plusieurs centaines de dissidents, perdant leurs 2 officiers, 34 tués et 47 blessés; Taghit, Zenaga marquent l'occupation des Oasis. Les opérations en Algérie sont, dès ce moment, terminées. Le Maroc va devenir le champ d'action de la Légion.

Maroc (1906-1930).— Le combat de l'Oued-Nesli (1900) en est la prélude, puis c'est l'occupation d'Oudjda et de Casablanca, les affaires de Beni- Ouzien et Bou-Denib. En 1911, la Légion fait partie de la colonne de Fez. Les années suivantes voient la conquête de la région Nord du Maroc et la liaison avec l'Algérie, sous les ordres des généraux Moinier, Gouraud et Henrys. Taza est prise. Mangin atteint Marrakech. Le 2 août 1914, trois bataillons de la Légion combattent au Maroc. Pendant la grande guerre, non seulement les légionnaires n'abandonnent pas les régions conquises, mais, sous les ordres de Lyautey, ils agrandissent notre domaine. Depuis 1920, trois régiments étrangers sont au Maroc. Jusqu'en 1925, ils élargissent sans cesse la zone soumise à notre influence, le 3e Étranger vers Taza, Fez et Ouezzan, le 2e vers Meknès et le Tadla, le 4e vers Marrakech. Des bataillons du 1er Étranger d'Algérie viennent, chaque année, contribuer à l'extension coloniale. Puis c'est la campagne du Rif où, sans arrêt, pendant des mois, les bataillons de Légion, s'opposent à l'envahisseur et finalement assurent la victoire. Depuis 1926, grâce aux légionnaires, qui tiennent les portes du Sud, et aux compagnies montées, qui sans cesse rayonnent, la sécurité complète existe dans le Maroc soumis. Le « Maroc Utile » du Maréchal Lyautey sera bientôt sous la domination effective du Sultan.

Syrie (1921-1930). — Depuis 10 ans, la' Légion est en Syrie. Deux bataillons, pendant 5 ans, de 1921 à 1926, un seul depuis 1926, aidés par des escadrons de la cavalerie de la Légion, ont vigoureusement contribué à ramener le calme dans un pays en effervescence. Aïn-Tab, Messifre ont valu aux unités des citations à l'ordre de l'Armée. Actuellement, Homs et Palmyre deviennent des centres importants et sont reliés aux grandes cités, grâce à la Légion.

Tonkin (1914-1930). — Pendant la grande guerre, les unités stationnées au Tonkin ont été progressivement ramenées en Algérie et en France. En 1918, une seule compagnie de Légion restait dans la Colonie. Depuis cette époque, successivement, 2, 3, puis 4 bataillons ont été envoyés en Extrême- Orient. Les opérations de guerre n'ont pas été nombreuses, mais, grâce à ces bataillons, lai tranquillité a régné dans la Colonie.

La Grande Guerre (1914-1918). — Dès le début des hostiliés, les 1er et 2e Régiments étrangers formaient, avec les éléments des nations neutres ou alliées, l'ossature des différents bataillons de marche qui, jusqu'à la fin de 1915, luttèrent sur la Marne, en Artois, dans la Somme, et dont les restes devinrent le fameux Régiment de marche de la Légion étrangère qui se couvrait de gloire en 1916- 1917-1918. arborant à son drapeau, au moment de l'armistice, la Légion d'honneur et neuf palmes, se plaçant ainsi en tête de l'Armée française.

III. Participation de la Légion au développement colonial de la France.

Au moment où l'Exposition Coloniale va ouvrir ses portes à Vincennes, on ne saurait sans ingratitude penser qu'à la même date (30 avril 1931), à Sidi-bel-Abbès, le 1er Étranger célébrera le Centenaire de la création de la Légion étrangère, en inaugurant un monument construit par les légionnaires.

Comment évoquer nos colonies sans penser en même temps à ceux qui ont tant contribué à nous conquérir le 2e empire colonial du monde ? Par la loi du 9 mars 1831, suivie de l'ordonnance royale du 10 mars, le Roi Charles X substituait au Régiment de Hohenlohe, dernier vestige des troupes étrangères ail service de la France, une Légion étrangère dont l'emploi était uniquement prévu en dehors du territoire continental du royaume.

