18951217 - Le Messager de l'Ouest - Lettre de Madagascar... (suite 2)

 

Lettre de Madagascar... (suite 2)

 

Mais il a fallu retourner à plus de 6 kilomètres, chercher les sacs On a déjeuné, et à 2 heures nous sommes repartis en avant.

A 6 h. 1/2 du soir, arrivée à l'étape, après avoir escaladé ces immenses hauteurs. Fatigue terrible. Tout le monde était à bout, et après avoir mangé, à 9 h. 1/2, je me suis laissé tomber sur ma couverture pour dormir d'un sommeil de plomb.

Aujourd'hui 20, séjour. La 2e brigade va marcher devant nous à son tour. On suppose qu'à partir de maintenant la résistance dés Hovas sera nulle.

Par contre ils ravagent tout dans leur fuite. Tous les villages sont la proie des flammes et presque partout l'herbe ou la brousse est brûlée. De sorte que maintenant il faut se coucher sur le sol nu. Il est également très difficile de trouver du bois.

Il fait un froid de loup la nuit.

21 septembre 1895.

Encore séjour aujourd'hui pour permettre à la 2e brigade de prendre de l'avance.
Un fragment du courrier de France du 13 août est arrivé hier. p style="text-align: right;">Amtoby 23 septembre 1895.

Le 22, départ à 5 h. 30 du malin. Étape de 18 kilomètres, 6 h. 1/2 de marche fatigante. Le pays semble devenir moins accidenté. Une plaine mamelonnée entre deux chênes de montagnes qui se rapetissent au fur et à mesure que l'on avance.

Par ci par.là des villages ou plutôt des vestiges, car tout a été brûlée. La carcasse des maisons subsiste, carcasse en terre et briquettes rouges.

On trouve quelques cochons dans ces villages, des grenades et quelques amandes.

Aujourd'hui départ à 5 heures, 6 heures de marche-. Le pays devient de plus en plus beau ; des vestiges de villages partout, à chaque ruisseau ; en spécial on n'y voit que 6 à 10 maisons dans chaque. Certains sont fortifiés et ont fort bon air de loin. Dans leur précipitation les Hovas n'ont pas pu brûler, détruire tout, de sorte qu'il n'y a que les toitures en chaume qui ont brûlées. Plus nous pénétrons dans l'Emyrne, plus les habitations deviennent confortables ainsi que les alentours.

Des portes.en bois de chêne, grossièrement faites, il est vrai. Des charnières, des serrures, des charpentes bien assises, des volets aux fenêtres, jusqu'à des jalousies ou persiennes. Des balcons à certaines maisons, avec des arabesques sculptés en bois. J'ai vu des fauteuils style nouveau, une table ronde vernie avec des pieds tournés.

Devant une porte il y avait des crépins dénotant ainsi la demeure d'un gnaf. Bref, tout révèle une civilisation point du tout sauvage.

Mais tout est mort. La guerre a passée par ici. Pas un être humain. Par ci par là, un petit poussin abandonné ou un chien errant. Cela donne froid.

D'ennemis, pas de trace. Il est vrai que la 2e brigade qui nous précède, doit faire place nette.
24 septembre 95..
Nous sommes de garde au convoi et ne partirons qu'à 10 heures. Nous sommes à environ 60 kilomètres de Tananarive.

(A Suivre)

 

Pour nos Légionnaires

 

Nous avons reçu de M. le Maire de Bel-Abbès, la lettre suivante :

Bel-Abbès, le 15 Décembre 1895

Mon Cher Directeur,

 

Le Conseil Municipal s'est réuni hier en séance privée pour examiner les mesures à prendre en vue-de recevoir le plus dignement possible les troupes ayant tait partie du corps expéditionnaire de Madagascar qui doivent rentrer prochainement.

Conformément à une décision prise au cours de cette séance j'ai l'honneur de vous adresser ci-inclus une liste de souscription en vous priant de vouloir bien recueillir les offrandes de nos concitoyens qui ont toujours fait preuve de la plus grande générosité chaque fois que l'on a fait appel à leur patriotisme.

La Commune s’inscrit en tête de cette liste pour une somme de 500 francs.

Le montant de ces souscriptions sera remis entre les mains de Monsieur le Colonel, commandant le 1er Régiment Étranger qui pourra en faire au profit des rapatriés l'usage qui lui paraîtra le plus convenable.

Veuillez agréer, Monsieur le Directeur l'assurance de mes meilleurs sentiments.

Le Maire, BASTIDE.

 

Prise de Tananarive

 

A peine eûmes-nous connaissance de la prise de Tananarive que nous fîmes part à nos lecteurs de l'analogie frappante qui existait entre notre nouvelle possession et le Tonkin.

A Madagascar,tout comme en Extrême-Orient, la piraterie existe et il nous y sera beaucoup plus difficile à la réprimer— le climat y étant beaucoup plus malsain — et la connaissance que nous avons de l'île étant des plus imparfaites.

Nous ne pourrons employer à courir sus aux bandits Sakalaves que les troupes noires nous venant de la côte occidentale d'Afrique et si l'on tient compte des nombreuses défections qui se produisent, chaque, chaque années parmi nos noirs.; volontaires attirés par l'appât d'une prime, nous sommes persuadés que ce qui se passe au Tonkin se passera également à Madagascar.

La piraterie malgache trouvera des recrues dans les rangs des haoussas, les troupes noires devant seules occuper les divers points stratégiques de l'île.

Non contents de s'en prendre aux habitants de piller leurs cases, les fahavalos attaquent nos troupes blanches qui se dirigent vers la côte et tel pauvre diable que la maladie où les balles avaient épargné et qui croyait bientôt revoir la France succombe au coin d'un bois d'un fossé ou d'une route !

En effet nous lisons dans le Petit  Journal les lignes suivantes :
— « On disait hier que la colonne du général Metzinger est arrivée a Marololo fort réduite par les maladies et seulement 300 hommes- Aurait il pu. avec ces faibles forces, purger la roule des fahavalos audacieux qui l'ont envahie ? Cela me parait douteux.

Un détachement parti le 30 octobre d'Andriba pour Tananarive, sous le commandement du capitaine Pognard, a été attaqué par des bandits : on les a repoussés et huit d'entre eux seraient tombés entre nos mains, mais à un kilomètre à peine de Suberbieville, Rainigita, un des chefs sakalaves qui était revenu des premiers, a été razzié par des pillards qui lui ont volé des bœufs et, tué un homme sans qu'il pût se défendre, car on leur a enlevé leurs fusils et il n'y a plus à Madagascar que les voleurs qui soient armés. Le parc de Sakoabe, à 500 mètres de Majunga, où l'intendance avait réuni un certain nombre de bœufs, a été également enlevé dans la nuit du 3 au 4 novembre.

« Comme vous le voyez, la situation n'est pas très brillante, et il est temps que les troupes noires destinées à garder la vallée du Betsïboka nous arrivent. On dit que l'intention du général Duchesne est de maintenir à Mévatanana une garnison de 300 hommes avec 100 mulets ou chevaux et six mois de vivres ; ce ne sera pas de trop si ont veut utiliser la voie fluviale. »

N'est-ce pas que c'est édifiant et que la danse des millions et l'envoi des petits paquets de troupes va recommencer ! Nouveau minotaure Madagascar, va distraire de notre trésor le plus clair de nos réserves métalliques, et nous dégarnirons le Sénégal qui surveille Tombouctou pour garantir avec 5 à 6-000 hommes un territoire de 590.000 kilomètres carrés ! plus grand que la France !

L'Algérie a plus de 60.000 hommes pour la garder et on prétend faire respecter notre drapeau sur ce territoire Malgache avec 6.000 hommes.

Nous souhaitons de tout notre cœur que de cruels mécomptes ne viennent pas s’ajouter à nos embarras financiers et administratifs.

A. BOURDON.

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