Les Suisses des six régiment qui venaient d'être licenciés, les nombreux) étrangers expulsés de leur pays pour raison politique, à la suite du contrecoup produit en Europe par la Révolution de 1830, et qui cherchaient un refuge en France, y vinrent naturellement. La France venait d'entreprendre la conquête de l'Algérie. La place du nouveau corps y était toute indiquée.

Depuis cette époque, " depuis un siècle, la Légion " a pris part à toutes les guerres entreprises par « la France pour la défense du droit. Elle a été au loin, avec nos trois couleurs, porter les bienfaits de la civilisation et, si notre pays peut montrer fièrement les résultats de sa politique coloniale, c'est bien un peu grâce à ces désabusés, à ces Bons-à-tout » qui viennent à elle pour abriter leur désespérance à l'ombre du drapeau de la Légion». (Extrait de l'Introduction à l'Historique du Régiment de marche de la Légion étrangère).

Les guerres d'Espagne, Crimée, Italie, Mexique, etc., ont fait connaître cette troupe spéciale dans les milieux militaires européens. La dernière guerre mondiale a immortalisé le Régiment de marche de la Légion étrangère, qui comptait dans ses rangs des gens provenant de plus de cent nationalités différentes; mais c'est aux colonies que la Légion a laissé les traces les plus durables de son passage.

Dès 1831, l'Afrique du Nord est devenue le principal théâtre de ses exploits. Les provinces d'Alger. d'Oran, de Constantine, la Tunisie, depuis 1880, le Maroc depuis 1907, lui sont redevables d'une pacification rapide complétée par les travaux de toutes sortes entrepris parallèlement ou après les opérations militaires.

Les routes construites, les marais desséchés, la terre mise en valeur ont fait du légionnaire actuel l'égal du légionnaire romain. De nombreux centres de colonisation ont pour origine le poste construit et gardé par la Légion pour assurer la sécurité du pays conquis. Sidi-bel-Abbès est son oeuvre. Une ville qui compte aujourd'hui 40.000 habitants a remplacé le Biscuitville de 1845. Les pistes du Sud-Oranais, les voies de pénétration qui de jour en jour, permettent de franchir le Grand Atlas : c'est aux légionnaires qu'on les doit en grande partie ; si, actuellement, le Sahara est en contact immédiat avec la Méditerranée et si un jour le Niger est relié avec l'Afrique du Nord, ce sera un peu grâce à l'appoint résultant de leur effort.

Aujourd'hui, en Afrique du Nord, la limite de la zone dissidente est marquée par les postes tenus par la Légion.

Que ce soit vers le Rif, le Tafilalet ou le Sud-Oranais, les dix bataillons de la Légion qui montent la garde à la limite de la région soumise, appuyés sur les compagnies montées et les escadrons du Régiment de cavalerie étrangère, s'opposent victorieusement aux incursions ennemies.

Tous les bataillons de Légion qui, en 1925, ont participé à la lutte contre Abd-el-Krim ont été cités à l'ordre de l'Armée. Leurs pertes ont été lourdes.

Madagascar, le Dahomey, le Soudan ont vu ce corps, au cours de la conquête et des chefs tels que Négrier, Dodds, Galliéni et Lyautey, ont pu, dans leurs ordres du jour, glorifier cette troupe au point de la considérer comme le premier artisan de la victoire : " C'est grâce à vous, messieurs, que nous devons d'être ici », disait un jour un grand colonial aux officiers du bataillon de marche de Madagascar qui, après la conquête, devait être rapatrié.

Le Tonkin utilise la Légion depuis 50 ans et notre belle colonie d'Extrême-Orient vient récemment encore de faire appel à un nouveau bataillon. Hanoï, Langson, Tuyen-Quang ont été les étapes successives ! La frontière de Chine reste inviolée grâce aux1 légionnaires. Formose et le Siam les ont connus.

Sur les bords du Tigre et de l'Euphrate, le bataillon de Légion, qui occupe Homs et Palmyre retrouve les traces des légionnaires romains et les imite.

Enfin, la Légion est appelée à donner son appui où la nécessité s'en fait sentir. C'est au moment où l'Exposition Coloniale vu s'ouvrir et la Légion fêter son Centenaire qu'il convient de songer qu'en servant sous le drapeau tricolore, les légionnaires, enfants de tous les pays du monde, ont augmenté le patriomoine de la France, épargnant en même temps les larmes de bien des mères françaises.

Enfin, leur barde, le Capitaine de Borelli, un de leurs chefs du siège de Tuyen-Quang, a dépeint magistralement la troupe qui résistait pendant 45 jours aux assauts furieux de 19.000 pavillons noirs et pirates, se confondant dans la gloire avec les aînés de l'hacienda de Camerone :

Jamais garde de roi, d'empereur, d'autocrate, de Pape ou de Sultan, jamais nul régiment chamare d'or, drapé d'azur ou d'écarlate n'alla d'un air plus mâle et plus superbement.»

L'Histoire coloniale est écrite dans les plis du drapeau de la Légion qui porte comme devise : « Honneur et Fidélité ».

IV. Historique de la Musique du 1er Etranger.

La création de la Musique militaire du 1" Régiment étranger date de la fin de l'année 1831. D'un effectif très réduit, plusieurs années de travail et d'efforts furent nécessaires pour la mettre en état de se produire et ce n'est guère que vers 1884 qu'elle commença, sous la direction de M. le Chef de musique Doëring, à se faire une réputation qui la mit bientôt en relief par rapport aux autres musiques des Régiments de France.

A la fin de l'année 1887, l'orchestre à cordes fut créé par M. le Chef de musique Porch. Cet orchestre se perfectionna jusqu'en 1914, date à laquelle il atteignit une brillante renommée sous les directions respectives de MM. Salomez, Quéra, Sellennik, Sabion, Barbier et Dussenty.

A la déclaration de la guerre (août 1914), l'orchestre à cordes est à peu près dissout et les musiciens qui le composent sont affectés au Régiment de marche ainsi que la plus grande partie de la musique militaire qui se trouve réduite à quelques unités seulement.

En 1919, après la signature de la paix, M. P. Aka est affecté au 1er Régiment Etranger et, sans négliger la musique militaire, il réforme l'orchestre à cordes et obtient sur sa demande, en 1924, un chef de musique adjoint, M. Perdereau. lequel fut, quelque temps après, remplacé par M. Luquet. Un travail intensif leur permit de faire prendre à l'orchestre un essor sans cesse grandissant. Avant 1924, l'orchestre à cordes comprenait une quarantaine d'exécutants ; actuellement, la situation du matériel d'orchestre permet de présenter environ 90 exécutants.

V. Le Colonel Rollet.

Malgré certaines campagnes systématiques de dénigrement dirigées contre la Légion Étrangère, les effectifs de celle-ci n'ont cessé d'augmenter, ("est ainsi que l'on compte actuellement cinq régiments de cette arme dont quatre d'infanterie et un de cavalerie.

Afin de maintenir à cette troupe d'élite son unité et sa cohésion, le Ministre de la Guerre a décidé que les dépôts d'infanterie et de cavalerie de la Légion Étrangère seront rassemblés à Sidi-bel-Abbès. où l'instruction des légionnaires pourra être faite dans les meilleures conditions et aux moindres frais.

D'autre part, il a été créé une inspection de la Légion. Ces fonctions ont. été confiées au colonel Rollet, récemment promu général, qui commandait ces jours derniers encore le 1er Régiment à Bel-Abbès. Ce choix ne pouvait être plus heureux, puisque le général Rollet a accompli la plus grande partie de sa carrière dans cette troupe.

C'est, en effet, depuis 1899, trois années après sa sortie de Saint-Cyr, qu'il débuta au 1er Étranger. Avec ce régiment, il prit part aux opérations dans les oasis sahariennes. Après un séjour de deux années à Madagascar, il passa de nouveau au 1er Étranger, puis comme capitaine au 2e Régiment de la même arme. Il fut alors de presque toutes les opérations qui se succédèrent au Maroc et dans les confins Sud-Algériens.

Au début de la grande guerre, le capitaine Rollet vint sur le front français où il combattit avec le 31e d'Infanterie. En l'espace de quinze jours, il fut blessé deux fois : au combat de Catay et de Laimont.

En octobre 1915, on lui donna, avec le grade de lieutenant-colonel, le commandement du 331e d'Infanterie. En juin 1917, on le mit à la tête du régiment de marche de la Légion étrangère, unité avec laquelle il se distingua au cours de nombreux combats.

Appelé, en septembre 1920. au commandement du 3e Étranger, il reçut la même année, la cravate de commandeur de la Légion d'honneur. Il commandait déjà le 1er Etranger lorsqu'il fut promu  Colonel en septembre 1925.

Au cours de sa belle carrière, le Général Rollet a été cité huit fois.

La Légion a, à sa tête, un chef digne d'elle.

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